| Hudson K. Higgs Docteur mamours | | In for a penny, in for a pound [Isis] ce message a été posté Jeu 23 Juin 2011 - 9:46 Un vent frais caressait son visage apportant avec lui les effluves de la dernière pluie. Une délicieuse odeur d’herbe mouillée, de pâturages et de terre cultivée. Il régnait dans le comté de Dartmoor une tranquillité champêtre. Un charme que n’avait pas la capitale, bruyante et en perpétuelle effervescence. Les mignonnets cottages de Widecombe-in-the-Moor lui plaisaient. Ils ravivaient en elle son esprit romanesque et lui donnaient une impression de paisible accomplissement de soi. Ce paysage idyllique bercé par le chant d’un courant d’eau proche correspondait à ses aspirations bien qu’elle sût son cœur préféré l’agitation de Londres. Elle se sentait davantage à son aise parmi la société. Celle-ci créditait ses faux-semblants sans le moindre soupçon tandis que les habitants de la province y auraient accordé plus d’intérêt. Lorsque d’un pas mesuré elle arriva devant une magnifique grille de fer elle sentit ses résolutions vaciller. Le manoir se dressait devant elle dans sa grandeur majestueuse. Sa façade élégante et soignée laissait son esprit imaginé avec allégresse les trésors de beauté de son intérieur. Il se dégageait du domaine l’aura des familles nobles. Imposante et redoutable.
Un sentiment de nostalgie étreignit sa poitrine. Sa résidence d’antan ne possédait certes pas la même envergure mais elle en avait quelques attraits dont la finesse et la distinction. Les raisons de fuir la demeure des Lestrange s’amoncelaient peu à peu jusqu’à l’écraser sous le poids de l’humiliation qui malgré maintes réflexions ne s’amenuisait pas. La naissance et ses privilèges laissaient des marques indélébiles. Hudson l’avait apprit à ses dépends au fil des années.
Sept ans s’étaient écoulés depuis qu’elle avait quitté Poudlard. Sept années durant lesquelles, elle ne vit, ni ne prit contact avec Isis Lestrange. Cela ajoutait un peu plus à son malaise. Par ailleurs, elle n’avait aucune idée de la façon dont l’héritière avait changé. C’était sur une pente sinueuse et glissante qu’elle s’engageait telle une aveugle car Isis était de toute évidence sa seule chance de parvenir à réaliser son projet. Celui-là même pour lequel elle était prête à sacrifier un peu plus de sa fierté encore. Elle se sentait honteuse qu’un appel à l’aide entaille sa fierté autant. La raison lui rappelait combien ses sentiments étaient insipides et absurdes. La fierté comme l’orgueil à leur culminance n’étaient que des barrières à l’apparence insurmontable. Ils n’étaient que de nobles prétextes, confortables et douillets, pour se cacher d’une insalubre vérité.
Arrivée à la porte, Hudson leva sa main, puis la rabaissa. Elle recommença ce même mouvement plusieurs fois, si bien qu’elle finit par se trouver ridicule. Au dernière nouvelle Isis ne mange personne… eux dernières nouvelles, se morigéna-t-elle. Aussi, elle tira la sonnette. Son cœur fit un bond dans sa poitrine. Son sort était à présent à la disposition d’Isis à son plus grand déplaisir. Cette pensée la torturait jusqu’à la déchirer de l’intérieur. Et c’était parce que son orgueil était trop grand qu’elle souffrait tant. Cette conscience de son état ne l’aidait guère. Peut-être même la freinait-elle car elle lui donnait l’impression de nager à contre-courant. Elle avait ainsi dépensé quantité d’énergie à se raisonner et se préparait à en utiliser davantage encore afin de convaincre Isis de ses convictions. Tout va bien se passer, tout ira bien, se répétait-elle quand un homme de grande taille lui ouvrit.
- Que puis-je pour vous mademoiselle, demanda-t-il du ton poli. - Je souhaiterais m’entretenir avec Mademoiselle Lestrange. Pourriez-vous lui faire savoir que Mademoiselle Higgs est ici, répondit-elle d’une voix calme et assurée en soutenant le regard du majordome. D’un geste précautionneux il s’effaça devant elle pour qu’elle puisse pénétrer le manoir. - Bien Mademoiselle. Je vais l’avertir de votre présence.
