N’empêche, n’avoir que peu de client après une période aussi terrible de sa vie n’était pas plus mal. Certes, ça voulait dire qu’ils avaient un manque à gagner au niveau revenus et qu’il allait encore se prendre la tête avec la comptabilité, mais au moins, il pouvait être un peu au calme. Pas que la boutique soit particulièrement agitée même quand les clients affluaient, mais après le triathlon, les nouveaux décrets, le sauvetage d’Eire (et tout ça pas dans le bon ordre d’ailleurs…)…Eire. Il ne l’avait pas encore revue depuis son sauvetage. Il lui avait souhaité un bon retour dans de grandes embrassades émues, mais après…Rien. Il avait hésité à aller la voir à vrai dire. Non pas qu’il ait eu peur ou quoi, mais il ne savait pas si elle souhaitait avoir de la compagnie ou non. Il se doutait que oui après si longtemps enfermée dans un cachot, mais lui ; ils n’étaient si proches que ça, ils avaient travaillé dans le même service, ils avaient partagés de bons souvenirs à Poudlard, mais ils n’avaient jamais combattu côtes à côtes dans des batailles, pas directement. Pourtant il avait fait partie du peloton qui devait aller la sauver. Pourquoi ? Parce qu’elle était l’une des leurs et que cette mission visait à sauver non pas à capturer ou à tuer. Cependant, sans indications précises, il avait préféré la laisser tranquille, avec sa famille, avec ceux qui étaient vraiment proches d’elle. Il irait la voir sous peu, il se l’était promis, mais il demanderait des nouvelles à Bruce avant, histoire de voir.

En tout cas, à part quelques heures passées à nourrir et prendre soin des créatures de la boutique, Ethan n’avait pas fait grand-chose. La conscience professionnelle le rattrapant, il alla chercher le livre de commandes de ce mois-ci et les derniers inventaires, décidant de vérifier s’ils avaient besoin de passer une commande ou non. Ca avançait bien, pour l’instant, à part quelques sacs de croquettes pour chat (c’est fou comme les gens prévoient des quantités astronomiques de croquettes pour leurs chats…), ils n’avaient besoin de rien. Un bruit attira son attention et il releva la tête pour voir un Nubbins qui s’était coincé la patte dans le grillage de sa cage. Rah lala…Rien de grave, pas de bobo, juste une patte qu’il ne pouvait plus utiliser pendant une quelques secondes, le temps qu’Ethan ne vienne le sortir de là. Ce que l’écossais s’empressa de faire. Allant chercher un peu d’eau pour aider à faire passer la patte par le grillage, le brun parlait doucement, calmement à la pauvre créature. Quand enfin elle fut libérée, il ouvrit la cage et le prit dans ses bras, la caressant et le calmant, massant doucement la patte souffrante. La cloche d’entrée retentit et il fit chemin vers l’entrée, le Nubbins toujours dans ses bras.

"Bonjour et bienv…"

Il s’arrêta en pleine salutation quand il vit qui était entré dans la boutique. Eireann. Il y eut un moment de flottement avant qu’un immense sourire illumine le visage d’Ethan.

"Attends deux secondes je remets ce petit dans sa cage et j’arrive !"

Ethan alla alors remettre le Nubbins dans sa cage et revint voir Eire, hésitant sur l’attitude à avoir envers elle.

"Ca fait plaisir de te voir. Thomas n’est pas là en revanche."

Avec un rire amusé, l’écossais alla remettre le petit Nubbins dans sa cage avant de revenir vers Eire. Ce qu’elle avait pu lui manquer ! Elle avait l’air d’aller bien mieux, ce qui lui fit chaud au cœur. Il avait hésité plusieurs fois à aller la voir, juste pour être sûr qu’elle se remettait bien et lui apporter du chocolat chaud, seule chose, en plus de son éternel et indécrottable optimisme, qu’il était capable d’apporter et qu’il savait avoir des vertus bienfaitrices sur l’esprit et le cœur. Cependant, on lui avait conseillé d’attendre un peu. Après…Après le triathlon est passé par là et il avait lui-même envie de prendre un peu de temps pour lui. Ce et le boulot qui n’allait pas se faire tout seul. Mais elle réglait le problème d’aller la voir en venant à la boutique. Avec du café en plus ! Cette femme était géniale.

"Eire…T’es un ange. Viens, il y a deux sièges derrière le comptoir, ça sera plus confortable que debout en plein milieu de la boutique."

