Joe se réveilla en sursaut, évitant de justesse de hurler de terreur. Elle sentait le léger filet de sueur couler sur ses reins et sur son front à cause de ce cauchemar. Depuis l’horrible accident dans le train, la blonde ne cessait de penser à Ashley, s’inquiétant continuellement pour sa moitié, la cherchant du regard le moindre instant. Elle avait déjà vécu ça une fois, elle ne voulait pas que ça recommence. Ce foutu mec qui l’avait insulté avait bien sûr fait moins de dégâts mais Joe ne supportait pas qu’on touche le moindre cheveu de la belle brune qui habitait dans son cœur. Elle avait bien cru qu’elle allait mourir quand elle avait appris qu’Ashley était à Sainte-Mangouste dans un état plus que déplorable. La métisse était dans le coma et ne semblait pas prête de se réveiller. Pendant des jours, Joe avait stressé comme une folle, s’en voulant à mort car les deux filles s’étaient disputées avant les vacances. Elle ne voulait pas qu’Ashley… parte. Elle le refusait.

Quelques jours plus tard, cependant, Ashley s’était réveillée, pour le plus grand plaisir de sa famille, de ses amis et surtout de Joe. La blonde avait longtemps hésité avant d’aller la voir mais la relation entre les deux jeunes femmes restaient tendue. Joe savait qu’elle allait devoir prendre grand soin de la Gryffondor. C’est comme ça qu’une idée s’était insinuée dans son esprit, lentement mais sûrement. Ashley était revenue au Château, suivait les cours mais passait quand même beaucoup de temps à l’infirmerie, si bien que la blonde ne pouvait pas la voir très souvent. Et la plupart du temps, les deux filles étaient dans un mauvais endroit ou plutôt, l’endroit n’était pas propice à une discussion sérieuse. Joe avait donc passé un bon moment à chercher l’endroit parfait, le décor parfait. Elle savait qu’elle allait devoir se faire pardonner et surtout, changer les idées de sa petite amie. Cette dernière avait pas mal d’idées noires dans la tête et cela ne plaisait pas du tout à la blonde.

Il était encore tôt, le dortoir était encore endormi et il n’y avait presque personne dans la Grande Salle. Johanna décida donc d’aller s’installer en bas afin de prendre son petit-déjeuner en écrivant la lettre qui lui trottait dans la tête depuis un petit moment. La jeune fille passa rapidement sous la douche, enfila un jean foncé et un débardeur blanc sur lesquels elle jeta sa cape et passa sa cravate autour de son cou sans pour autant l’attacher. Elle donna un rapide coup de brosse dans ses cheveux et enfila ses ballerines noires en dévalant les escaliers. Elle faillit se casser la figure en se prenant les pieds dans le tapis mais se rattrapa de justesse, continuant son chemin en redressant un peu la pile de livre qu’elle baladait sous son bras, ayant eu la flemme de les jeter dans son sac qu’elle trimbalait pourtant sur son épaule. Elle poussa le portrait de la Grosse Dame, descendit encore et encore des escaliers jusqu’à arriver dans l’imposante Grande Salle. Là, elle s’assit en tailleur sur un banc, attrapant un toast d’une main en sortant un parchemin et une plume de l’autre. Perdue dans ses pensées, elle se mit à écrire sa lettre, qui se révéla assez courte.


Contente d’elle, la blonde rangea la lettre dans son sac, avec l’intention de passer à la volière dans la matinée. Elle croqua dans un deuxième toast, avala un verre de jus de citrouille et se leva. Elle avait cours et devait se dépêcher car elle ne pouvait pas arriver en retard. Elle balança ses livres dans son sac, qu’elle jeta sur son épaule. Puis, elle se leva rapidement et partit en cours d’un pas rapide et léger. Elle avait hâte d’être vendredi soir.

-------------------------------------- Vendredi soir

Joe stressait. Après avoir envoyé la lettre à Ashley, elle n’avait pas reçu de réponse. Elle ne savait pas si la brune allait venir mais n’arrivait pas à douter. Elle savait, elle sentait qu’Ashley serait là. Avec un dernier regard dans le miroir, Joe sortit du dortoir et se dirigea vers la Salle Sur Demande. Elle pensa très fort à un endroit calme, reposant, comportant un canapé confortable et une lumière douce. Lorsqu’elle poussa la porte, elle sourit. C’était tout simplement parfait. La jeune fille s’assit sur le canapé et attendit. Il était presque vingt et une heure… Soudain, la porte s’ouvrit et Joe vit une magnifique jeune femme entrer. Ashley resta ébahie devant le décor.

Il s’agissait d’une clairière verdoyante et lumineuse, entourée de quelques arbres dans lequel le vent s’amusait à créer de douces symphonies. Il faisait bon, l’air était chaud sans être sec. Au centre de la clairière était posé un canapé blanc et large, totalement déplacé dans ce paysage, mais qui semblait pourtant être à sa place. Joe était assise sur l’accoudoir du canapé, ses cheveux blonds volant légèrement dans le vent, sa robe blanche s’emmêlant autour de ses jambes. Elle se leva et attendit qu’Ashley arrive à sa hauteur.

Tu aimes ? J’ai demandé un endroit calme et reposant parce que tu en as besoin… Enfin, je veux dire…

Joe ferma la bouche et jeta un regard d’excuse à Ashley. Elle ne savait plus comment s’exprimer mais en voyant le regard heureux d’Ashley, elle sourit à son tour. Apparemment, la Salle avait bien choisit. La blonde entraina sa moitié sur le canapé, la fit s’asseoir et se plaça derrière elle, massant doucement ses épaules. Elle savait que les chances étaient grandes pour que LA discussion se passe ce soir mais elle n’avait pas envie de lancer le sujet. Pas maintenant. Pas tout de suite. Elle voulait d’abord profiter du calme, en compagnie de sa petite amie.