Il se retira après une légère révérence, la laissant seule dans l’immense hall. Des tableaux étaient accrochés aux murs, révélateurs du prestige de la famille. Elle s’absorba alors dans leur contemplation et jugea que si la résidence était peuplée de tant de chef d’œuvres, elle avait l’étoffe d’un véritable musée historique. Le calme de la demeure lui rappela encore le souvenir de son ancien foyer. L’atmosphère n’était sûrement aussi froide qu’elle se la présentait seulement son passé refaisait surface. Il resurgissait dans ses rêves et les lieux qui leur furent familiers de façon récurrente depuis sa récente confrontation avec son frère. Ce souvenir encore poignant la ramena au temps présent. Elle ne pouvait se laisser aller à la faiblesse, il en allait de sa dignité. Son attention fut retenue par une peinture du village à l’automne. Elle apprécia les couleurs ocre et orangées qui apportaient de la chaleur au tableau ainsi qu’un agréable sentiment de convivialité. |
| | | Re: In for a penny, in for a pound [Isis] ce message a été posté Lun 11 Juil 2011 - 15:48 Les rideaux blancs voilant l’ouverture des fenêtres ondulèrent et cliquetèrent légèrement contre les tringles lorsqu’une bourrasque de vent s’engouffra dans le bureau du deuxième étage du manoir Lestrange. Deux ou trois parchemins empilés les uns sur les autres firent alors mine de vouloir s’envoler avec la brise mais une main vint sèchement s’aplatir sur eux pour les maintenir en place, réduisant à néant ces vains espoirs de liberté. Isis n’avait même pas relevé les yeux de l’épais grimoire sur lequel elle était penchée. Attablée devant un secrétaire au même style ancien et boisé que le reste de la pièce, la jeune femme était plongée dans sa lecture au point qu’elle semblait sourde et aveugle à ce qui se passait autour d’elle. Non que la quiétude planant sur les lieux produise grandement matière à s’émouvoir, mais un hippogriffe aurait pu se tenir à ses côtés depuis plusieurs minutes que la demoiselle ne l’aurait probablement pas remarqué. Ses sourcils étaient légèrement froncés par la concentration et creusaient un pli au milieu de son front. Les seuls instants où elle relevait le bout de son nez des pages noircies étaient pour plonger la pointe de sa plume dans l’encrier et griffonner aussitôt quelques notes sur un petit carnet. Ce manège durait depuis le début de la matinée. Depuis qu’elle savait qu’elle participerait aux fouilles devant se tenir à Pré-au-Lard d’ici le mois d’Août, Isis aménageait fréquemment dans son emploi du temps des plages horaires destinées à étudier les mœurs et les anciennes pratiques celtiques, mais à mesure que la date fatidique se rapprochait son exigence avait tendance à se transformer en obsession. Elle était ainsi, elle voulait être certaine de connaître son sujet sur le bout des doigts pour ne pas risquer de se ridiculiser à la moindre complication. Une Lestrange se retrouver comme un dragon sans ailes ? Il n’en était pas question. Elle était en train de parcourir les lignes d’un chapitre narrant les prémices du druidisme lorsque le gong grave de l’entrée retentit à deux reprises et résonna entre les murs du manoir. Isis avait toujours eu horreur de cette sonnette peu discrète qui donnait l’impression d’être venue des profondeurs de la terre. Comme à l’accoutumé elle sursauta, et elle laissa filer un juron entre ses dents en découvrant la rature qui en résulta sur ses notes. Qui que ce soit, la personne responsable de cette bévue venait déjà de s’attirer l’agacement de son hôte mais, avec un peu de chance, si elle ne se manifestait pas, peut-être que ses domestiques ne la trouveraient pas et seraient dans l’obligation de renvoyer l’opportun. La demeure était assez grande pour ça avec ses trois étages, ses combles, et ses pièces à ne plus savoir quoi en faire. Malheureusement, si Isis parvenait facilement à se cacher de ses serviteurs, ce n’était pas le cas de Mary, son intendante, qui avait le don pour la débusquer où qu’elle se trouve. Déjà lorsqu’elle était enfant et qu’elle ne voulait pas passer à table, c’était elle qui la retrouvait dans un placard ou dans une malle du grenier. Ce ne fut donc pas une surprise pour la sang-pur lorsqu’elle entendit la voix de la vieille femme lui demander la permission d’entrer derrière la porte. _ Je suis désolée de vous déranger mais mademoiselle Higgs vient de s’annoncer et demande après vous. Elle vous attend dans le hall._ Higgs ?! interrogea Isis sans masquer sa surprise. L’intendante qui avait été invitée à pénétrer dans le bureau un moment plus tôt hocha la tête et le visage de la jeune femme s’assombrit alors sous l’effet de la réflexion. Mademoiselle et non madame, il s’agissait donc de Hudson. Mais cela faisait sept ans qu’elle ne l’avait plus vu et de toute manière elles n’avaient jamais été amies alors qu’est-ce qui la poussait à lui rendre visite ? Sans s’être annoncée au préalable qui plus est. Vous savez les raisons qui l’amènent ici ?