Prenant la tasse que l’irlandaise lui tendit, il la conduisit ensuite jusqu’au comptoir où il laissa la jeune femme s’asseoir en premier avant de prendre le deuxième sièges et de prendre une première gorgée de café. Parfait. Elle se rappelait encore de ses goûts en matière de café, décidément, Eire ne cesserait jamais de le surprendre.

Il ne retint pas le rire qui lui vint quand elle lui demanda la raison de son absence auprès d’elle ces derniers temps, y ajoutant une touche d’humour qui mit Ethan à l’aise. C’est vrai qu’il se serait senti un peu mal à devoir lui expliquer. Pourtant il n’y avait rien de mal à ses raisons ; ça ne l’empêchait pas de s’inquiéter à la façon dont Eire pourrait prendre ses paroles. Alors il secoua la tête en posant une main amicale et douce sur celle de son amie.

"Ca aurait pu être vrai à une époque mais tu sais parfaitement que ce n’est plus le cas. Comment pourrais-je avoir une préférée parmi mes deux poufsouffles préférées ? Sincèrement ?" encore un sourire amusé puis il lui donna la vrai raison "J’ai eu beaucoup de boulot ici, et puis avec le Triathlon et…Ses conséquences disons, je n’avais pas franchement envie de voir du monde. Ça n’a rien à voir avec toi, si ça peut te rassurer. J’ai même plusieurs fois pensé « tiens, il faudrait que j’amène un bon chocolat chaud à Eireann ». Après, on ne fait pas toujours ce que l’on veut. Certaines familles de sorciers viennent déjà acheter les animaux de compagnie de leurs chers bambins qui entrent à Poudlard l’année prochaine."

Ah Poudlard, là où il avait rencontré Eire, Jane, Ian…La plupart de ses amis actuels à vrai dire. Ça lui faisait bizarre d’y repenser aujourd’hui, alors que Poudlard fait plus penser à une véritable prison plutôt à qu’à une école. Dire qu’elle allait y travailler d’ici peu…

"En tout cas, ça fait plaisir de te voir. J’espère que tu te nourris correctement, sinon je vais me sentir obligé de venir chez toi te cuisiner de bons petits plats et jouer les amis-papa-poule-maman-gâteau."

Lui aussi pouvait rire s’il le voulait.

Ethan donna un petit coup de coude à Eireann pour son commentaire sur sa coupe à Poudlard. Ils n’avaient pas tous été des gravures de modes à l’époque c’est vrai, mais sa coupe n’était pas si terrible que ça enfin…Ou du moins il pensait…

"Tout de suite, c’est pas ma faute si j’ai les cheveux qui bouclent non plus ; plains-toi à mes gênes d’écossais."

Il préférait se raccrocher aux paroles simples et sans conséquences, qui apportaient rires et joie dans leur vie qu’au reste qui ne faisait que lui rappeler à quel point leur société était gangrénée. Qu’elles étaient loin les années insouciantes de Poudlard où il accompagnait Jane, Eire et Ian dans leurs parties de cap ou pas cap. Les années où on n’avait pas besoin de se demander si on verrait se lever le soleil le lendemain ou si un assassin du camp adverse viendrait vous tuer dans votre sommeil ; où les guerres semblaient loin. Même les élèves à l’heure actuelle étaient confrontés à leurs propres guerres. Si ce n’était pas triste ça…

Riant franchement, Ethan fit un geste de main presque dédaigneux que l’on aurait pu croire sérieux s’il n’arborait pas en même temps un énorme sourire amusé. Se faire accepter dans une cuisine était quelque chose qu’il n’avait jamais eu à faire, mais il comprenait très bien qu’une mère de famille refuse que l’on passe derrière les fourneaux à sa place, sa propre mère était un peu dans le même genre après tout.

"Un thermos de chocolat chaud et elle me laissera les fourneaux je suis sûr !"

Il poussa un soupir tranquille et but une gorgée de son café dans lequel il rajouta du sucre. On lui avait toujours dit qu’il mangeait beaucoup trop sucré, mais il n’avait jamais changé. Au ministère, si quelqu’un voulait une sucrerie, il suffisait de passer par son bureau et ils étaient sûrs de trouver des bonbons dans un des tiroirs de son bureau. Ian et Eire en avait largement profité d’ailleurs. Tout comme de ses chocolats chauds ou ses petits plats effectivement. Faire plaisir à ses amis était une seconde nature chez l’écossais, c’était un fait.