Le rouge était vraiment la couleur d’Ashley… La métisse était absolument magnifique dans sa robe et Johanna mit quelques secondes à se rappeler que oui, cette magnifique fille était bel et bien sa petite amie. Lorsque la blonde avait demandé à sa moitié si le décor lui plaisait, un sourire, petit mais si rayonnant, avait éclairé le visage d’Ashley pendant une seconde et le cœur de Johanna avait fait un bond. Mon dieu, que cette fille était belle… Et elle ne s’en rendait même pas compte ! La brunette avait perdu toute sa confiance en soi depuis…

Quand Johanna commença à masser le dos d’Ashley, elle sentit immédiatement que cela n’irait pas. Elle savait bien que l’hispanique avait été grièvement blessée à cet endroit mais elle ne pensait pas que cette partie du corps deviendrait aussi tendue au moindre contact. Auparavant, Ashley adorait les massages de la blonde. Mais là, elle semblait souffrir le martyr. C’est quand la brune se leva pour se blottir dans les bras de sa petite amie que celle-ci comprit l’étendue des dégâts. Elle sentit les larmes de son amie glisser le long de son cou et sentait son torse se lever par secousses contre le sien. La plus jeune pleurait et Johanna ne savait pas comment réagir. Elle referma donc les bras autour du corps mince de sa petite amie et la berça doucement, comme elle l’aurait fait avec un enfant.

Je suis désolée…

Johanna fronça les sourcils mais ne releva pas tout de suite. Elle préféra resserrer l’étreinte autour du corps fragile d’Ashley et embrasser le sommet de sa tête. Ashley était désolée, d’accord… Mais désolée de quoi ? D’être venue ? De la rendre heureuse par sa simple présence ? D’être aussi magnifique et parfaite ? Ou alors, d’être celle à qui la blonde avait confié son cœur. Dans tous les cas, Johanna ne regrettait absolument rien. Elle aimait cette fille, bon dieu ! Elle aurait tout abandonné pour elle. La brune ne se rendait pas compte de la force des sentiments de Johanna à son égard. C’est pourquoi Johanna repoussa légèrement Ashley, pour pouvoir planter son regard dans les yeux si sombre de la rouge et or. Un fin sourire tira les lèvres de l’ainée et elle effleura légèrement celles de son homologue.

Désolée de quoi, Ashley ? Tu n’as pas à être désolée. Il n’y a plus aucune raison de l’être… Je t’aime, je t’ai retrouvé, tout va bien.

La blonde embrassa une nouvelle fois les lèvres si douces et recula un peu afin d’observer les étoiles renaître dans les yeux de sa compagne. Johanna se plongea dans ce regard qui devenait de plus en plus joyeux au fil des secondes qui s’écoulaient et elle sentit son cœur battre à s’en arrêter. Elle aimait cette fille à la folie. Peut-être…

Glissant une main dans sa poche, Johanna sortit une petite boite en velours noir. Elle vit plusieurs émotions passer dans le regard d’Ashley lorsqu’elle s’agenouilla devant la brune. La stupéfaction, la confusion, la peur, le bonheur à l’état pur, l’indécision, la confusion de nouveau, et la dernière émotion était un mystère complet pour la blonde. Elle ne savait pas si elle devait bien ou mal le prendre mais elle continua sur sa lancée.

Ashley. Tu sais à quel point mon amour pour toi est fort. Même si ces dernières semaines n’ont pas été de tout repos, j’aimerais te prouver que mes sentiments sont toujours présents, toujours aussi forts et même qu’ils se renforcent de jours en jours.

La blonde ouvrit la petite boite et une magnifique bague apparut. Un simple anneau d’or blanc, sertit de petits diamants sur la moitié du métal précieux. Johanna avait profité d’une sortie à Pré-au-Lard pour acheter le bijou. Elle ne s’était pas tout de suite rendu compte de l’aspect formel de ce qu’elle était en train de faire et, ne sachant pas si Ashley était prête pour ça, elle précisa une petite chose.

Ashley, je précise que ce n’est pas exactement une demande en mariage… Simplement une promesse. Promesse que je t’aimerais toujours, que jamais je ne te laisserais tomber et que je serais toujours là pour toi, quelle que soit l’heure, quel que soit le sujet qui te préoccupe, je serais toujours là pour t’écouter. C’est ce que cette bague signifie.

Johanna regarda anxieusement sa petite amie, qui était comme figée sur place. La blonde douta soudainement de son geste. Et si Ashley la repoussait ? Et si elle venait de tout foutre en l’air ? Johanna haussa très légèrement un sourcil et passa rapidement sa langue sur ses lèvres. Elle était terrorisée. Elle ne doutait absolument pas de ses sentiments pour l’hispanique mais elle doutait de la capacité de cette dernière à tenir le choc de l’annonce. Elle était encore si fragile… Si belle mais si fragile…

L'anticipation était une arme bien connue de l'esprit humain. Une défense pour lui qui déteste l'inconnu et n'aime pas ne pas savoir quelque chose. L'anticipation était devenue l'arme de prédilection d'Ashley. Sa seule arme face au monde qui lui faisait face. La seule chose qui lui permettait d'être relativement prête face à un événement inconnu. La seule chose qui la rassurait à présent. Cette soirée-là, elle l'avait anticipée, elle l'avait imaginée, elle l'avait rêvée, elle l'avait espérée. Mais jamais, Ô grand jamais n'aurait-elle pu s'attendre à une telle chose. La salle dans laquelle elles étaient ? Dépassait ses espérances. La beauté de Johanna ? Allait bien au-delà de ce que sa mémoire lui avait donné pour la journée. La bague ? Ne lui avait jamais frôlé l'esprit. Elle n'en avait pas rêvé. Pourquoi l'aurait-elle fait ? Tous ces jours à Sainte-Mangouste sans aucune nouvelle, tous ces jours au château sans que rien ne change, sans qu'une discussion n'ait lieu, hormis les banals « comment tu vas ? » qu'elles se lançaient en se croisant dans les couloirs. Pourquoi aurait-elle imaginé que Johanna se mette à genoux et lui sorte ... ça ? Le rouge lui monta aux joues tandis qu'elle écoutait les mots de sa petite-amie. Des mots touchants, certes, mais des mots qui n'illustraient pas ses actions. Les yeux bleus de son aînée étaient remplis d'espoir, d'honnêteté, d'amour. Elle le savait. Elle le lisait. Mais c'était ...

