Le soir du réveillon, je finissais de me préparer dans ma chambre. Je tentais de me faire boucler les cheveux mais ceux-ci semblaient indésirables face à l’aspect « fashion » que je voulais leur donner - pour changer - pour notre premier Noël à Pré-au-lard. Je voulais juste être jolie pour changer un petit peu. Depuis le retour de Londres, j’avais fait attention à ne pas être trop vue ou de façon discrète, fondue dans la couleur des murs, pourquoi pas ! Et quand j’ai entendu quelque chose cogner contre ma fenêtre, j’ai sursauté en tournant la tête, ma brosse dans une main. J’ai froncé les sourcils avant de voir quelque chose bouger. Je me suis approchée et j’ai ouvert la fenêtre pour laisser un hibou entrer. Il a volé jusqu’à mon chevalet avant de laisser tomber une petite lettre par terre.

J’ai entendu mon nom dans le couloir mais je n’ai pas répondu. Qui pouvait m’envoyer un courrier ce soir-là, à cette heure-ci ? J’ai déplié l’enveloppe et je me suis redressée en regardant ma porte, haussant le ton pour dire à Maman que j’arrivais dans 5 minutes. J’ai reporté mes yeux sur la lettre en regardant directement la signature. J’aurais pu trembler en voyant le nom de Kark mais finalement, je m’y étais attendue. Une punition ou quelque chose, je m’attendais à recevoir une lettre mais j’ignorais quel pourrait être son contenu. J’avais repris de l’assurance depuis ma confession à Graham. Mais en lisant, j’ai dégluti. On me demandait encore de tuer quelqu’un. Je n’étais pas une guerrière, je ne devais plus repartir en mission pour l’Ombre, tout le monde avait eu la preuve que je n’étais pas un bon élément sur le terrain, que j’étais mieux ici, loin. Je n’avais néanmoins toujours pas repris mes cours de yoga. C’était ce que Arutha appellerait facilement « ne pas être d’humeur à donner un cours de Yoga ». Et il n’aurait pas tort.

Mes mains ont toutefois légèrement tremblé en lisant la lettre d’Elena Kark et découvrant le visa ainsi que les instructions de l’ordre de mission. Et quand mon frère est entré dans ma chambre en m’appelant, j’ai caché l’ordre dans mon dos en déglutissant. Dans un sourire, je lui assuré que j’arrivais tout de suite. Et quand il m’a demandé si ça allait, j’ai acquiescé vivement. Quand il a eut refermé la porte derrière lui, j’ai rangé la lettre dans un faux fond de tiroir de ma table de nuit et j’ai fait ressortir le hibou à la va-vite avant d’enfiler de vérifier mon reflet dans le miroir et de descendre rejoindre la famille au pas de course.

Sortir de Pré-au-Lard n’a pas été sans suspicion. J’avais ce qu’il fallait. Néanmoins, c’était la marchandise qui m’avait demandée plus d’imagination. Commencer, d’abord, par faire sortir Lizbeth de la clinique sans être repérée. Autant vous dire que ça n’a pas été chose aisée. La convaincre de me suivre n’a, cependant, pas été difficile. Son discours était tel, une sorte de « Tic tac, l’heure a sonné » que lui promettre qu’un magnifique coucher de soleil est bien mieux comme dernière vision qu’une clinique qui pue n’a eu qu’un effet réussi.

Mais c’est à la sortie que les choses ont demandé plus de rigueur. Si je pouvais passer sans encombre, c’est ma marchandise de tapis qui a attiré l’oeil. J’avais emprunté la voiture de Papa, prétextant qu’un fournisseur de tapis de Londres avait inversé deux commandes. Annonçant un retard déjà conséquent, j’ai informé que j’irais plus vite à m’en charger moi-même. J’aurais pu partir en journée mais le voyage serait long donc je préférais partir de nuit pour arriver à le lendemain. Ainsi, je pouvais livrer le bon tapis à ma cliente avant le 27 comme convenu ! Que voulez-vous : le travail ne s’arrête pas quand il s’agit de Noël ! Il était cruel d’avoir songé vouloir me débarrasser de cette mission au plus vite. Quand bien même Graham avait réussi à me « sauver » auprès de ses parents et de sa famille, j’avais encore des preuves à fournir au reste de ma faction et j’avais hâte d’en terminer. La plaisanterie avait assez duré. Donc j’avais préféré agir vite, un peu de la même façon que j’avais réagi lorsque Caïus avait décidé de m’envoyer en première ligne. Finalement, je ne répliquais pas, j’agissais : finissons-en et passons à autre chose. Dans ma tête, je ne penserai à l’issue de Lizbeth qu’en temps voulu. pour l’instant, il fallait simplement que je sorte de là. Et sortir de Pré-au-Lard était une motivation bien suffisante et engageante pour m’aider à oublier tout le reste !