"Pourquoi tu ne viendrais pas chez moi sinon un de ces soirs ? Mes fourneaux tournent que pour une personne en ce moment ils dépriment un peu." Et hop ! des petits yeux de chiens battus rien que pour la convaincre alors qu’il savait que ce n’était pas nécessaire.

Si pendant quelques secondes un silence tranquille s’installa, Eire posa ensuite une question qui aurait poussé Ethan à s’étouffer sur son café s’il le buvait à cet instant précis. La question, le ton et le clin d’œil qui accompagnait le tout ne laissait aucune équivoque sur ce que l’irlandaise souhaitait savoir. A son grand regret ; pas qu’il ne veuille pas parler de sa vie affective avec elle. Cependant il se voyait mal lui annoncer qu’il était en couple avec un homme et qui plus est avec un homme d’une faction adverse. Non, il ne pouvait pas lui dire ça. Il avait deux choix : soit il inventait une histoire d’avec une fille fictive pour dire que finalement ils avaient rompus pour ne raison qu’il inventerait aussi. Soit il racontait la vérité, omettant simplement le facteur Misha. Il préféra opter pour la seconde solution. Omettre il savait faire. Mentir, beaucoup moins.

"Eh bien je vais te décevoir mais c’est bien ce que j’ai fait. Je peux t’assurer que monter une affaire ce n’est pas si simple et si Thomas est très doué avec la clientèle, ou presque, pour ce qui est de l’administration, c’est moi qui m’y colle. Alors entre ça et…Le reste, je dois t’avouer que j’ai quelque peu négligé ma vie sentimentale." Comme s’il réalisait ce qu’il venait de dire il ajouta, se tournant pleinement vers Eire "Mais ça va hein. T’inquiète pas je suis un grand garçon."

Un sourire et il reprit une gorgée de café. Lui, pas à l’aise pour parler vie sentimentale ? Naaaaaaan, si peu…

C’est ça qu’il aimait chez Eireann, sa façon de sentir quand ce n’était pas un sujet à aborder. C’est vrai qu’Ethan avait toujours été du genre discret avec sa vie privée, d’autant plus depuis qu’il était sorti de Poudlard. Il détestait les ragots qui pouvaient avoir à faire avec la vie privée, que ça concerne des personnes de son entourage ou non. D’ailleurs, il ne lisait jamais des magazines de l’acabit de Sorcière hebdo. Le plus souvent, il se contentait de lire la gazette pour se tenir au courant et puis point final ; Les bons endroits à aller voir ? Il connaissait suffisamment de gens qui aimaient se tenir au courant de ce genre de choses pour pouvoir découvrir ces endroits à ne pas manquer sans avoir besoin d’ouvrir un magazine. Eh oui, on ne dirait pas comme ça, mais l’Ecossais avait une petite couche de manipulateur sous son tempérament de bisounours hippie pacifiste. Il ne fallait pas se fier aux apparences.

Il rit, franchement, comme il ne l’avait pas fait depuis plusieurs semaines à présent, aux propos d’Eire. Elles apportaient aussi leurs lot de mélancolie à penser à son ancien travail, celui où il e plaisait tant et, surtout, étaient avec tous ses amis. Enfin, presque tous, mais une grande partie déjà. Et puis, alors qu’il allait donner sa réponse à l’irlandaise, la suite de sa phrase s’imprima enfin dans son cerveau. Et un grand, immense, énorme sourire de bisounours prit place sur son visage. Un bébé, un petit bébé, un espoir. C’est toujours comme ça qu’Ethan voyait les bébés ; des petits bouts d’espoir qu’il fallait protéger et chérir. Sans compter qu’il savait que Thomas l’attendait. Depuis l’annonce de la grossesse de Nora, Thomas était plus que souriant et certains habitués en était déstabilisés. Souriant, thomas l’était, mais pas à ce point. Il semblait respirer la joie de vivre. Ca faisait plaisir à voir.

"C’est clair. Thomas en parle déjà beaucoup, je sens qu’une fois né, la déco du lieu va se redécorer avec des dizaines et des dizaines de photos du petit. J’imagine la tête des clients ! Mais ça me fait plaisir pour eux. Vraiment. Ils le méritent, après tout ce qu’ils ont traversé…"

Ethan parlait en connaissance de cause ; il avait vu les deux, séparément, lors d’une crise de couple quelques mois plus tôt. Il avait vu un peu de ce qu’ils avaient traversés et avait connu, depuis, ses propres soucis de couples. Alors oui, il était content qu’ils aient mis tout ça derrière eux et qu’ils soient gratifié de la joie d’avoir un enfant.