_ Non, je vous en aurais aussitôt fait part dans le cas contraire. Elle aurait dit vouloir "s’entretenir avec vous" mais elle n’a pas précisé sa requête. Si vous voulez je peux lui demander de repasser plus tard ou lui dire que vous êtes absente._ Non, non, ça ira, je vais descendre ! Vous pouvez faire passer mademoiselle Higgs dans le petit salon du rez-de-chaussée ? Le temps de mettre de l’ordre dans mes papiers et je suis à elle.Mary s’inclina et sans un mot de plus elle s’effaça pour aller exécuter la tâche que sa maîtresse venait de lui confier. De son côté, cette dernière poussa un soupire en jetant un œil au petit désordre qui régnait sur la tablette du secrétaire. Elle n’arrivait pas à savoir ce que la Higgs lui voulait et cela ne lui plaisait pas. Elle n’aimait pas l’idée de devoir échanger avec elle des civilités jusqu’à ce qu’elle daigne bien vouloir la renseigner. Isis n’allait toutefois pas se laisser déstabiliser par une ancienne aiglonne ! Dans un enchaînement assez rapide, elle rassembla alors les parchemins qui traînaient devant elle et les glissa dans une chemise, puis elle arrangea un minimum sa coiffure en observant son reflet dans un miroir avant de finalement quitter les lieux. Sa démarche était sereine et son masque impassible était bien en place sur son visage lorsqu’elle pénétra dans le petit salon où l’attendait son invitée surprise. _ Je n’aurai jamais pensé que je finirais par te manquer, Hudson, mais bienvenue chez moi. Je remarque aussi que Victor a oublié de te demander de lui remettre ta baguette… On va dire que je t’accorde une exception en souvenir du bon vieux temps.Isis avait opté pour le tutoiement mais elle se garda bien de tendre sa main vers son interlocutrice. À la place, elle lui fit signe de s’assoir sur le canapé qui se trouvait près d’elle tandis qu’elle-même prenait place dans le fauteuil qui lui faisait face. Elle doutait que Hudson se formalise de cet accueil. La Lestrange avait toujours été distante et ce n’est pas le passage à l’âge adulte qui aurait changé cela. Mais alors que les deux sang-pur se faisaient face, Mary réapparut en tenant un plateau d’argent entre ses mains. Un service à thé ainsi qu’une assiette de biscuits y trônaient avant que la domestique ne les dispose sur la table où la théière se mit toute seule en action afin de remplir deux tasses d’un liquide fumant à la sombre couleur brunie. Isis la remercia puis elle se tourna à nouveau vers son ancienne camarade de classe, pas stupéfaite par la singularité du tableau mais presque. _ Je peux savoir ce qui t’amène ? Certainement pas une simple visite de courtoisie je suppose. |
| Hudson K. Higgs Docteur mamours | | Re: In for a penny, in for a pound [Isis] ce message a été posté Lun 1 Aoû 2011 - 11:38 Absorbée dans sa contemplation, elle se retourna dans un sursaut quand elle entendit une voix derrière elle. « Mademoiselle Lestrange vous prie de l’attendre dans le salon. Si vous-voulez bien me suivre Mademoiselle Higgs. » La médicomage acquiesça et la vieille dame la conduisit sans plus un mot dans une petite pièce décorée avec beaucoup d’élégance. Elle n’eut à patienter seule dans le petit salon qu’une poignée de minutes. Celles-ci lui parurent pourtant durer une éternité. L’anxiété, en effet, étendait à chaque seconde passée seule avec ses pensées, son empire lui dérobant toujours plus de son calme. Mais l’attente était pire encore. Elle laissait le temps à de nouveaux troubles de jaillir insidieusement dans l’esprit à l’imagination fertile de la sorcière. Certaines combinaisons faisaient miroiter des issues plus propices que d’autres, néanmoins elle ne préférait pas leur accorder davantage de crédit.