Pour justifier de ma marchandise, j’ai simplement ouvert la caisse pour que le brigadier puisse juger du tapis encore sous plastique de protection. Lizbeth était cachée sous le tapis, je l’avais endormie avec une potion de la clinique assez efficace.

J’avais conduit toute la nuit. J’avais réfléchis à cette mission, à ce qu’elle signifiait, engageait, ce qu’elle traduisait. De moi, de la faction, des Kark… J’avais la chance de me racheter. A ça aussi, j’avais bien réfléchis. Je m’étais même demandé, dans un instant de doute, si mon comportement n’était pas synonyme de trahison et que je cherchais à rejoindre les Phénix. Soudain, j’avais réalisé qu’éventuellement, les Héritiers étaient assez proches de ma façon de penser. Mais pas les Phénix. Non, jamais je ne serai membre de l’Ordre du Phénix. Ils n’avaient rien compris et ne comprendraient rien. A tel point que, quand bien même ils cherchaient à protéger les Moldus, ces derniers leur tombaient dessus de la même façon, ils n’étaient même pas capable de voir que des sorciers tentaient de les aider. Des crétins. Des moins que rien. Non, jamais je ne serai une Phénix !

J’ai enfin atterri alors que le soleil menaçait de poindre. Lizbeth s’était réveillée depuis un moment et s’était mise à piailler toute seule. J’avais bien tenté de comprendre ce qu’elle disait mais en gros, ça donnait ça : « Tic tac, l’heure a sonné ». Elle me faisait de la peine. Je lui ai ouvert la portière pour qu’elle sorte et je lui ai montré la falaise, non loin de sa maison de vacances. La reconnaître a déclenché chez elle une sorte de nostalgie. « C’est la fin… » elle me faisait tellement de la peine. J’ai regardé autour de moi, sortant ma baguette de ma poche de jean et j’ai observé Lizbeth errer comme une âme en peine. Le soleil se lèverait d’ici quelques minutes et je ne mentais pas en disant que je voulais qu’elle voit au moins ça. Mais je priais. Je priais qu’un Phénix débarque et fasse le sale boulot pour moi. Je ne pouvais pas me résoudre à la pousser ou à l’inciter à se laisser tomber. Quoi que soit sa réputation, elle était de ma faction et je n’étais pas une meurtrière ! Je ne pouvais pas ! Je n’avais pourtant pas le choix alors j’ai à nouveau scruté le ciel, espérant très vite qu’un Phénix viendrait. Mais cette fois, je saurai l’accueillir. Cette fois, je ne plierai pas !

– Tic tac, l’heure a sonné…

J’ai regardé Lizbeth s’avancer vers la falaise pour toucher le soleil dont la lueur éclairait petit à petit son visage endolori. Bizarrement, je n’avais posé aucune question, je n’avais rien voulu savoir. Alors quand Lizbeth s’est tournée vers moi comme si j’avais réponse à ses prières, j’ai serré les dents. Si je voulais réussir, je ne devais pas réfléchir.

– L'heure a sonné..., ai-je murmuré pour moi-même.

Un peu morose, la jeune fille contemplait son manuel de potions. Elle n’avait pas la moindre envie de travailler mais il le fallait. Les conditions étaient idéales : Mary-Ann avait vidé les lieux pour aller passer les vacances en famille, il n’y avait donc pas le moindre bruit indésirable pour la distraire. Les quelques jours de break qui lui restaient devaient donc être employés à travailler, comme elle l’avait signifié à Aoden. Elle ne savait toujours pas ce qu’elle faisait pour le réveillon de la nouvelle année, probablement se porter volontaire pour travailler à Sainte-Mangouste si aucun plan ne se présentait à elle. Perspective réjouissant s’il en était mais au moins, elle ne le passerait pas à broyer du noir. On ne pouvait pas dire que les choses étaient en train de s’améliorer pour Kaprice. Bien sûr, depuis les événements du festival, compte tenu de ses nouvelles blessures récoltées, on la laissait souffler un peu. Ce qui ne voulait pas dire que tout se résolvait comme par magie. Quelle ironie. Avec un nouveau soupir, elle se décida enfin à chercher la page à laquelle elle s’était arrêtée la fois précédente. Potion régénératrice. Ce n‘était tout de même pas sorcier. Et quand bien même, cela aurait été dans ses cordes. Elle avait commencé à prendre des notes sur la meilleure façon de préparer les ingrédients quand des coups frappés à la fenêtre l’interrompirent.