"Et toi ? Quoi de neuf ?"

Un petit silence confortable s’installa entre eux alors que chacun s’imaginait la boutique et les réactions de leur ami commun face au bébé qui allait arriver. C’était certain, le Macnair allait devenir un vrai moulin à informations sur le bébé ; comme quoi il était le plus beau bébé de Grande-Bretagne, comme quoi il allait devenir un grand bonhomme, qu’il avait tel ou tel trait de l’un ou l’autre de ses parents. Rien que de penser à ça, cela lui tira un sourire attendri, poussant au loin les pensées sombres qui avaient un peu trop tendances à s’incruster dans son cerveau ces derniers temps. Normal en même temps vu le contexte actuel. Mais ça n’était pas…Ca n’était pas lui. Ou peut-être que si ? Lui qui avait toujours été si prompte à répondre à la morosité et à la dépression par un sourire et une bonne humeur qui semblait inattaquable. Pourtant Thomas avait eu droit à une démonstration live d’une perte flagrante de bonne humeur. Pendant un temps, il avait même cru perdre espoir.

Mais ça, il ne le dirait pas à Eireann, elle n’avait pas besoin de ça. Alors l’écossais se contenta de l’écouter, se réjouissant d’avance de la croiser plus souvent. Elle lui avait manqué ; grandement. D’ailleurs il passa son bras libre autour des épaules de son amie quand elle annonça être plus dans les pâtes des deux compères qu’avant.

"Tant mieux. Ça fera du bien une présence féminine dans cet endroit. Et tu me tiendras compagnie quand Thomas ne sera pas là."

Un clin d’œil complice rendu et Ethan retourna au silence d’avant, sirotant la boisson offerte par son amie. Amie qui lui donnait à présent son regard et son sourire les plus innocents. Ce qui ne présageait rien de bon. Qui présageait surtout qu’elle avait quelque chose à lui demander. Allons bon, elle devait savoir qu’en général, il ne pouvait pas lui refuser quelque chose. Surtout pas quand elle faisait cette bouille de Nubbin en manque d’affection. Et la question tomba. Ethan fut pensif pendant un moment puis répondit.

"Je pense que ça pourra se faire sans trop de soucis. Je ne peux pas toujours accompagner Thomas et je pense que ça rassurerait Nora qu’il y ait quelqu’un d’autres d’expérimenté dans le domaine qui l’accompagne. Tu seras donc plus souvent avec Thomas qu’avec moi…Je vais finir par être jaloux !"

Finit-il avec un grand sourire qui bientôt explosa en un éclat de rire franc et amusé. Rire qui fut coupé par un Nubbin échappé de sa cage qui lui sauta sur les genoux, allant renifler Eireann se trouvant juste à côté de lui. Ah ! Mais…Mais…Comment il avait fait pour s’échapper ? L’inquiétude était présente mais très faible face à la façon dont le Nubbin s’intéressait à son amie. Cela le fit sourire encore plus et il remonta les yeux vers Eire alors qu’il caressait la fourrure douce du petit animal.

"Je crois qu’il t’aime bien."

Ethan éclata de rire. La perspective d’avoir Eireann passer du temps ici pour lui tenir compagnie lui réchauffait le cœur comme jamais. Elle lui avait manqué c’était certain, déjà lorsqu’ils ont pris des chemins différents lorsque le ministère les a congédié sans plus de ménagement que ça. Ils ne se sont que très peu recroisés depuis cet évènements. Puis il y a eu la période d’emprisonnement d’Eire tout ça…Cependant, Ethan refusait de laisser ce genre de chose troubler leur amitié. Alors parler de Thomas et de son attitude à gagatiser devant son enfant même pas encore né était un excellent moyen de changer de sujet.

"Oh crois-moi, même avant ça il trouvait des prétexte pour s’échapper. Mais je ne peux pas lui en vouloir, il a plus largement contribué au montage du magasin que moi techniquement parlant et il est techniquement mon patron quand même. Même si on sait tous les deux qu’il ne me virera pas."