Quand la maîtresse de maison fit son entrée, le flot de ses pensées s’estompa jusqu’à mourir en silence dans un coin de son cerveau telle une vague s’affaisse sur la plage pour se laisser happer par le sable assoiffé. Son regard se porta naturellement sur Isis qu’elle dévisageait avec la curiosité réprimée qu’imposait la bienséance. Ce ne fut pas son faciès délicat qui retint l’attention de la jeune Higgs mais l’aura presque glaciale qu’elle dégageait et qui imposait à la fois respect et crainte. Elle lui trouva toutefois un air plus doux qu’autrefois, mais à peine cette impression eut-elle prit forme dans son esprit que les propos de la Lestrange la démentir vivement. Eh bien si les quelques visiteurs de la demeure se voient dépouiller de leur baguette à leur arrivée, je parierais gros qu’ils ne font pas long feu ici, pensa-t-elle tandis qu’elle se rappelait la méfiance, presque aussi légendaire que sa famille, de l’héritière. Ses longs doigts effilés effleurèrent sa baguette avec soulagement. Toute sa dignité était, par sa venue au manoir, mise à rude épreuve et il ne faisait aucun doute que désarmée elle ne serait restée guère plus de temps que pour d’insipides et mielleuses salutations. « J’en suis honorée », avait-elle répondu d’une voix qui se voulut humble mais qui se laissa sciemment trahir d’un soupçon insolent. Elle ponctua sa réplique d’un sourire mutin tout en s’installant confortablement dans le fauteuil qu’Isis désignait et reprit d’un ton amical : « Le domaine est magnifique… Comme il doit être agréable d’y vivre ! » Elle se tut un instant quand l'intendante vint porter le thé puis elle continua avec admiration « Les tableaux dans le hall sont superbes ! J’ai particulièrement apprécié celui du village en automne. » L’ancienne Serpentarde coupa rapidement court à l’expression de son extase et s’enquit du motif de sa visite. Son empressement autant que sa perspicacité tira un sourire équivoque à l’aiglonne qui perdit légèrement de ses couleurs. « Naturellement », obtempéra-t-elle dans un souffle étranglé par la sensation que sa gorge s’était subitement asséchée. Buvant une gorgée de thé, elle reposa sa tasse sans se presser et releva ses yeux clairs sur la sorcière dont elle sentait le regard pesé sur chacun de ses mouvements. Elle la considéra un long moment, ses yeux plantés dans les siens, comme pour sonder son esprit car bien qu’intimidée par la placidité de son hôte, elle ne pouvait laisser paraître sa gêne. Une seconde elle songea se soustraire à sa requête dont les mots lui brûlaient les entrailles mais son orgueil l’en empêcha ; il était bien trop tard pour faire marche arrière. Par ailleurs, elle estimait être de bon augure le fait d’avoir été reçue et l’intérêt, même froid, qu’il fut accordé à sa visite.
« Je souhaite tout d’abord te présenter mes sincères excuses pour cette incorrection, je n’aurais pas dû venir sans m’être annoncée, » commença-t-elle avec repentir. Elle préféra laisser les justifications à d’autres car celles-ci, elle en était convaincue, n’auraient été que simples fioritures ajoutant à sa culpabilité. « Je suis venue solliciter ton aide. Notre monde se déchire entre des intérêts différents et les victimes des évènements passés et à venir ne sont autres que nous tous, sorciers. Ste. Mangouste est débordée et l’hôpital ne peut pas accueillir tous les patients blessés par quelques manigances politiques. Et, disons les choses clairement, nous sommes en pleine guerre civile. Par ailleurs lors d’attentats comme ce fut le cas sur le Chemin-de-Traverse il est impossible de traiter tous les patients en même temps. » Tout en parlant, elle évaluait son interlocutrice de regard, à l’affut de la moindre réaction. Elle ne désirait pas faire d’imprudence, consciente qu’un seul mot pourrait lui être fatidique. L’analyse du visage marmoréen d’Isis se déroba à la mémoire de l’hécatombe d’avril. Les images défilèrent dans sa tête, désordonnées et si vives, qu’il lui semblait que tout s’était passé la veille. « Je souhaiterais établir un dispensaire à Londres mais pour cela j’aurais besoin de ton soutien financier, » conclut-elle d’une voix grave, en tentant vainement de chasser le sentiment d’injustice qui grandissait en elle à mesure que ses souvenirs refaisaient surface. La colère prit le pas sur sa honte, bien plus féroce, car depuis de longues années nourrie par d’âpres constations. Seul le rouge qui lui était monté aux joues et la lueur farouche de ses prunelles en témoignaient alors que ses traits demeuraient impassibles. Il lui était inconcevable d’écorcher davantage sa fierté, aussi n’était-ce pas sur le ton de la supplique qu’elle s’était exprimée mais sur celui de la résolution. |