Relevant les yeux, elle fronça les sourcils en voyant un hibou inconnu. Qui pouvait bien lui écrire un jour pareil ? Ao’ serait passé, Noah, Zak également … Jake ? Cela l’aurait étonné. Son « petit ami » n’était pas du genre à se manifester et lui filait la plupart du temps entre les doigts. Au moins, on ne pouvait pas dire qu’il empiétait sur son indépendance. Et ce n’était pas le hibou parental, qui l‘avait harcelée quotidiennement six jours avant les fêtes. Reposant l’ouvrage, elle alla rapidement ouvrir, frissonnant quand la vague de froid accompagnant le volatile lui effleura les jambes. A peine eut-elle détaché la missive qu’il repartit. Refermant derrière lui, elle se crispa en reconnaissant l’écriture. Une mission, en cette période ? Et alors qu’elle s’était promis de ne plus en accepter une seule ? C’était une plaisanterie ! Prenant sur elle pour ne pas hurler (les voisins ne s’en formaliseraient pas, ils avaient l’habitude avec l’autre nymphomane), elle déplia la missive … et dut s’asseoir. Lizbeth Nott. C’était une gifle monumentale qu’elle venait de prendre. On lui avait déjà mis un arbre généalogique de la famille sous le nez, pour la faire réagir. Lizbeth. Sœur d’Anita. Ses demi-sœurs. Ses mains se mirent à trembler et elle lâcha le papier, tâchant de se calmer.

Qu’était-ce ? Encore un test ? Voulait-on la mettre face à sa « famille » pour voir jusqu’où elle était prête à aller ? Et … voulait-elle vraiment se retrouver face à elle ? Lui parler ? Bien sûr, elle ne lui dirait pas qui elle était, elle ne le devinerait pas. Juste un Phénix comme un autre. Oui, elle avait pris sa décision. Elle irait. Il lui fallait la voir, lui parler. Elle en avait besoin, même s’il n’y avait rien de rationnel dans la démarche. Abandonnant le parchemin sur le lit, elle enfila rapidement des vêtements chauds, attrapa sa baguette, un sac, et partir sans oublier de verrouiller la porte. Des informations sur une série de viols, hein ? Il n’y avait pas à dire, sa famille était véritablement un modèle de pureté et de droiture.

Le Portoloin l’avait déposée aux abords de la maison des Nott. Une boule s’était formée dans la gorge de la jeune fille en la voyant. Jolie résidence secondaire, il n’y avait pas à dire. Certains avaient les moyens. Non pas qu’elle ait un jour manqué de quoi que ce soit (à part de la vérité de la part de ses parents), mais les « si » commençaient à se former dans un coin de son esprit. Et si elle avait été élevée là ? Fermant les yeux, elle se força à respirer. Il ne fallait pas qu’elle se laisse embrouiller, il fallait juste qu’elle … Des bruits se firent entendre. Retenant sa respiration, elle se dissimula dans l’ombre de la bâtisse, pour voir …

Ses traits se jetèrent à la tête de Kaprice qui manqua d’en perdre l’équilibre. La jeune femme était plus pâle, presque cadavérique, mais elle n’avait pu oublier ce visage. Et cette mèche rose, bien que terne, à l’image de sa personne. Sa main trembla, alors que ses doigts se resserraient autour du manche de sa baguette. Pas question de la lâcher. Pas maintenant. C’était ELLE. L’éclair vert qui lui était destiné. La Mangemort qui accompagnait Lizbeth. Réfléchir, alors que ses tripes lui hurlaient de sauter et de lui régler son compte en deux temps trois mouvements était une torture. Elle avait de l’acide en fusion dans les veines. La haine qu’elle ressentait à ce moment précis n’avait pas de précédent. Mission. Mission. Lizbeth. Ses yeux balayèrent la pelouse et se posèrent sur … la Mangemort du skatepark. Inspirer, expirer. Cinnamon, lui avait précisé Aoden après leur retour, une ancienne connaissance. Donc, pas Lizbeth. Donc … La Phénix contempla la frêle silhouette. Lizbeth. Nott. Sa demi-sœur. Et accessoirement, meurtrière d’Heath Lindermann. Qu’on. L’achève.