La préfète ferma les yeux, passa une main sur son visage et se détourna de la jolie blonde. Elle ne pouvait pas la regarder. Elle sentait le tissu frotter son dos, sa cicatrice si sensible, sentait son sang couler dans ses veines, sentait son coeur battre plus vite que la normal, sentait les larmes lui piquer les yeux, sentait le regard de Johanna sur son corps, mais plus encore, elle sentait l'amour qu'elle éprouvait pour la née-moldue. Sans aucun doute possible, Ashley avait envie de dire oui. De le crier même. De lui dire la même chose, avec la bague en moins, de l'embrasser avec une telle passion qu'elles en seraient toutes deux étourdies et forcées de s'asseoir pour s'en remettre. Elle avait envie de retrouver Johanna et de se retrouver elle-même, mais c'était une envie stupide et immature. Et elle ne pouvait pas accepter cette bague. Elle ne le pouvait tout simplement pas. « Es-tu stupide ou folle pour faire ça ? » demanda-t-elle après plusieurs minutes de silence. Sa voix était tremblante, mais son ton ne laissait rien présager de bon. « Es-tu inconsciente ou bien agis-tu en toute connaissance de cause ? As-tu tout simplement compris ce qu'il se passait en ce moment ? »

Larmes oubliées, elle fit à nouveau face à Johanna, ses cheveux lui fouettant le visage au passage. La blonde était à nouveau debout et Ashley voyait très bien que ses yeux menaçaient de verser un torrent de larmes. Elle voyait la douleur qu'elle lui infligeait avec ses paroles et cela lui transperçait le coeur. Elle fit deux pas en avant et pris le visage de la jeune femme entre ses mains. « Je t'aime Johanna. Je t'aime. Mais tu ne penses pas ce que tu dis. » murmura-t-elle. « Le temps n'est pas à l'amour, ni aux promesses, ni au mariage. Le temps est à la mort, aux doutes, au changement. Je ne suis plus que l'ombre de moi-même Joe. Il n'y a plus rien à aimer. Dans quelques mois tu quitteras Poudlard et tu rencontreras des gens qui te feront sourire, qui te feront connaître le bonheur, la joie. Des gens qui te feront oublier la guerre et la peur. Mais moi, dans quelques mois, je ne sais même pas si je serai encore en vie. Tu ne peux pas me promettre que tu seras toujours là. Tu ne peux pas. » Son regard n'avait pas lâché celui de Johanna une seule seconde. Il fallait qu'elle comprenne. Il fallait qu'elle voit, que sa promesse était une promesse vide et qu'elle n'avait pas le droit de la faire espérer ainsi alors qu'il n'y avait aucune chance pour que l'engagement ne tienne. « Cette bague est superbe. Garde la pour quelqu'un qui l'a mérité. »

Le sourire qui fit son apparition sur le visage de la Lakefield était le sourire d'une personne au coeur brisé, qui disait au revoir à l'amour de sa vie. Il n'y avait que les mains de Johanna sur les siennes pour l'empêcher de partir.

Johanna attendait, anxieuse. Elle voyait tant d’émotions passer dans les yeux de sa moitié qu’elle ne savait pas sur laquelle se fixer. Elle vit avec horreur Ashley fermer les yeux et passer une main sur son visage en reculant. La blonde venait de tout faire foirer… Elle qui voulait juste passer une soirée tranquille avec sa petite amie et la retrouver après toutes les mauvaises nouvelles qui leur étaient tombées dessus, après la blessure et après l’attaque du train… Et là, elle venait de faire partir de ses bras la seule personne qui comptait au monde et la voyait douter encore et encore. L’hispanique était toujours de dos et ne se retourna pas pour parler.


Es-tu stupide ou folle pour faire ça ? Es-tu inconsciente ou bien agis-tu en toute connaissance de cause ? As-tu tout simplement compris ce qu'il se passait en ce moment ?

Johanna sentit son cœur se serrer et commencer à saigner. Elle voulait juste prouver à Ashley à quel point son amour pour elle était présent et essayait aussi de se faire pardonner de son absence, un peu… Mais elle voulait juste que la brune comprenne à quel point Joe était folle d’elle et jusqu’où elle pouvait s’engager. Et cela n’était peut-être que le début ! La blonde avait envie de fonder une famille avec sa future femme... Enfin là, ça semblait plutôt mal parti pour avoir une réponse favorable mais il était permis de rêver… Et puis, l’espoir fait vivre, c’est bien connu.

Mais… Ashley, je ne suis ni stupide ni folle, juste amoureuse… Je ne supporte plus de vivre sans toi et j’aimerais t’avoir à mes côtés jusqu’à la fin de ma vie. Être là pour toi quelle que soit l’heure. C’est ça que cette bague signifie ! Je ne vois pas en quoi je serais folle de vouloir à mes côtés la seule personne qui me tient en vie…

Les larmes menaçaient de couler sur les joues de la bonde et elle les retenait tant bien que mal. C’est ce moment que choisi Ashley pour se retourner et lorsqu’elle vit les cheveux de la brune voler et à quel point sa petite amie était belle, le cœur de Joe se serra encore plus et une seule et unique larme roula sur sa peau blanche. Ashley se rapprocha d’elle et prit son visage entre ses mains.

Je t'aime Johanna. Je t'aime. Mais tu ne penses pas ce que tu dis. Le temps n'est pas à l'amour, ni aux promesses, ni au mariage. Le temps est à la mort, aux doutes, au changement. Je ne suis plus que l'ombre de moi-même Joe. Il n'y a plus rien à aimer. Dans quelques mois tu quitteras Poudlard et tu rencontreras des gens qui te feront sourire, qui te feront connaître le bonheur, la joie. Des gens qui te feront oublier la guerre et la peur. Mais moi, dans quelques mois, je ne sais même pas si je serai encore en vie. Tu ne peux pas me promettre que tu seras toujours là. Tu ne peux pas. Cette bague est superbe. Garde là pour quelqu'un qui l'a mérité.

Johanna repoussa sa petite amie et planta son regard dans les yeux si foncés de celle qui faisait battre son cœur. Comment ça elle ne pouvait pas le promettre ? Bien sûr que si elle le pouvait. Elle ferait tout pour rendre ses rêves réalités et qu’importe le prix que cela lui coûtera, elle ne renoncera jamais à la femme de sa vie. Elle pinça les lèvres et son regard se fit grave

Ecoute moi bien, Ashley Lakefield ! L’heure n’est justement pas à la guerre et aux morts. L’heure est venue de montrer la puissance de l’amour, de l’amitié, des sentiments positifs et de se marier et de fonder une famille. Tu n’es peut-être que l’ombre de toi-même mais cela n’empêche pas mon cœur de t’aimer. Même quand j’aurais quitté cette école, je ne t’oublierais pas… Ce n’est pas parce que tu as une année de moins que moi que je ne passerais pas chaque fois que je le peux et qu’on ne se verra que pendant les vacances. Je te laisserais pas tomber, surtout quand tu vas mal et que tu n’es que l’ombre de toi-même. Mon cœur t’aime toujours autant et te redonnera de la lumière, remettra des étoiles dans tes yeux, fera tout pour te rendre heureuse parce que tu es tellement magnifique quand tu souris… Ashley, je peux te le promettre simplement parce que quand on veut, on peut, et que je veux que mes rêves deviennent réalité. Quant à la bague, si je décide de te l’offrir à toi, c’est pour de bonnes raisons. Mon cœur t’a choisi toi, et personne d’autre. Refuse-la, j’encaisserais et espérerais ne pas t’avoir perdu en faisant ce geste. Accepte-la et je serais la femme la plus heureuse au monde. Le choix est tien, maintenant… Mais n’oublie pas que je t’aime et que je t’aimerais toujours.