| | | Re: In for a penny, in for a pound [Isis] ce message a été posté Mar 2 Aoû 2011 - 21:04 Isis observait son ancienne camarade d’école d’un regard particulièrement intense, se souciant peu de la gêne que cette attention aiguisée pouvait faire naître chez elle. Son œil vif et alerte était semblable à celui d’un aigle dominant le ciel, elle scrutait le moindre de ses gestes, saisissait le moindre tressaillement de ses lèvres, et lorsqu’elle embrassait la pièce du regard pour vanter les attraits de la demeure et de son domaine, son visage ne se départait en rien de son impartiale froideur. Elle ne cillait pas. C’est à peine si elle se contenta d’un vague geste de la main n’ayant de sens que celui que sa destinataire voudrait bien lui donner. Il pouvait témoigner d’un remerciement effacé comme de son impatience. Elle-même n’avait qu’à moitié conscience de cette aura à la fois suave et inquiétante que son silence faisait planer au-dessus de leur tête, mais elle n’y aurait probablement pas prêté plus d’attention dans le cas contraire. L’héritière des Lestrange avait hérité de la superbe et de l’arrogance de sa caste, il coulait dans ses veines tout le bleu de la vieille Angleterre et cela se sentait. Elle transpirait l’assurance octroyée par les privilèges qui l’avaient placé au-dessus du commun des mortels. En cela, elle était différente de la médicomage assise devant elle. Hudson était faite de feu plus que de glace, elle ne se laissait pas intimider par la force symbolique écrasante qui émanait des murs entre lesquels elle se tenait, jamais elle n’aurait accepté de céder à la force, mais sa fierté se parait inéluctablement de beaux principes, aussi stupides qu’inutiles, qui lui donnaient un air coupable. Elle se reprochait ce qui la rendait incomparable. Isis jubilait presque à l’intérieur tandis qu’une intuition inexplicable s’insinuait doucement en elle. À l’époque où elles foulaient toute les deux le sol de Poudlard elle avait toujours eu la sensation désagréable que l’aiglonne se tenait dans son ombre et guettait le moindre de ses gestes, mais il suffisait que cette présence fantomatique devienne quasiment palpable pour que ses doigts ne se referment que sur du vent. Elle l’observait parfois à l’heure des repas, depuis la table de sa maison, ou lorsqu’elle étudiait à la bibliothèque, mais jamais elle ne relevait les yeux vers elle. Elle était devenue une énigme dérangeante, un de ces petits riens qui accapare pourtant l’attention avec la même facilité qu’un caillou dans une chaussure ou qu’un brin de paille coincé entre les dents. Isis n’était pas une bonne perdante, elle avait détesté voir Hudson quitter l’école sans avoir réussi à trouver le courage de se planter devant elle et de lui demander une fois pour toutes ce qui clochait chez elle. Ce sentiment avait de nouveau surgit du passé lorsque son intendante l’avait averti de sa visite, mais elle se rendait compte maintenant que le charme était brisé. Elle regardait son aînée boire une gorgée de thé chaud, et elle devinait sous ses airs paisibles le malaise qu’elle éprouvait à se tenir ici comme si de rien était. Le serpent se délectait de cette souffrance muette, elle avait le goût sucré d’une douce revanche d’autant plus exquise qu’elle en savourait chaque seconde avec une lucidité presque cruelle. Son visage restait imperturbable pourtant, il n’y avait pas de sourire moqueur aux coins de ses lèvres ni de malveillance dans son regard. Elle était plus sournoise que cela, de Serpentard elle n’avait pas hérité l’insolence mais la patience de parvenir à ses fins. Elle écoutait alors tranquillement le plaidoyer de son interlocutrice tandis que dans sa tête mûrissait déjà la façon de blesser son adversaire. Une morsure qu’elle savait d’avance inévitable et douloureuse. L’attention polie avec laquelle l’archéologue suivait les paroles de la médicomage s’enrichit d’une certaine surprise lorsqu’elle attint finalement la raison principale de sa venue. Sur le fond elle ne pouvait qu’être d’accord avec ce qu’elle avait elle-même remarqué, le régime qui avait bercé leur existence était au plus mal et c’est l’entièreté de la communauté magique qu’il entraînerait avec lui dans sa chute, mais elle avait du mal à saisir où Hudson la plaçait dans cette histoire. Jusqu’à ce qu’elle lui évoque son projet : bâtir un dispensaire en plein cœur du Londres sorcier afin de venir en aide aux patients que Sainte-Mangouste ne pouvait accueillir. Isis arqua un sourcil. L’aiglonne avait-elle véritablement fait le déplacement après toutes ces années de silence, et alors qu’elles n’avaient jamais été proches, pour lui demander… son argent ? En soutenant son regard elle comprit que l’incongruité de sa requête n’en faisait pas moins une réalité. La détermination qui faisait flamboyer le bleu d’ordinaire si limpide de ses yeux lui conférait une hargne nouvelle qu’elle ne lui avait jamais vue. Elle vantait son honneur, mais la juste colère n’était qu’un noble sentiment de plus. Seule, elle était dérisoire, elle ne pouvait pas