Tic tac, l’heure a sonné… Les mots, portés par la brise, arrivèrent jusqu’à Kaprice. L’heure a sonné. Oui. Non. La mission. Les viols. Heath. Se débarrasser de l’autre, déjà. Elle n’avait pas attaqué Aoden, elle les avait même aidés. Si elle se contentait de la mettre hors-course juste le temps de comprendre, de décider quoi faire ? Son regard ne parvenait pas à se détacher de la blonde apparition, comme si elle avait vu un fantôme, ce qui n’était pas loin d’être le cas. Tic tac, l’heure a sonné… Sursautant, elle se rendit compte que la Mangemort avait les yeux fixés sur elle. Des yeux vides. Confus. Loin de l’étincelle de folie qui les animait quand elle avait voulu la tuer. Sortant de l’ombre, Kaprice pointa sa baguette sur Cinnamon. Lizbeth était plus proche mais semblait avoir du mal à marcher. Essayant de rassembler ses idées, elle finit par articuler : Recule. Je ne veux pas te faire de mal. Tic tac, tic tac… La ferme, lança la Teagan d’une voix blanche. Qu’elle se taise, qu’elle réfléchisse. Tic tac, tic tac… Coup d’œil de côté. Qu’est-ce que vous lui avez fait ? Sortilège de confusion ? Avait-on vendu sa venue ? S’il fallait la pendre par les pieds pour qu’elle parle, cela pouvait s’arranger. Et la torturer, également. Oscillant entre haine à l’état pur et choc, elle essayait de rassembler ses esprits. D’abord, s’assurer que l’autre ne poserait pas de problème. Ensuite, décider quoi faire et dans quel ordre avec le zombie.

L’heure a sonné:

La tête commençait à lui tourner, combiné à une nausée affreuse. Elle avait l’impression qu’on lui avait tendu un piège, même si, bien évidemment, ça ne pouvait pas être le cas. Qui aurait pu savoir que sa demi-sœur était également celle contre laquelle elle ourdissait les plans les plus machiavéliques et les plus sombres depuis environ un an ? Son cerveau ne fonctionnait pas comme il le devrait. Il y avait la lettre de William Wallas qui passait devant ses yeux, sa main qui tremblait en tenant sa baguette, pointée vers la jolie rousse du skatepark. Et il y avait l’autre, complètement perdue qui ne cessait de produire des tic tac dans tous les sens. Réfléchir convenablement n’était donc pas une mince affaire, même en considérant froidement ses données et sa mission, qui convergeaient vers elle, qui ne semblait pas être dans son état normal. Rien du tout. Et bien sûr, les Mangemorts n’y étaient pour rien. Évidemment. Ou alors elle avait vraiment perdu la tête. Dans ce cas il serait aisé de répondre à son commandement qu’elle était totalement folle et avait été manipulée pour dire ce que l’autre camp voulait, ce qui serait suffisant pour les discréditer. Il n’y aurait rien. Aucune preuve. Et la ramener avec elle était hors de question. Repartir non plus. Personne ne se satisferait de ça. Et surtout pas elle.

Ni la fille en face, qui répondait à la menace par la menace. Visiblement, elle devait la protéger. Ou … Elle ne savait pas. Mais elle ne semblait pas disposée à la lui laisser, ce qui aurait été étrange. En même temps, peut-être n’avait-elle même pas fait le rapprochement avec Halloween, et ce n’était pas elle qui allait lui dire « mais si, la cousine d’Aoden, tu te souviens ? ». Si elle devait poser des problèmes … elle la pétrifierait et point. Elle n’avait rien contre elle, mais elle aussi avec des ordres. C’est la mienne aussi. Et j’attends ce moment depuis un an. Elle est à moi. Sa voix tremblait mais elle ne pleurerait pas. Il ne le fallait pas. La situation était suffisamment bizarre et elle ne devait pas perdre pied. Je ne te ferai rien. Tu as protégé Aoden. Je te le dois. Les sourcils froncés, elle se concentrait de toutes ses forces. Et même si elle s’écartait, si elle lui laissait faire ce qu’elle voulait, qu’allait-elle accomplir ? Elle n’en avait pas la moindre idée. Mais ce n’était visiblement pas pour tout de suite, même s’il lui semblait sentir la résistance de la jeune femme faiblir. Le jour se lève. C’est la fin.