Johanna fit deux pas en arrière, tourna le dos à sa petite amie et s’assit dans l’herbe, jouant avec les brins du bout des doigts. Il y avait deux options maintenant… Ou Ashley passait à ses côtés, lui rendait la bague et sortait en fermant la porte sur elle et leur futur ou elle prenait Joe dans ses bras et lui faisait un baiser sur la nuque découverte de la blonde. L’ainée attendrait… Elle attendrait toujours, ne partirait jamais, n’abandonnerait pas… Là, elle espérait juste qu’Ashley n’allait pas partir.

Il n'existait pas meilleure réponse à une question posée que le silence. Pesant, destructeur, il régnait en maître et maintenait l'épée de Damoclès au-dessus de la tête de ses victimes. Le silence était roi. Un roi injuste et tortionnaire que personne ne pouvait détrôner. Ashley était courageuse, elle était brave, mais elle ne pouvait s'imposer face au silence qui avait suivi les paroles de Johanna.

Les yeux baissés au sol, elle tentait en vain de contrôler sa respiration, le flux des larmes qui menaçaient de couler, elle tentait de retrouver le contrôle sur sa vie. Il y a quelques mois, elle avait tout. Le courage, la motivation, les amis, la famille, la fille … Il n'avait fallu qu'un clignement d'oeil pour que tout lui échappe des mains. Comme un verre qui glisse entre vos doigts et vient s'écraser à vos pieds, alors que vous pensiez le tenir fermement. Il y a un mois, elle avait tout perdu. « Où étais-tu quand j'avais besoin de toi ? Où étais-tu quand j'étais cloîtrée au lit à Sainte-Mangouste ? Où étais-tu quand je me suis réveillée ? Je ne savais rien. Je savais que tu étais saine et sauve, que tu étais à Poudlard, mais où étais-tu ? Les seules nouvelles que j'ai eu de toi venaient de Cléia-Nora. Tu ne pouvais pas m'envoyer une seule lettre, un simple mot pour me dire que tu allais bien ? Où étais-tu quand je suis rentrée ? En plus de souffrir physiquement, je devais souffrir de ton absence et ça Johanna … ça je ne peux pas l'oublier. Ta promesse est vide. » Si elle avait tenu quelque chose entre les doigts, si elle avait tenu cette bague entre ses mains ... le bijou serait tombé au sol. Ashley releva les yeux et fixa la chevelure blonde de Johanna, priant pour qu'elle se retourne, qu'elle la regarde dans les yeux. Pour qu'elle voit, qu'une promesse et une bague ne pourrait pas réparer ce qu'elle avait cassé. Une promesse ne restaurerait en aucun cas sa confiance.

Peut-être serait-il mieux qu'elles en finissent. Qu'elles se quittent sur ces mots, que Johanna quitte le château sans avoir à se retourner à la fin de l'année, mais elle ne pouvait pas bouger les pieds, elle n'avait pas la force de marcher jusqu'à la porte, elle n'avait aucune envie de voir que sa vie n'était plus qu'un désastre, d'imaginer Johanna avec quelqu'un d'autre, de passer encore plusieurs mois à l'avoir près d'elle et ne pas pouvoir la toucher. Elle n'avait aucune envie de la perdre, mais comment réparer l'irréparable ? « Regarde-moi dans les yeux Johanna. Regarde moi dans les yeux et dis moi pourquoi tu n'étais pas là quand j'avais le plus besoin de toi. Dis-moi pourquoi tu n'étais pas à mes côtés alors que le monde s'effondrait autour de moi. Dis-moi comment tu peux me promettre d'être toujours là, alors que tu n'étais pas là à mon réveil. » les mâchoires et les poings serrés, elle était à deux doigts d'imploser sous la colère et la tristesse. À deux doigts de ne plus rien voir à cause des larmes qui lui brouillaient la vue.

Cette soirée aurait dû être parfaite, l'occasion de tout effacer et reprendre sur de bonnes bases, faire table rase du passé et avancer. Cette soirée était devenue un cauchemar et alors qu'Ashley faisait un pas en avant, un pas se rapprochant de Johanna, elle sentait l'air quitter ses poumons. Aimer n'est jamais suffisant. Les paroles réconfortantes, les « je t'aime » n'étaient pas suffisant. Sans la confiance, sans l'intimité, sans l'amitié, un couple n'était rien. Aux yeux de la préfète, leur couple se mourrait lentement et la peur lui tiraillait le ventre. La peur qu'elles ne deviennent qu'un simple rien insignifiant l'effrayait plus que la mort elle-même.

Le silence se prolongeait dangereusement et Johanna ne savait qu’en penser… Ses doigts s’entortillaient encore et encore dans l’herbe et elle tentait de ne pas se retourner mais la tentation était forte. Elle voulait voir Ashley, la prendre dans ses bras, lui dire à quel point elle était désolée, désolée pour tout. Lui dire à quel point elle l’aimait, le lui prouver, le crier sur tous les toits… Mais elle ne pouvait pas. Elle devait attendre qu’Ashley parte ou parle. Lui fasse part de sa décision. La blonde avait dit ce qu’elle avait à dire, fait ce qu’elle avait à faire. Et même si elle doutait, elle ne regrettait pas. Elle attendait... Et les brins d’herbe arrachés commençaient à s’accumuler près de ses genoux quand la voix d’Ashley résonna dans le silence étrangement lourd de la clairière.