venir à bout de tous les obstacles que la vie prenait un malin plaisir à mettre sur leur route. Contre toute attente, Isis explosa de rire après dix secondes d’un silence impénétrable. Son corps se plia légèrement vers l’avant et sa main vola alors jusqu’à sa bouche pour essayer d’étouffer l’oiseau incontrôlable qui s’échappait de son corps et virevoltait autour de la pièce. _ Pardon, articula-t-elle avec sincérité lorsqu’elle réussit enfin à reprendre son souffle assez longtemps pour parler sans interférence, c’est simplement que je ne m’attendais pas à ça. Quand on m’a annoncé ton nom j’étais incapable de savoir ce que tu me voulais, ça me stressait un peu même je dois dire, mais là... Je suppose que c’est donc vrai, ce que l’on raconte.Sa dernière phrase avait tranché l’air comme un couperet. L’héritière des Lestrange échappa encore un ou deux gloussements tandis qu’elle séchait une larme d’euphorie perlant au coin de son œil, mais il était trop tard pour enrailler la machine. Le serpent venait de se dresser de toute sa hauteur, prêt à siffler et à cracher son venin. La tentation était trop forte, l’occasion trop belle. Isis reprit le contrôle d’elle-même avec une facilité déconcertante une fois le gros du fou rire passé. Elle se redressa avec une lenteur calculée et prit le temps de boire une gorgée de thé avant de planter ses yeux sombres dans ceux de son interlocutrice. _ Les Higgs n’ont peut-être pas la fortune de ma famille, c’est vrai, mais ce n’est pas eux qu’on irait plaindre en premier pour autant. C’est à se demander pourquoi leur fille aînée irait tendre la main vers quelqu’un d’autre. À moins, évidement, que les rumeurs soient vraies et qu’elle soit en disgrâce. Il paraît que Carmela Higgs ne veut plus entendre parler du vilain petit canard qui a fait ses bagages pour aller sympathiser avec les sangs impurs.Hudson était intelligente, elle savait à quoi elle s’était exposée en venant ici. Descendre dans la fosse aux serpents de son plein gré c’était accepter l’idée de perdre quelques plumes en échange de son audace. Pourtant Isis s’était retenue de frapper là où elle savait que cela ferait le plus mal. Elle s’était retenue de mentionner l’amour perdu d’une mère qui lui avait préféré un frère uniquement parce qu’il perpétrait le sang de sa famille et pas elle. Peut-être était-ce en partie parce qu’elle aussi la vie lui avait ravi cet amour… Elle n’agissait pas dans le but de faire fuir l’ancienne Serdaigle de toute façon, ou de provoquer sa colère, elle taquinait simplement, mais parce que cela était dans sa nature. Devançant la réaction de son interlocutrice elle leva alors devant elle une main autoritaire, lui indiquant clairement qu’elle préférait qu’elle ne relève pas ce qu’elle venait de dire au risque de les entraîner dans une conversation stérile. Le silence fut rompu par le cliquetis de sa tasse lorsqu’elle la reposa sur sa coupelle. _ Je me fiche de tes histoires de famille comme de tes états d’âme, je te rassure, reprit-elle d’une voix calme mais ferme, mais j’aimerais que tu m’explique pourquoi je devrais accepter de te venir en aide alors qu’il pourrait être très malvenu pour une personne comme moi d’associer mon nom à quelqu’un comme toi. Et ne t’insultes pas toi-même en me disant que tu ne vois pas de quoi je veux parler. |
| Hudson K. Higgs Docteur mamours | | Re: In for a penny, in for a pound [Isis] ce message a été posté Mer 10 Aoû 2011 - 12:35 Dans le silence imperméable, son cœur tambourinait dans sa poitrine tel un métronome déréglé alors que son regard demeurait grave. Son cerveau était plein de ce rythme entêté, de réflexions enchevêtrées et encombrantes, quand soudain il n’y eut plus rien. Seul l’éclat détaché, enjoué et riant de l’héritière résonna clair et abscons. Un battement s’égara au-dessus de son estomac, interloqué dans une seconde affolée par l’inopinée euphorie. Le pouls, en bon percussionniste, reprit cependant son rythme s’habituant à la mélodie sans pour autant s’y accorder. Deux chants se faisaient échos. Les tonalités, les nuances, les pupitres se rencontraient sans se mêlés les uns aux autres. Deux chefs d’orchestres, deux morceaux. Une dissonance d’une beauté harmonieuse et fragile : c’était un dialogue sourd sur une note entendue. C’était avec un détachement surprenant qu’elle observait le curieux concert. Spectatrice, elle s’intéressa à la jeune Serpentarde avec une impavidité colorée de ravissement ; elle la trouva adorable ainsi démasquée, sans aucune manière. A cet instant elle se rappela toutes les années qu’elle avait passées à veiller sur la damoiselle car c’était justement pour préserver ce naturel foudroyant qu’elle s’était attachée à elle. Zadiste n’avait été qu’un prétexte dont elle s’était servie pour justifier son attention. Un sourire heureux emprunta ses traits fins et balayant les excuses d’Isis, elle se détendit.