Un grondement étrange monta de la gorge de la jeune fille, sans qu’elle ne jette un seul coup d’œil à Lizbeth. La fin. Oui. Avait-elle compris ? Se souvenait-elle ? A moins qu’elle ne soit pas la seule à … Et je t’emmènerai avec moi ! Avec une vivacité qu’elle ne soupçonnait pas, le zombie venait de se jeter sur elle. Kaprice ne comprit sa douleur que quand elle heurta le sol de plein fouet. Son corps protesta, n’ayant que trop subi un sort similaire il y avait à peine deux mois. Elle ne hurla pas, pourtant. Non. Les barrières de bonne conduite, de raisonnement et de logique venaient de s’abattre. La meurtrière d’Heath était sur elle. A tâtons, elle chercha à récupérer la baguette qu’elle avait lâchée. Mais ses doigts butèrent contre le manche et l'objet roula plus loin. Qu'à cela ne tienne ! L'autre continuait avec ses tics tacs en boucle. Les mâchoires serrées, elle tenta de se contenir, mais quand un coup de griffes lui lacéra le visage, elle explosa : SALE P*UTE ! Se débattant sous elle, elle donnait des coups comme elle le pouvait, aveuglée par le sang, par la rage, par les larmes qui coulaient. Réveille-toi ! Arrête ton cirque ! Sa*pe ! Tu l'as tué ! C'est trop facile ! Parler prenait du temps et de l'énergie et elle ne parvenait pas à la renverser. Un coup de reins et elle l'envoya valser. Le visage en sang, à genoux dans l'herbe, elle chercha sa baguette. Elle tremblait, et des larmes ruisselaient sur son visage. Au diable les manières. Peu importaient les moyens qu'elle devrait employer, Lizbeth allait se souvenir. Elle allait cracher le morceau pour les viols. Et après elle allait payer.

Oui, bien sûr Kaprice. Sauf qu'elles n'étaient pas seules.

MA BAGUETTE:

CATFIGHT:

Tic ou Tac ?:

On nous la fait pas deux fois !:

De quelle baguette je me chauffe:

Elle fut surprise de voir Cinnamon à terre, pas si loin d’elle. Une seconde d’inattention qu’elle paya cher. Quand ses yeux cherchèrent la baguette, la jeune fille eut la désagréable surprise de la voir entre les mains de la folle. Le cœur battant la chamade, elle serra les dents. Ça devait être une mission de routine et elle se retrouvait face à la personne qu’elle haïssait le plus au monde, et celle-ci avait sa baguette. Ce n’était plus contrôlé. Ce n’était plus mesuré. Mais elle était impuissante. Il y avait deux extrémités pointées vers elle. Bien sûr. Ne jamais faire confiance à l’ennemi, même quand celui-ci a soi-disant eu des liens avec un de vos proches. Peut-être même « surtout quand ». Elle ne voulait pas mourir. Pas avant d’avoir réglé son compte à cette blondasse. Sa rengaine l’irritait, la rendait nerveuse. Se sentir dans la peau d’une moldue n’avait rien de rassurant ni de réjouissant. Il fallait qu’elle la lui reprenne mais pour l’instant, cela semblait hors de question. Les mains bien en vue, elle surveillait Lizbeth, n’attendant qu’une faille pour se jeter sur elle. Accroupie, la joue griffée, elle devait avoir l’air … eh bien d’une folle. Et elle espérait fortement n’avoir rien à voir avec la personne en face, même si sa nouvelle couleur de cheveux ne devait pas aider. La fenêtre d’action ne vint pas. Et elle était complètement allumée, menaçant la Mangemort également. Soit elle était complètement folle, soit … Tu dois la tuer ? Ou un peu des deux. Mais ce n’était pas ce qui avait été dit. Pourquoi était-elle là ? Elle n’était pas censée mourir. Elle n’était pas …