Où étais-tu quand j'avais besoin de toi ? Où étais-tu quand j'étais cloîtrée au lit à Sainte-Mangouste ? Où étais-tu quand je me suis réveillée ? Je ne savais rien. Je savais que tu étais saine et sauve, que tu étais à Poudlard, mais où étais-tu ? Les seules nouvelles que j'ai eu de toi venaient de Cléia-Nora. Tu ne pouvais pas m'envoyer une seule lettre, un simple mot pour me dire que tu allais bien ? Où étais-tu quand je suis rentrée ? En plus de souffrir physiquement, je devais souffrir de ton absence et ça Johanna … ça je ne peux pas l'oublier. Ta promesse est vide.

Le cœur de la blonde rata un battement avant de reprendre de plus belle. Où elle était ? Oserait-elle vraiment le dire à Ashley ? Elle n’en avait aucune envie mais ne voulait plus lui mentir… Elle préférait que la brune soit au courant plutôt qu’elle le découvre par quelqu’un d’autre. Elle sentait son couple lui glisser entre les doigts et se refusait à le voir se briser sur le sol. Elle devait la vérité à Ashley même si cela lui déplaisait fortement. Elle qui détestait dévoiler ses peurs et ses doutes, elle se voyait moralement contrainte de dire à sa petite amie pourquoi elle n’était pas venue, pourquoi elle n’avait rien envoyé, pourquoi elle avait été distante… Joe prit une profonde inspiration mais avant qu’elle n’ait pu faire le moindre geste, Ashley continuait.

Regarde-moi dans les yeux Johanna. Regarde moi dans les yeux et dis moi pourquoi tu n'étais pas là quand j'avais le plus besoin de toi. Dis-moi pourquoi tu n'étais pas à mes côtés alors que le monde s'effondrait autour de moi. Dis-moi comment tu peux me promettre d'être toujours là, alors que tu n'étais pas là à mon réveil.

Joe déplia ses longues jambes et d’une pression du sol se retrouva debout, toujours dos à sa petite amie. Tant de questions, il lui fallait du temps pour répondre… Ashley le lui donnerait-elle ? La blonde se retourna, lentement, comme au ralentis, mais garda les yeux baissés quelques secondes. Elle se rapprocha d’Ashley, la prit par le bras et la fit s’asseoir dans le canapé. Elle se mit en tailleur à côté de l’hispanique et attendit quelques secondes avant de parler afin de garder son calme et de contrôler sa voix. Puis, elle releva les yeux, les planta dans ceux d’Ashley et commença à parler.

Où est-ce que j’étais ? J’étais couchée dans mon lit, les draps par-dessus la tête, en train de pleurer. J’étais dans la bibliothèque pour m’isoler du bruit afin de réfléchir tranquillement. J’étais à l’infirmerie pour calmer mes crises d’angoisse. J’étais en train de me balader dans les couloirs au milieu de la nuit parce que le sommeil ne venait pas à moi. Pourquoi ? Parce que toutes mes pensées étaient focalisées sur toi. Parce que je n’arrivais tout simplement pas à comprendre comment s’était arrivé. Parce que je ne voulais pas y croire. Parce que mon cerveau me disait de courir te rejoindre mais que mon cœur était brisé, totalement perdu.

Je ne voulais pas te voir dans cet état parce que je savais que j’allais m’effondrer et pourtant, je devrais sourire et me montrer forte pour nous deux. Mais je n’en avais pas la force. J’étais trop perdue, je ne savais plus quoi faire… Quand Cléia-Nora m’a dit que tu étais réveillée, j’ai senti un poids s’envoler mais il a bien vite été remplacé par un autre. J’étais soulagée que tu reviennes mais je ne savais pas comment agir, comment t’expliquer pourquoi je n’étais pas là à ton réveil.

Je t’ai écrit des lettres, ça oui ! Je n’ai eu ni la force ni le courage de te les envoyer. Je redoutais ta réaction mais je savais que si tu ne recevais rien, je verrais ta réaction de mes propres yeux, ici. Dans les deux cas, je n’étais pas gagnante… Je savais que tu allais me le reprocher mais… Mais rien, je suis impardonnable sur ce coup, je te l’accorde. Je voulais venir… Je ne pouvais pas. Je n’y arrivais pas… Te voir étendue dans un lit d’hôpital, inconsciente… Cela m’aurait brisé.

Je savais aussi que si tu ne te réveillais pas, j’aurais trouvé un moyen de te rejoindre parce que je ne vois plus ma vie sans toi… Je n’aurais pas supporté le vide dans mon cœur, je n’aurais pas supporté de voir mon regard vide et rouge tous les matins jusqu’à la fin de ma vie, je n’aurais pas supporté de me réveiller en me disant : Je n’ai plus rien qui me retiens ici, tu me manques mon amour. Je n’aurais pas non plus supporté les regards indulgents et faux des personnes à Poudlard.

Mes promesses sont vides, c’est ce que tu penses et je comprends… Mais sache que si je n’étais pas là à ton réveil, mes pensées étaient fixées sur toi. Je ne pouvais pas te sortir de ma tête, je me disais que j’étais horrible, nulle, idiote, complètement stupide et j’en passe. Je m’en voulais énormément… Je n’ai pas bougé pour autant, c’est contradictoire je sais… Mais sur le moment, ça me paraissait logique.

Ashley, il faut aussi que tu saches que… Quand j’ai appris que tu étais dans un état critique et qu’on était pas sûr que tu te réveilles un jour, j’ai cherché un moyen de te rejoindre. J’avais tellement peur… Peur de te perdre si tu ne te réveillais pas, de te perdre si tu te réveillais en ne me voyant pas, de te perdre parce qu’un… accident comme celui-là change les personnes à vie… Je m’en veux terriblement, mon amour… Je ne sais pas comment me faire pardonner…

Oh, sache aussi que la bague, je l’ai acheté bien avant ton accident. Je ne trouvais pas de bon moment pour te l’offrir. Puis j’ai vu ton regard perdu, tes larmes sur tes joues et mon cœur s’est brisé en deux. Je ne supportais pas de te voir ainsi et je me suis dit que, peut-être, ça te remettrait des étoiles dans les yeux… Je vois que j’ai tout foiré, excuse-moi…

Maintenant que tu sais tout, si tu veux partir, je comprendrais… Je ne t’en voudrais pas, je suis l’unique coupable… Je m’en voudrais à moi-même, par contre. Parce que j’aurais perdu la fille qui a fait chavirer mon cœur et qui me fait sourire tous les jours. J’aurais perdu mon âme-sœur. J’aurais perdu celle avec qui je veux vivre… Et ça serait entièrement de ma faute…

C'est cliché, quand on y pense. Cette bataille entre la tête et le coeur, la pulsion et la raison. L'un qui dit oui, l'autre qui dit non. Le petit diable sur une épaule, le petit ange sur l'autre. Le Ca et le Surmoi. C'est cliché, mais tellement vrai. Le compromis n'existe pas, dans ces cas-là. C'est un oui, ou c'est un non, mais il n'y aura jamais de peut-être. Quand on y pense, la réflexion est un indice de la réponse. Le précepteur du « non » qui brisera votre vie. Mais la pulsion est-elle réellement démonstratrice de tous les sentiments d'une personne ? La réflexion n'est-elle pas la meilleure solution lorsque l'avenir est en jeu ?