Pour faire bonne mesure, elle leva un sourcil interrogateur : qu’est-ce qui était donc vrai ? Elle n’eut pas à feindre l’ignorance car elle ne savait pas avec exactitude ce sur quoi se reposait l’invective et ne préférait pas se rendre coupable d’un fait dont on ne l’avait pas même encore accusée. Elle exultait d’envie d’entendre de sa bouche l’un de ces si nombreux « On-dit ». De sa dextre, elle chassa une mèche brune derrière son oreille, puis croisant ses longues jambes, elle prit une position plus confortable, ses pupilles claires et brillantes d’une curiosité absorbée. Elle fut mi peinée, mi satisfaite de retrouver les petites manies affectées de fille de bonne famille de l’héritière et toutefois distrayantes, car le savoir de l’exercice mondain était un art autant qu’un plaisir. Tout en soutenant avec complaisance le regard de la belle vipère, elle l’écouta telle une enfant écoute le conte préféré de ses parents pour la énième fois : avec pourtant appétit, enchantement et quelques soubresauts de terreurs. Les fables se devaient d’inspirer toujours les mêmes sentiments, ils perdraient de leur charme sinon. L’évocation de sa mère était irrévocablement admirable pour qui voulait dresser les poils de son bras instantanément.
Un sourire rassasié fila sur ses lèvres. L’histoire restait inchangée. En sept ans, elle avait espéré un ou deux rebondissements, mais aussi un plus d’éloquence. Ah comme les langues aiguisées manquaient d’imagination ! Elles savaient siffler aux oreilles délicates avec adresse mais du reste leurs compétences semblaient grandement limitées. Leur interprétation manquait indubitablement de chevaleresque. Il paraît que Carmela Higgs ne veut plus entendre parler du vilain petit canard qui a fait ses bagages pour aller sympathiser avec les sangs impurs. Retournant les mots d’Isis dans sa tête elle s’était arrêtée sur ce passage. Il la faisait passer pour une petite écervelée en pleine crise d’adolescence se rebellant contre la belle veuve. Quelle ironie : Carmella une femme à plaindre ! La jeune Higgs en avait le ventre tout contracté de rires réprimés. Le conte ne changeait pas et son effet sur sa « vilaine » non plus. Carmella Higgs. Une séduisante créature certes, une mère fichtre que non ! Il fallait être naïf pour s’apitoyer ne serait-ce qu’une once sur le sort de ce monstre de cruauté, ou seulement pour croire qu’elle avait laissé partir son enfant, sa possession aussi facilement. A sa façon, elle sut la retenir, la brider dans son élan : elle l’avait fiancée contre son gré. Nathaniel était leur lien, à toutes les deux. Il était celui qui la préservait de ses convictions, celui qui la gardait de fuir sa mère davantage et bien plus encore.
La main qui se leva ne retint aucune parole. Elle n’avait pas l’intention de démentir quoi que ce fut. Le geste tut la révulsion de l’enfant pour la mère qu’elle ne pardonna jamais de lui avoir volé son innocence en abandonnant son masque de beauté le jour du décès de son bien aimé père. Son écœurement resta murer derrière son mutisme. Sa génitrice demeurait un point sensible, seulement dans une mesure dont peu connaissait l’expansion. La rumeur, en y réfléchissant bien, embellit agréablement la vérité, pensa-t-elle. Ses sentiments contradictoires consentirent, alors qu’elle attendait patiemment que son interlocutrice reprît la parole, à s’arrêter sur l’amusement. Le récit rapporté avec une distance polie, n’impliquait aucune certitude personnelle sinon des doutes suggérés avec une exquise subtilité.