Après tout, si Ethan ne l’avait pas tiré de son trou avec son projet, qui sait ce qu’ils feraient à l’heure actuelle ? Probablement encore au chômage. Cette perspective avait tout de suite rebuté l’écossais. Il détestait l’idée de ne rien faire de ses journée quand il pourrait faire tant pour aider les autres. Bien évidemment, un jour de temps en temps c’était toujours agréable de ne rien faire et de rester blotti dans les bras d’une personne à qui l’on tient…Ethan, vire de cette voie et revient à la réalité un peu. Ce n’est absolument pas le moment de penser à ce genre de choses, pas alors qu’Eire était juste à côté, elle qui lui avait demandé quelques minutes plus tôt si il y avait quelqu’un dans sa vie. Il devait vraiment faire quelque chose à ce propos ; des cours pour gérer son cerveau ou il ne savait trop quoi mais il fallait que Misha arrêter de s’incruster dans ses pensées à des moments très, très, incongrus.

Pour se faire, il se concentra sur ce qui lui raconta Eire. Un boursouflet hein ? C’est vrai qu’en théorie on ne pouvait plus en trouver comme ça, loin de là. En théorie il était impossible d’en trouver dans le commerce à moins de savoir comment les Weasley en avaient créés en premier lieu mais…Tout avait été détruit en même temps que leur boutique s’il ne se trompait. Un léger rire échappa à Ethan quand elle parla de déformation professionnelle.

"Ce n’est pas comme si on avait vraiment pu faire le deuil de notre ancien métier. Pour Thomas et moi ça va, mais parce qu’on a pu rester proche des bêtes dès le départ, ça ne nous change pas trop. En revanche pour toi je peux tout à fait comprendre…" il poussa un soupire et finit son café, posant la tasse sur le comptoir tout en observant Eire avec le Nubbin "Si tu savais…Si on avait besoin, je pense qu’on t’engagerait sur le champ. Tu me manque Eire, nos jeux au ministères, nos heures à courir après les bestioles…Le fait qu’on soit considérés comme les hippies du ministère." Il rit franchement à ce souvenir "Passes autant que tu veux, tu sais que tu as un droit de visite illimité chez nous."

Une main rassurante et confiante sur celles de son amie. Avoir l’occasion de faire son deuil pour un travail auquel on avait autant donné qu’Eire, ça ne pouvait qu’être bénéfique, surtout après les épreuves difficiles et traumatisante qu’elle a pu vivre. On pouvait dire ce que l’on voulait sur lui, mais Ethan savait observer et voir des choses. Comme par exemple le fait qu’Eire était très souvent là avant eux dans le service ou bien qu’elle était encore à son bureau ou avec les bêtes quand ils partaient le soir. Entre autre. Il aurait pu se renseigner à cette époque, demander pourquoi elle travaillait aussi dur alors qu’ils étaient un peu le service mal vu par le ministère et qu’ils n’auraient pas de prime au nombre d’heure. Il aurait pu. Sauf que l’écossais était plutôt du genre à attendre que les gens lui tendent la main plutôt que de spécialement chercher les informations, sauf cas très particuliers. Donc même s’il avait pu ressentir l’envie de lui poser une ou deux questions pour l’aider, peut-être à aller mieux à cette époque, il avait préféré la laisser venir vers lui, ou Thomas, ou Ian…Bref, il avait laissé venir, sans de réel résultats, mais peu importe.

Pas comme Eire (qui avait toujours été connue pour sa franchise et son habitude de mettre les pieds dans le plat) qui venait de lui dire clairement qu’il était plus que temps de parler. Sérieusement. Pour sa défense, Ethan ne se tendit pas, ne fut pas mal à l’aise et ne donna aucun signe de nervosité. Cela pour la simple et bonne raison qu’il n’y avait là rien à le rendre nerveux. Il savait très bien qu’il ne lui parlerait pas de Misha, qu’elle semblait avoir compris qu’il ne parlerait pas de sa vie sentimentale. Ca ne voulait cependant pas dire qu’il était à l’aise avec la direction que prenait cette conversation. Elle le mettait dans une situation délicate à dire vrai. S’ils ne parlaient pas vie personnelle, ils allaient très probablement parler politique. Or, parler politique allait le mener à parler des méthodes de l’Ordre et…Ca risquait de lui faire dire des choses qui n’allaient pas plaire à Eireann. Ca arrivait me direz-vous. Certes, même dans le même camp politique deux personnes pouvaient avoir des avis légèrement divergeant sur certains points ; sauf qu’Ethan ne remettait pas en cause les notions ou les valeurs de l’Ordre, mais leurs méthodes. Et puis même ; il s’était déjà pris la tête avec Thomas et l’écossais mentirait s’il disait qu’il ne restait pas des séquelles, minimes, de cette discussion houleuse. Il ne voulait pas que ce genre de chose n’arrive aussi avec Eire. Pas elle, pas maintenant. Ce n’était vraiment pas ce dont elle avait besoin en ce moment.