Le sort la prit de court et elle n’eut même pas le temps de se couvrir correctement. Une pierre lui fendit la lèvre avant qu’elle ne se mette en position fœtale. Un déluge s‘abattit sur elle, lui renvoyant douloureusement des souvenirs d’Halloween. Non. Elle ne l’aurait pas. Pas question. Heath n’avait pas perdu la vie l’année passée pour qu’elle y reste maintenant. Aucun os ne semblait avoir craqué et elle finit par rouler au sol, pour regarder son agresseur et … MA BAGUETTE ! L’objet trônait toujours dans la main de Lizbeth. Fendu. Soudain blanche, Kaprice eut le souffle coupé. Sa. Baguette. Elle. Venait. De … TU VAS CREVER ! La voix qui sortit de sa bouche n’était pas la sienne. Elle était rauque, cassée et tremblante de rage non contenue, comme tout son corps. Corps qui se tendit, alors qu’elle se ramassait sur elle-même et qu’elle sautait. Sa baguette n’était plus. Le Portoloin la ramènerait. Elle n’avait plus aucun moyen de lui extorquer quoi que ce soit par un sortilège. Mais il lui restait sa haine. Il lui restait sa vengeance. Le tout lui brûlait les entrailles et allait tout dévaster sur son passage. Lizbeth tomba plutôt facilement et, d’un coup sec du revers de la main, Kaprice lui écrasa la tête au sol dans un grondement sourd. Les mots se bousculaient mais elle ne parvenait à en sortir aucun. Son poing partit, dans la mâchoire de la jeune femme. Jamais elle ne s’était battue, les duels, elle ne les avait connus qu’en cours. Alors à mains nues, à la moldue …

Mais ça venait tout seul. À l’image des pierres qui l’avaient canardée, les coups pleuvaient sur Lizbeth qui continuait de rire comme une démente. Le goût du sang avait envahi la bouche de Kaprice. Son propre sang, sans nul doute. La rage l‘aveuglait complètement.

AU POINT DE LAISSER UNE ÉCHAPPATOIRE À LIZBETH ?:

ET SI ON MANGEAIT À PLUSIEURS ? (SI OUI AU PREMIER DÉ):

Kaprice et la Haine:

Ses phalanges s’écrasaient sur le visage, les bras, la poitrine de la jeune femme sans discontinuer. Son cerveau ne répondait plus, tout ce qui défilait étaient les images du Ministère. Cette mèche rose, qui était maintenant maculée de pourpre, qui avait retenu son attention. Ces traits, qui avaient été longtemps floutés dans son esprit, avant de surgir pour définir ce qu’elle voulait, ce qu’elle devait faire si elle voulait avancer. Le rayon lumineux, vert, qui avait fait s’arrêter son cœur. Le corps qui avait fait rempart. Et ce visage, figé pour l’éternité avec ce demi-sourire moqueur qu’il avait toujours arboré. Les larmes avaient depuis longtemps brouillé les yeux de Kaprice. Elle pleurait, en la bombardant de coups. Ce n’était pas suffisant. Il fallait qu’elle lui arrache tous ses cheveux, par poignées entières, qu’elle lui crève les yeux, qu’elle la démembre… Elle allait la réduire en purée, elle allait … Soudain, elle décolla. Pas comme à Trent Park, mais elle se sentit levée. Ses bras se tendirent, ses poings cherchèrent encore à l’atteindre. Un hurlement de rage passa ses lèvres quand elle se rendit compte qu’elle n’y parvenait pas. Ca suffit ! Non, voulut-elle hurler, ça ne suffisait pas. Elle respirait, elle se relevait, ça ne suffisait pas, ça ne serait jamais assez. Elle avait tué Heath. ELLE L’AVAIT TUÉ ! Lui taper dessus ne suffisait pas, ça ne l’avait pas apaisée. Mais elle e parvenait pas à parler, en fait … ni à respirer. Elle n’avait plus que conscience de sa victime, et d’un étau lui enserrant les épaules. Ca suffit, je te dis ! Elle a eu son compte ! Arrête ! Sa bouche s’ouvrit mais ne put que happer de l’air, sans que cela n’arrange les choses. Elle tenait à peine debout et tremblait de tous ses membres.

La tête lui tournait et elle se donna quelques secondes. Elle était en face, elle n’irait nulle part. Pourquoi... Je n'ai rien fait ! C'est pas moi ! Ceci, par contre, la fit réagir. Mais pas assez fort pour que Cinnamon la lâche. Sa respiration était trop forte, elle voulait hurler mais n’avait pas encore assez d’air. Elle ne se souvenait pas. ELLE NE SE SOUVENAIT PAS ! Elle ne devait pas se souvenir de grand-chose, vu comment la Mangemort lui retournait le cerveau comme elle le voulait. Quand elle parla d’en fini, Kaprice gigota faiblement, et avec un peu plus de vigueur quand elle comprit : Non … Pas question. Elle n’allait pas sauter, volontairement, comme ça, en pensant qu’elle était en train de voler. Elle devait payer. Mais Cinna la tenait. Et elle avait une … une baguette ! D’un mouvement rapide, Kaprice s’en saisit et fit un pas sur le côté : Désolée … mais il n’en est pas question ! Expulso ! Visant le flan Lizbeth, Kaprice l’écarta du bord de la falaise. Jetant un regard de biais à la Mangemort, elle secoua la tête : Je l’en jette après si tu veux. Mais il n’est pas question que cette s*alope s’en tire à si bon compte. Quiconque connaissant la jeune fille aurait pris peur en la voyant. Elle était complètement déconnectée et personne n’avait jamais vu cette lueur assassine au fond de ses yeux.