La bataille faisait rage. Le oui, le non, la colère, la peur, l'amour, l'envie ... la confusion. C'était cela. Au-dessus de tous ces sentiments qui prenaient Ashley par surprise, régnait la confusion. La jeune fille était perdue, larguée au milieu de l'océan, nageant dans une direction, sans savoir si c'était la bonne, mais portée par les vagues dans la direction opposée. C'était douloureux, fastidieux, terriblement fatiguant et elle était épuisée. Épuisée de devoir constamment cacher sa colère, sa douleur, sa peur. Tellement épuisée qu'elle se sentait faible et lâche. La définition même d'un serpentard.

Plus Johanna parlait et moins Ashley avait envie d'entendre ce qu'elle avait à dire. Elle détacha ses yeux de ceux de sa petite-amie, prit sa tête entre ses mains et dirigea son regard vers le sol. C'était tout ce qu'elle pouvait faire pour se retenir de boucher ses oreilles. Un sentiment d'effroi, de terreur, s'empara d'elle. Cette guerre l'avait détruite et menaçait de détruire tous ses proches. Ses parents étaient plus sombres qu'à l'ordinaire, toujours sur leurs gardes, toujours tendus, devenus incapable de sourire et Johanna avait contemplé l'idée du suicide parce qu'Ashley s'était dévouée corps et âmes pour sa faction. Parce qu'elle avait fait passer la guerre avant tout le reste. Parce qu'elle envenimait les choses à chaque fois qu'elle croisait ses ennemis dans les couloirs. Son propre égoïsme la rendait malade. Pire encore, l’égoïsme de Johanna la rendait folle de rage.

Oubliée son absence à son réveil, oubliée son silence radio pendant des semaines, ne restait plus que la colère. « Comment ... » Elle n'était même pas capable de le dire à voix haute. « Comment est-ce que tu peux penser à te suicider ? » Elle manqua de s'étrangler en prononçant le dernier mot. « Est-ce que, dans tout cela, tu as seulement pensé à ta famille ? Est-ce que tu te rends compte de ce que tu es en train de me dire ? C'est pas un geste romantique le suicide Johanna. On est pas dans Paracelsus et Perenelle. ». Elle était à présent debout et faisait les cent pas dans l'espoir de se calmer. « Tu es complètement folle. Complètement inconsciente. » Sous sa barbe inexistante, elle continuait de maugréer. « Et ta bague ! Si ta bague c'est la promesse que tu te tueras si je venais à mourir, tu peux te la garder. Par les couilles de Merlin, j'ai jamais entendu quelque chose d'aussi stupide sortir de ta bouche. » Et elle se tut. Comme ça, d'un coup, le silence était revenu. Droite et immobile en face de Johanna, son visage était redevenu froid et distant. Il n'y avait plus rien à dire. Elle comprenait. Grand Dieu, elle comprenait la position de sa blonde, mais imaginer le corps sans vie de Joe était une torture. Pire torture encore que ce que Lilith et Callista lui avaient fait subir.

C'est cliché quand on y pense, l'envie de protéger la personne qu'on aime, au risque de soi-même perdre la vie. La pulsion n'était peut-être pas le reflet de toute une personne, mais il représentait l'instinct de survit que tout homme possède et il n'y avait pas à dire, sans Ashley, il n'y avait pas de Johanna. Sans Johanna, il n'y avait pas d'Ashley.

Plus la blonde parlait, plus elle voyait sa petite amie se décomposer et se recroqueviller sur elle-même. Cependant, Joe n’arrêta pas sa tirade et continua son récit jusqu’à la fin. Une fois terminé, le silence s’installa, pesant. Et la jeune femme ne voyait plus que le sommet du crâne de sa compagne car celle-ci s’était pris la tête entre les mains et avait fixé son regard sur le sol. Elle hésita un instant à attraper le menton de l’hispanique et de lui relever doucement la tête afin que leurs yeux se rencontrent mais avant qu’elle ait pu faire le moindre geste, la brune se leva et commença à tourner en rond, comme un lion en cage. Joe ne bougea pas, descendit la main qu’elle avait commencé à lever et croisa les doigts pour ne pas jouer avec ses cheveux.

Comment… Comment est-ce que tu peux penser à te suicider ? Est-ce que, dans tout cela, tu as seulement pensé à ta famille ? Est-ce que tu te rends compte de ce que tu es en train de me dire ? C'est pas un geste romantique le suicide Johanna. On est pas dans Paracelsus et Perenelle. Tu es complètement folle. Complètement inconsciente.

Joe allait lui répondre qu’elle y avait pensé simplement parce que la vie n’aurait pas eu la même saveur sans la personne pour laquelle son cœur battait, qu’elle ne supporterait pas de vivre sans elle, qu’elle n’avait qu’elle dans sa vie et que sa famille l’avait rejeté il y a bien longtemps déjà… Elle n’en avait que faire des opinions des êtres pour qui elle devait soit disant avoir le plus de respect et d’amour… Elle ressentait juste de l’indifférence et du dégoût à leur égard. Ce qu’ils pouvaient penser d’elle, elle s’en battait l’œil avec une pâte de cigale d’Andalousie, et elle était persuadée qu’ils auraient pris la nouvelle de sa mort comme une délivrance. Plus de fille bizarre à souhait, plus de problème. Mais alors qu’elle allait dire tout ça à Ashley, cette dernière prononça une phrase qui mit hors d’elle la blonde d’ordinaire si calme et posée.

Et ta bague ! Si ta bague c'est la promesse que tu te tueras si je venais à mourir, tu peux te la garder. Par les couilles de Merlin, j'ai jamais entendu quelque chose d'aussi stupide sortir de ta bouche.

Joe resta un instant bouche bée avant de se lever d’un bond, d’attraper Ashley par la taille et de la serrer dans ses bras, fermement.