Mais comment le lui dire sans vouloir passer pour un rustre. Car Ethan voyait bien ce qu’elle voulait faire : l’aider comme lui avait l’habitude de le faire, en écoutant, laissant les gens parler et vider leur sac pour ensuite tenter de les aider du mieux qu’il le pouvait. Il connaissait si bien cette méthode qu’il était capable de l’éviter. Il ne pouvait en être autrement, il le savait parfaitement, il ne voulait pas non plus qu’elle parte trop vite, elle lui avait vraiment manqué. Ethan voulait encore profité de la présence de son amie, qu’il avait trop peu vue depuis qu’ils avaient quitté le ministère.

"Je peux te refaire un café ou te faire un chocolat si tu veux, mais je ne pense pas que parler de ce qui me tracassent soit une si bonne idée ; je parle d’expérience là. Je suis là si tu veux me parler en revanche. Tu le sais, n’est-ce pas ?"

Il attendit à peine la réponse ; le voilà déjà partit vers le fond de la boutique, s’y éclipsant cinq minutes à peine avant de revenir avec ses fameux chocolats chauds, ceux qui ont fait sa réputation au ministère. Il ne voulait pas parler de lui ou de ce qui n’allait pas chez lui, mais il voulait garder Eire avec lui encore un peu.

"Si tu ne veux pas parler, ce n’est pas grave ; nous ne sommes pas obligés d’avoir de grandes discussions autour d’un chocolat. Je n’ai simplement pas encore eu mon quota d’Eire pour le moment"

Finit-il avec un grand sourire chaleureux, répondant à celui que l’Irlandaise lui avait adressé quelques minutes plus tôt. Ethan se doutait qu’elle ne le laisserait pas s’échapper aussi facilement et il s’attendait aux arguments en tout genre pour le pousser à parler. Peut-être qu’elle y arriverait, mais il n’allait certainement pas lui mâcher le travail.

"Hey, je ne me suis pas fait une réputation au ministère grâce à mes chocolats pour rien."

Ethan offrit un clin d’œil à son amie et bu lui aussi un peu de chocolat. Ils avaient passé le moment speech sérieux et ayant besoin qu’il se confie. Franchement, ce n’est pas qu’il veuille absolument tout garder pour lui ; il ne veut juste pas embêter les gens avec ça. Enfin, d’habitude, là, c’était surtout qu’il ne voulait pas créer de fossé avec l’irlandaise à ses côtés. Il avait bien vu ce que ça avait fait de parler de ce qu’il pensait avec Thomas. Eire avait un caractère peut-être plus conciliant (et encore) mais tout aussi trempé. L’écossais doutait que ça se finisse bien cette conversation. Voilà la raison pour laquelle il gardait ses sentiments pour lui cette fois-ci.

Seulement, elle, semblait encline à continuer cette conversation. Ce qu’elle dit poussa Ethan à lui donner un regard qu’il donnait peu : un regard en proie aux doutes, à l’hésitation, tiraillé avec l’envie de ne pas trop cacher à cette amie qui lui était si chère. Sauf qu’elle a pointé une chose qui a toujours poussé Ethan à lever les yeux au ciel. Ce qu’il fit présentement. Un déséquilibre. Comment ça un déséquilibre ? Rien à voir. Certaines personnes avaient simplement moins besoin de se confier que d’autres. Lui était le parfait exemple : ce qui le tracassait ? Peu, si peu. Comparé à ce que d’autres ont vécus. Thomas, Nora, Eire…Rien qu’eux, ils avaient cent mille fois plus de raison d’aller se confier à quelqu’un que lui. Lui, ce qu’il avait à raconter ? Des états d’âmes de pacifiste bonne poire, voilà ce qu’il avait. Ca ne méritait pas tout un foin.

C’est étrange, mais lui qui était pourtant quelqu’un prônant l’égalité et le partage n’était pas du genre à respecter ces valeurs lorsqu’il s’agissait de partager ses états d’âmes. Question de pudeur peut-être ; en tout cas, le voilà braqué. Pas trop, pas comme si on l’avait agressé, mais…Il y eut une légère crispation dans ses épaules et il détourna les yeux.