Se détournant, elle avala la distance qui la séparait de Lizbeth et lui pointa la baguette sous la gorge : Tu ne te souviens pas de moi ? Tic tac, tic tac. Elle se tordait les mains. De celui qui t’a violée ? Tic tac, tic tac. Bon, elle aurait essayé. Et Heath ? Tu n’as jamais sur son nom.Tic tac, tic tac. TA GUEULE ! Elle lui colla un coup de pied dans les côtes et l’autre se recroquevilla en chouinant. Au Ministère. L’année dernière. Tu l’as tué. Elle s’agenouilla, pendant que l’autre reculait, sur ses fesses. C’est moi que tu voulais tuer. Mais c’est lui que tu as eu. Le regard qu’elle lui lançait était vide. Même pas paniqué. Ou triste. Ou moqueur. Juste … vide. Elle n’avait pas la moindre idée de ce dont elle parlait. Elle ne devait même plus connaître son propre nom. Elle ne lui dirait pas qu’elle se souvenait. Qu’elle était désolée. Elle ne le lui aurait probablement même pas dit. C’était … Haletante, elle secoua la tête, se releva, avec un nouveau cri de rage. Non. Ce n’était pas juste. Ce n’était pas … La baguette se leva. Ça ne changeait rien. Une vie pour une vie. Sa main tremblait quand elle la pointa sur elle. Mais sa voix, elle, tomba comme un couperet : BLIXTEN ! L'éclair frappa Lizbeth de plein fouet qui retomba un peu plus loin, comme une poupée de chiffons, juste au bord de la falaise. Un long frisson parcourut Kaprice. Si tu veux la jeter, c'est le moment ... Morte. Elle devait l'être.

TIC TAC:

Quitte ou double:

Elle n’avait plus la baguette. Mais ça n’avait pas la moindre importance. Elle l’avait tuée. Tuée. Le corps inanimé de la jeune femme gisant au bord de la falaise était tout ce qu’elle voyait. Elle était vaguement consciente du fait que Cinnamon lui hurlait dessus, qu’elle avait tenté de s’interposer, mais n’en avait cure. Elle était … elle n’était plus. Elle se sentait complètement vide. Elle entendait son cœur pomper du sang, quelque part, dans sa poitrine, son qui résonnait dans son corps tout entier. Mais il n’y avait plus rien. La rage avait disparu. Tout avait disparu. En fait, Kaprice ne voulait qu’une chose : qu’on en finisse. Que cette … chose, ce cadavre disparaisse de sa vue. Qu’elle rentre au QG, qu’elle leur dise que cette fille était complètement folle et que par conséquent, son témoignage ne valait rien du tout et qu’ils s’en étaient probablement servi pour dire tout et n’importe quoi (qui savait si elle avait même prononcé la moindre accusation). Qu’elle … qu’elle fasse son deuil, enfin. Elle aurait du se sentir soulagée, elle le savait. Mais à l’heure actuelle, elle n’était plus sûre de rien. Était-elle debout, ou assise ? Cinnamon s’était agenouillée près du corps, prélevant quelque chose. Qu’importait. Il fallait que ça s’arrête. Où était le Portoloin ? C’était peut-être le moment de partir. La jeune fille donna un coup dans l’épaule de Lizbeth. Et … Je n'y arrive pas. Je ne peux pas.

Un frisson parcourut le corps de Kaprice qui secoua la tête. Mécaniquement, elle s’avança, passant aux côtés de Cinna. Finalement, elle reprenait conscience des choses. Du vent dans ses cheveux qui lui fouettaient le visage. Du froid qui la mordait durement. Du soleil qui était quasiment levé. Et de la poitrine de Lizbeth qui se souleva. Une décharge. Un grondement. Un automatisme. Les genoux qui se pliaient. Les mains attrapant les épaules de la blonde. La force mise à abattre sa tête sur le sol. Le sang, partout. L’impulsion. Et la chute. Perchée sur le rebord de la falaise, Kaprice la regarda faire le grand saut. Oh non, elle ne volait pas. Elle n’avait pas la grâce du corps de l’ex-Gryffondor lors de ses réminiscences nocturnes de Trent Park. Elle sombrait, allant directement aux Enfers, souhaitait-elle de toutes ses forces.