Répète-moi ça ? Stupide ? Promesse ? Ose me dire que tu n’aurais pas fait la même chose si c’était moi qui était couchée dans ce foutu lit d’hôpital ! Ose me dire que tu n’aurais pas tout fait pour me faire sourire à nouveau ! Ose me dire que tu n’aurais pas tout tenté pour me reconquérir ! Ose me dire que tu n’aurais pas songé à me rejoindre si je n’étais pas parvenue à me réveiller ! Ose me dire tout çà et là, oui, je regretterais mon geste et cette bague. Mais là, tu vois, je ne regrette absolument pas. Parce que je te connais assez pour savoir que tu aurais agis en conséquence, que tu aurais trouvé un moyen de me rejoindre si j’étais morte, que tu aurais peut-être même tout fait pour venger ma mort…

Je te connais Ashley. Alors ne me reproche pas quelque chose que toi-même tu aurais fait… Je t’aime, je t’aime, je t’aime ! Ouvre les yeux, je t’en supplie… Je ne veux que ton bonheur et même si pour ça je dois me plier en quatre pour me faire pardonner de ne pas être venue te voir alors que tu mourrais dans un lit blanc et stérile parce que ça m’aurait brisé le cœur, alors je le ferais. Je ferais absolument tout pour voir à nouveau ton visage éclairé d’un rire sincère et j’aimerais que les autres puissent juste lire dans tes yeux : je suis heureuse, je me sens bien. Tu comprends ça ? Je t’aime, Ashley.

Joe relâcha un peu la pression sur sa petite amie et passa une main aérienne dans son dos, effleurant à peine la blessure qui se trouvait sous le tissu. Elle devait remettre Ashley en confiance et pour ça, lui montrer qu’elle ne risquait pas de la blesser en lui touchant à peine le dos… Peut-être que ça marcherait… Si la brune lui faisait confiance. Entièrement confiance. Comme avant…

Le bonheur était tellement abstrait qu'Ashley ne savait même plus à quoi il ressemblait. L'avait-elle jamais su ? Le mystère était entier. Non le bonheur avait beau être le but à atteindre, il restait inaccessible pour les êtres humains. Être heureux ? Oui. La vie humaine était faite pour être remplie d'obstacles, pour que les sentiments qui nous prennent, les uns après les autres, ne restent qu'éphémère. Ashley ne recherchait plus le bonheur depuis longtemps. À présent, elle ne souhaitait que retrouver sa joie de vivre, sa capacité à sourire, son sentiment de sécurité à chaque fois qu'elle était aux côtés de Johanna, sa vie d'autrefois.

Les mots de la jeune femme la frappaient de plein fouet, comme un cognard reçu en pleine poitrine et de ses yeux embués de larmes, elle suppliait Johanna d'arrêter de parler. L'imagination d'Ashley était visuelle et l'image provoquée par les paroles de la blonde lui arrachaient le coeur. Il n'y avait aucun doute que sans le support de sa petite-amie, la préfète se serait effondrée au sol. Trop. C'était trop. Mais elle avait beau se débattre, tenter tant bien que mal de se libérer de l'emprise de Johanna, elle ne pouvait se libérer. Elle ne voulait pas de cette proximité douloureuse, mais elle crevait d'envie de serrer son amie dans ses bras. Pourquoi ? Voulait-elle demander. Pourquoi disait-elle des horreurs pareilles alors qu'elle était déjà au bord du gouffre ? Pourquoi continuait-elle de frapper alors qu'elle était déjà à moitié morte ? Elle ne dit rien, ne fit rien. Son corps ne lui obéissait plus, mais ses yeux lui criaient d'arrêter. C'était un supplice. Tais toi !! voulait-elle crier. Elle se contentait de ravaler ses sanglots. Il n'y avait rien à dire. Absolument rien à dire. La réalité était telle qu'elle était et Ashley n'avait pas la force de la nier. Si leurs places avaient été inversées, il n'y avait aucun doute dans l'esprit de la préfère, qu'elle aurait trouvé un moyen de se tuer. L'aurait-elle fait ? Probablement pas. Aurait-elle continué à vivre ? Certainement pas.

Ses yeux rivés au sol se relevèrent lorsqu'elle sentit Johanna frôler sa cicatrice. Ses muscles lui criaient de se détendre. Elle tremblait. « Ne touche pas ça. » Supplia-t-elle. Son dos la dégoûtait, lui rappelait les mots de Callista et elle ne voulait pas entendre la voix de son ennemie, pas ce soir. Elle ferma à nouveau les yeux, quelques secondes, le temps pour elle d'enrouler ses bras autour de la taille de Johanna et de caler sa tête dans son cou. Elle ne voulait plus parler, plus pleurer. Elle était fatiguée, épuisée. « Promet moi. » sa voix n'était plus qu'un murmure, mais suffisamment audible. « Promet moi » répéta-t-elle.

Elle qui vivait dans la peur constante que Johanna ne la quitte, elle qui avait tout fait pour la chasser, n'avait plus envie de se battre. Il ne suffisait plus qu'à la blonde de répéter sa promesse, pour qu'Ashley puisse enfin dire oui.

Ne touche pas à ça

Joe retira sa main après avoir caressé une dernière fois la cicatrice sous le tissu. Peut-être que la brune ne voulait pas qu’on touche à son dos mais la blonde devait lui redonner confiance en elle. C’était vital. Si Ashley ne retrouvait pas rapidement le sourire et la joie de vivre, elle allait continuer à dépérir sans que Joe puisse y changer quoi que ce soit. Et ça, la blonde ne pouvait s’y résoudre. Elle vit sa petite amie fermer ses yeux et sentit deux bras s’enrouler autour de sa taille. Joe referma ses bras autour du cou et posa son menton sur le sommet du crâne d’Ashley. Un souffle calme effleurait la peau fine du cou de la blonde et la chatouillait mais elle ne bougea pas, profitant du moment de calme que lui offrait enfin la brune.

Promet-moi… Promet-moi…

Une voix douce, à peine audible. Joe n’était pas sûr d’avoir bien entendu mais à la répétition de la demande, elle sut ce qui lui restait à faire. Elle détacha doucement les bras de la brune de son corps, l’éloigna un peu et planta son regard dans les yeux si foncés d’Ashley. Qui a dit que les yeux bruns étaient moins beaux que les yeux bleus ou verts ? C’était des conneries…Le regard d’Ashley était tellement magnifique, surtout quand il était rempli d’étoile. Ce n’était peut-être pas le cas en ce moment, mais cela n’empêchait pas la blonde d’être follement amoureuse de la préfète.