"Ne t’inquiètes pas Eire, ce n’est pas parce que je me confie peut que je garde tout pour moi. J’ai simplement moins de choses à garder." Mais il savait qu’elle n’y croirait pas plus que cela. "Et que je n’ai pas spécialement envie non plus qu’on que cette conversation finisse mal. J’ai déjà testé avec Thomas, ça ira."

Quant à sa dernière phrase, il rit. Oui, c'est vrai qu'elle avait un bon franc parlé.

"Promis, je te poserais la question directement le cas échéant"

Sa tendance à se laisser emporter par ses convictions ? C’était un euphémisme. Ethan retint d’ailleurs le léger rire amer qui menaçait de lui échapper ; quand on parlait de l’Ordre avec Thomas, il ne fallait pas être d’un avis différent du sien sans un argumentaire en béton armé et renforcé au Protego, autant ne pas commencer à moins de vouloir se donner mal au crâne. Ça n’empêchait pas Ethan d’adorer son ami et patron. Il était quelqu’un que l’écossais admirait, pour sa force d’esprit et son entièreté. Cependant il avait parfois des attitudes qui, parfois, hérissaient le poil. Celui d’Ethan en tout cas. Il savait qu’Eire était aussi quelqu’un d’entier et de franc (la preuve avec ses questions précédentes sur sa vie personnelle…) cependant, ce qu’elle disait le rassurait un peu sur la réaction qu’elle pourrait avoir…Ca n’effaçait pas totalement l’appréhension qu’il ressentait à partager ses craintes pour l’Ordre et ses états d’âmes personnels quant à la guerre en cours, mais il se disait que ça ne serait pas si mal de peut-être, avoir quelqu’un de son point de vue ou proche de son point de vue du moins. Elle lui tira un nouveau rire, plus joyeux cette fois, à la notion d’un revirement de foi, qui s’alliait avec un visage qui disait « nan mais c’est quoi ce postulat, là ? ».

De toute façon, il n’avait pas trop le choix. Enfin, il avait trois choix : Premièrement, le plus radical et simple s’il ne voulait pas parler de cela, il la mettait dehors sous un prétexte quelconque, mais ça l’empêcherait de passer du temps avec elle et ne ferait de repousser l’inévitable. Deuxièmement, il changeait de sujet de manière claire et précise, pour un sujet qui durerait un moment, mais encore fallait-il trouver ce sujet ce qui était loin d’être une mince à faire. Troisième choix : il parlait. Pas trop, mais au moins assez pour satisfaire la satisfaction de son amie. Après tout, il pouvait toujours lui lâcher ce qui passait le mieux, pour tâter le terrain, pour aller vers ce qui était plus profond si le moment et ses réactions étaient propices. Autrement, il s’arrêterait à ça et se ferait simplement traiter d’idéaliste utopiste. Poussant un soupir et passant une main dans ses cheveux, il lança un regard à Eire et prit la parole.

"Disons que…Je ne suis pas très d’accord avec les dernières méthodes de l’Ordre. Voilà. Je veux dire, l’attaque du manoir Kark, c’était quoi au juste ? Un moyen de dire « hey on est là et on va pas vous laisser faire » ? Pour moi c’était exactement ce dont on nous accuse : du terrorisme. Je ne dis pas qu’il ne fallait rien faire pour faire passer le message à Kark, mais…Pas de cette façon. Pas à cet endroit."

Cette histoire avait été probablement la plus traumatisante pour Ethan, avec le Triathlon mais ce n’était du fait des Phénix donc ça ne comptait pas dans cette discussion. Comme si la chose n’avait pas été assez horrible en soit pour l’écossais, c’était lui, d’entre tous, à qui on avait confié la fiole qui devait faire exploser leur zone. Ô ironie quand tu nous tiens ! Thomas avait très vite vu que ça n’avait pas été facile pour lui. Comme si ça n’avait pas suffi, il avait fallu qu’il croise Misha, réalisant pleinement son allégeance. Ce point était réglé maintenant, mais sur le moment…Ça lui avait fait l’impression d’une baffe.

Il ne dit que ça, c’était déjà bien, il attendrait les questions qu’il savait à venir avant de continuer, près à choisir au mieux ses mots pour dire ce qu’il voulait dire.