Et soudain, plus rien. La vision avait disparu. Et elle se retrouvait en haut de la falaise. Seule. Non, en fait, pas seule. Comme un zombie, elle se tourna vers Cinnamon, qui avait l’air … qui n’avait pas d’air, en réalité. Elle avait du sang sur les mains. Baissant les yeux, l’ex-Gryffondor considéra les siennes, qui n’étaient pas striées ou mouchetées de rouge, contrairement à celles de la Mangemort mais entièrement pourpres. La gorge nouée, elle les baissa. Cherchant quoi dire. Ne trouvant pas. Cherchant quoi faire. Ses jambes trouvèrent pour elle. Elles se dérobèrent sous elle, l’envoyant au sol. Elle avait suffisamment reculé pour ne pas suivre sa demi-sœur. Demi-sœur. Ses yeux scannèrent les environs, tombant sur sa baguette magique, brisée. Et ce fut ce qui lui fit monter les larmes aux yeux. Mais quand elle prit la parole, elle ne s’effondra pas. Tout ce qu’elle prononça fut : Tu n’as pas pu la pousser … Tu ne vas pas me tuer, pas vrai ? Mais elle pouvait toujours la faire prisonnière. Un spasme la secoua. Une vague nausée commençait à pointer le bout de son nez. Mais ce n’était pas le moment. Il fallait qu’elle s’en aille. Elle n’avait plus de baguette. Plus de baguette …

Il fallait qu’elle se relève, rapidement. Pour l’instant, son attention était concentrée sur la perte de sa baguette, donc elle aurait certes du mal à se remettre, mais qui ne serait certainement pas son problème principal. Une baguette, ça se remplaçait. En revanche, le fait d’avoir tué quelqu’un pour la première fois, rien n’arrangeait ça. Pour l’instant, Kaprice se protégeait. Son esprit avait érigé des barrières, de frêles murs qui ne tarderaient pas à s’écrouler. Mais le temps que le tout tenait en place suffisamment longtemps pour lui permettre de rentrer sans trop de dommages, elle prenait. Il fallait qu’elle prenne sur elle. Qu’elle se redresse. Non... Non quoi, manqua-t-elle de demander. Elle releva les yeux vers elle. Cinnamon ne la regardait pas. E entendant sa réponse, elle se souvint. Ne pas la tuer, la laisser partir. Bien. Elle avait la vie sauve grâce à Aoden. En d’autres circonstances, l‘ex-Gryffondor se serait sans doute posé mille questions du pourquoi du comment de ces excuses. Son cousin ne lui avait pas dit grand-chose à propos de la Mangemort mais sa curiosité n’était pas en éveil. Elle se contenta de noter mentalement les paroles, certaine qu’elles ressortiraient dans le bon ordre quand le moment viendrait. Quand les yeux de Cinna trouvèrent les siens, elle hocha lentement la tête. Le message était clair. Ne plus la voir. Ou Aoden y passait. Sas bouger, elle la regarda reculer et finit par ouvrir la bouche pour prononcer : Plus jamais. Et effectivement, elle ne comptait pas la revoir. Elle ne comptait pas … elle ne savait pas, en réalité.

Appuyant ses paumes au sol, elle se redressa péniblement. Son corps lui faisait mal. Elle ne parvenait pas à savoir si c’était à cause des rochers ou de la raideur de ses muscles. Lentement, elle se releva et, un pas après l’autre, alla récupérer sa baguette. L’inspectant d’un œil vitreux, elle se rendit compte qu’il n’y avait aucun espoir : elle était foutue et ne pourrait être réparé. Ce dont elle se doutait, même sans le dire, c’était que ce n’était pas la seule à être dans ce cas. Elle n’avait pas de montre et n’avait aucune idée du temps que tout cela avait pris. Il fallait qu’elle retrouve le Portoloin. Rapidement. Aussi rapidement que ses jambes lui permettaient. Ce ne fut pas compliqué. Ni très long. Elle tomba à genoux devant le vieux journal et posa le doigt dessus. Le regard dans le vague, elle attendait. Elle atterrirait dans une arrière-cour, non loin du QG. Elle n’aurait plus qu’à s’y traîner, raconter. Et après … Y avait-il un après ?

MISSION TERMINÉE.