Ashley, écoute-moi bien. Cette cicatrice dans ton dos, elle ne me dégoute pas. Elle fait partie de toi et tout ce qui fait partie de toi, je l’aime à sa juste valeur. Je te promets de ne plus jamais t’abandonner, de ne plus jamais te laisser tomber, de toujours être là pour toi et de te soutenir, quels que soient tes choix. Je serais toujours présente pour toi, pour que tu puisses me parler quelle que soit l’heure. Tu m’as bien comprise ?

La blonde attendit le hochement de tête, discret, d’Ashley et ressortit la bague de sa poche. Elle ré-ouvrit l’écrin et reposa un genou à terre. Elle planta son regard dans celui de sa petite amie et, avec un léger sourire, changea légèrement sa formulation de tout à l’heure.

Ashley Lakefield… Est-ce que tu veux bien devenir ma fiancée, pour que je puisse te prouver tous les jours mon amour pour toi et toujours être là, à tes côtés, et te soutenir quoique tu choisisses de faire ? Est-ce que tu acceptes de me laisser entrer dans ta vie et dans ton cœur à durée indéterminée ? Est-ce que tu veux bien faire de moi la femme la plus heureuse au monde ?

L'être humain peut trembler de manières tellement différentes qu'il était difficile de toutes les connaître. Le corps pouvait trembler de peur, de rage, de plaisir, de surprise, de douleur, de désir … des sentiments qui malgré nos violentes batailles, nous contrôlent. Ashley tremblait, mais elle ne savait pas pourquoi. Des larmes silencieuses venaient mourir aux coins des lèvres gonflées de la préfète alors que Johanna lui demandait sa main.

Elle avait 16 ans, en toute logique, elle ne connaissait rien à la vie. Elle vivait la guerre certes, mais quelle expérience avait-elle en amour, hormis ce qu'elle avait appris avec Johanna ? Elle avait seize ans, il aurait été logique qu'elle dise non. Mais elle avait seize ans et elle savait ce qu'elle voulait. Sa gorgée s'était nouée sous l'émotion, ses mains tremblaient comme des feuilles en train de tomber de leur arbre, son coeur battait avec un entrain renouvelé et le sourire qu'elle portait était capable d'éblouir un aveugle. Sans vraiment trop y réfléchir, elle se mit à genoux, prit la boîte des mains de Johanna pour la poser par terre avant de poser ses mains sur les joues de la belle blonde. « Oui » murmura-t-elle. Il n'y avait pas besoin de crier, ni de parler à voix haute. Le murmure était intime, timide presque, mais il était là et la Gryffondor ne comprenait plus pourquoi elle s'était énervée auparavant.

Son doigt caressait la peau douce de sa ... fiancée ? Il lui faudrait du temps pour s'y habituer, mais cela ne la dérangeait pas. Son doigt caressait donc la peau de Johanna et il ne fallut pas attendre plus longtemps pour sceller la promesse par un baiser. Ashley laissa glisser ses mains jusqu'au cou de la jeune femme et en profita pour se rapprocher un peu plus d'elle. Pas question que leurs corps entiers ne soient pas en contact. Le baiser au début si tendre, devenait plus enflammé et l'oxygène commençait à manquer. Sous l'insistance de ses poumons qui commençaient à la brûler, elle arracha ses lèvres de celles de Johanna pour les poser sur les moindres parcelles de peau qu'elle pouvait atteindre : joue, tempe, mâchoire, menton, cou, tout y passait. Ses genoux lui faisaient mal cependant et quoi de mieux pour célébrer des fiançailles que de s'allonger dans l'herbe avec sa futur-femme ?

Sourire toujours accrocher aux lèvres, mais toujours haletante, elle laissa Johanna prendre place au-dessus d'elle. Une manière de s'assurer que rien d'autre que le tissu et le sol toucherait son dos certes, mais surtout une manière d'être plus confortable.

La blonde attendait une réponse et vit les larmes dévalées sur les joues de son amour avant que cette dernière ne se mette à sa hauteur, lui prenant la boite des mains et la posant par terre avant de prendre le visage de Joe entre ses mains. La plus âgée n’avait pas recommencé à respirer et attendait une réponse, claire, car là ce geste pouvait dire une multitude de choses, y compris que c’était non. Haussant un sourcil, Joe avala une gorgée d’air avant que la brune n’ouvre la bouche pour lui répondre.

Oui

Un simple oui, un petit oui, un oui à peine chuchoté. Pourtant, il résonna dans l’air calme de la salle et remplie le cœur de Johanna de joie, se répercuta dans sa tête et elle se le répéta en boucle pendant ce qui lui sembla une éternité avant qu’Ashley l’embrasse à pleine bouche. Les deux filles ne prenaient même pas la peine de respirer, profitant pleinement de la proximité de leurs corps. Les doigts d’Ashley glissaient comme de l’eau sur la peau de la blonde et au moindre contact, celui-ci semblait s’électrifier un peu plus. Les mains de Johanna touchaient, effleuraient, la moindre parcelle de peau disponible, rappelant à son corps que cette peau si douce était à elle, entièrement à elle. Dieu qu’elle aimait cette fille…

A bout de souffle, les deux filles séparèrent leurs lèvres, plus par contrainte que par choix. Johanna aurait pu continuer à embrasser l’hispanique jusqu’à la fin de sa vie si ses poumons n’avaient pas crié grâce. Les lèvres d’Ashley ne quittèrent pas la peau de la blonde pour autant, goûtant à la moindre parcelle de peau, glissant sur ses tempes la faisant frissonner. Comment la brune pouvait-elle ne pas savoir l’effet que lui faisait ce geste ? La jeune femme allongea sa fiancée dans l’herbe et laissa ses mains glisser sur la taille fine de la brune, continuer son chemin jusqu’à caresser la cuisse de l’hispanique, doucement, aussi légèrement qu’une plume. Mais elle ne remonta pas, ne sachant pas si Ashley voulait aller plus loin. La blonde se décolla un peu d’Ashley et fixa ses yeux dans ceux, étincelants, de la brune. Un sourire tira leurs lèvres au même instant et Johanna reposa sagement sa main à côté de la tête d’Ashley, prenant appui dessus pour se décoller encore un peu d’Ashley, jouant à embrasses-moi si tu peux en effleurant ses lèvres contre celles de la cadette.

Je t’aime