Comme une baffe en plein visage, Ethan serendit soudain compte de ce qu'il venait de mettre sur le tapis. Des faits, certes, mais aussi des souvenirs probablement très douloureux pour Eire, qui revenait de quelque chose qu epersonne ne voudrait expérimenter. Quel abruti il pouvait faire parfois, franchement...Mais il ne dis rien. Elle le lui avait dit, non? Elle n'était pas en sucre, elle pouvait supporter certaines questions. Si vraiment il voyait, à un moment, que ça la mettait trop mal à l'aise, il changerait de sujet, purement et simplement. Il n'allait pas tourner (trop) autour du pot quand il voudrait savoir quelque chose, mais il n'allait pas faire comme si de rien n'était non plus; ca n'était pas lui de simplement vaquer à ses occupations sans se préoccuper de ses amis ou encore de mettre les pieds dans le plat sans une once de considération pour autrui. Il venait de le faire, c'est vrai, mais pas intentionnellement, là était la grosse différence. Jamais il ne blesserait quelqu'un intentionnellement sans une excellente raison. Il l'avait déjàfait avec Misha et ça l'avait rongé pendant les semaines à ne plus se parler. Alors non, plus de cruauté comme celle-ci, surtout pas envers quelqu'un qui comptait pour lui comme Eire.

Ca n'empêcha cependant pas la jeune femme de parler, lui donnant son avis d'une manière plus...Diplomate que ce qu'avait bien pu faire Thomas. Il ne pouvait pas en vouloir à son ami; il avait son caractère, lui avait le sien. c'est ainsi et on ne change pas les gens pour qu'ils s'adaptent à tous nos désirs, c'est aussi ce qui fait le charme des rencontres, les différences entre les personnes. Même si, il n'allait pas mentir, il aurait préféré que ça se passe plus calmement avec Thomas. Enfin, ce qui est fait est fait, il n'allait pas se torturer le cerveau pour cela. Puis elle apporta un élément auquel il n'avait pas penser. Et si ça avait été lui à la place de Wallas? Elle n'avait pas tort; personne n'avait la solution qui réglerait tous leurs problème d'un coup. Après, ce n'est pas tantWallas qu'il avait blâmé principalement. Oh! Bien sûr que son cerveau s'en était donné à coeur joie pour donner des avis désobligeantà propos de son leader, mais ça n'était qu'une passade, la contrariété d'avoir attaqué des gens peut-être innocents, d'avoir échoué quelque part, qui l'avait poussé à chercher un coupable et le seul qui lui était venu à l'esprit avait été Wallas, parce qu'il avait été le cerveau de cette entreprise. C'est toujours les patrons qui s'en prennent pleins la tête...

"C'est vrai, ni toi ni moi n'avions la réponse à tous les problèmes. Mais ce n'est pas tant l'action ou les directives de Wallas qui m'ont dérangé; ce sont les méthodes. Ca...Et le fait qu'on ait attaqué une maison civile." il posa lui aussi sa tasse et se tourna plus pleinement vers Eire "Oui, j'admets c'était la maison de Kark et que, dans le fond, il l'avait bien mérité. Mais c'était chez lui, le seul endroit qu'il pensait pouvoir considérer comme sûr et qui ne soit pas aussi relié à la politique que le QG des Ombres l'est. Je ne prétend pas le comprendre, loin de là." un léger rire, plus nerveux qu'autre chose "On a beau vivre dans la peur de voir débarquer la brigade chez nous n'importe quand, pourtant on sait que c'est chez nous, on a beau vivre dans un climat de guerre on se sent toujours en sécurité chez soi..."

Bon, il allait s'arrêter là pour le mélodrame, non? Surtout, il allait arrêter de faire remonter de mauvais souvenirs à la surface, aussi bien pour lui que pour Eire. Cette attaque avait vraiment pesé sur tout le monde et il préférait ne pas s'y attarder trop longtemps. Avoir une mine déconfite quand on veut vendre ce n'est pas le top. Lui, il était là pour vendre des animaux de compagnie, permettant aux gens qui les achetaient de se sentir un peu moins oppressés par la mauvaise humeur ambiante. Cela était pourtant un euphémisme. Ethan se leva et récupérant les tasses, disparaissant quelques minutes pour revenir avec deux nouveaux mugs de chocolat chaud, avec marshmallows dessus cette fois. Ce n'était pas grand chose, mais c'était toujours mieux que rien.