« Je constate que tu as bien appris ta leçon à Poudlard, » lui accorda-t-elle. L’évasion feinte fut éclipsée par un sourire charmant : elle était à peu près certaine que l’archéologue comprendrait l’allusion. Dans tout bruit de couloir il y avait une part de vérité, c’était indéniable, mais quelles étaient ses proportions, là résidait la question. Elle observa longuement la Serpentarde. Elle exigeait d’elle une raison à la mesure du symbole de pureté, d’aristocratie et d’allégeance au défunt Lord, dont elle, Isis Lestrange était l’allégorie. Ses yeux s’étirèrent en amande soulignant son sourire mutin. « Eh bien, je pourrais revenir d’ici quelques années et te conseiller de chercher quelques ossements oubliés un peu partout dans Londres. Ça fera les gros titres j’en suis persuadée ! Qu’en penses-tu ? Peut-être alors auras-tu ta réponse,» suggéra-t-elle tout en posant un doigt songeur sur ses lèvres. Son regard distrait prétendit évaluer l’idée puis s’alluma d’une étincelle vive. « Considérons la chose autrement ! Dans l’urgence nous faisons tous ce que l’on peut et pas forcément ce que l’on doit n’est-ce pas ? Et… un sorcier aussi noble qu’il soit, défiguré et méconnaissable, pourrait bien être négligé. Il faut peu de malchance pour que le malheureux soit de tes proches. Enfin, tout cela est théorique voire carrément du domaine de la spéculation, cependant loin d’être improbable. Mais outre mes élucubrations, je te rappelle encore une fois que notre sang coule autant, peut-être même plus, que celui de ces abominations de la nature. Il serait donc judicieux et dans ton intérêt autant que de mon devoir en tant que médicomage de venir en aide aux victimes afin que l’hôpital puisse prodiguer les soins nécessaires et de façon efficace à ses patients les plus nécessiteux. Un service encombré, surchargé est handicapé, sans compter que l’agitation entraîne un stress important que tout le personnel n’est pas capable de tolérer passé un certain seuil. Pourquoi devrais-tu accéder à ma requête ? Pour cette sève sinople qui nous est si chère. Pour tous ceux que tu aimerais protéger. Pour toi. Parce que je ne suis pas la seule de nous deux à avoir des états d’âme. »
Hudson était intimement convaincue qu’en la femme qui lui faisait face, résidait toujours l’adolescente qu’elle avait connue, plus sensible, que ce que les apparences laissaient paraître. Son fou rire passé le prouvait. Par ailleurs, ce n’était pas à l’enfant Lestrange que le monde avait créé qu’elle s’adressait, mais au serpent réfléchi, raisonné et critique qu’elle parlait au risque d’être refoulée avec véhémence. Et, haussant les épaules avec une désinvolture mesurée, elle ajouta : « En toute franchise, s’il te déplaît d’associer ton nom au mien tu peux bien prétendre faire acte de charité. Tu sais combien notre société aime ce genre de dévouement noble : ils auraient l’impression que leur vilain canard retrouve la raison et se pare enfin de son beau plumage de cygne grâce au sauvetage inespéré et à l’appui de l’héritière des Lestrange. Un véritable conte de fée ! Il suffit de peu pour que l’opinion commune se modifie. C’est de bon ton par les temps qui courent. Je sais bien que les devants de la scène ne t’obsèdent pas, mais là encore, pas d’inquiétude les élections t’en éclipseront en un clin d’œil. Voilà pour ton blason, ton honneur, ton âme et conscience et tous nos valeureux principes, Isis. » Dans sa voix vibra les sacrifices qu’elle était prête à faire pour que le nom de l’archéologue ne soit sali par l’assistance qu’elle sollicitait.
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| | | Re: In for a penny, in for a pound [Isis] ce message a été posté Lun 22 Aoû 2011 - 20:33 Son regard se plissa imperceptiblement tandis qu’une ombre noire se propageait dans son cœur. La satisfaction impatiente qu’elle avait d’abord ressentit à l’idée de frapper son interlocutrice de plein fouet se diluait à présent dans la frustration que son sourire affable agitait sous son nez avec une bonhomie proche de l’insolence. Il lui donnait envie de la gifler. Qu’elles soient fondées ou non, ses paroles faisaient planer au-dessus de sa tête tout le poids d’une honte abjecte. Elle aurait voulu la voir se tortiller comme un ver pour y échapper, que ses yeux fuient les siens ou même qu’ils s’embrasent de colère ! Mais la seule réaction dont elle était témoin était cette affligeante courtoisie doucereuse tout à fait indigne du sang qui coulait dans leurs veines. Hudson feignait peut-être avec un grand talent de ne pas s’en rendre compte, pourtant son attitude donnait raison à ces rumeurs qu’elle aurait voulu faire passer pour des inepties. Cette légèreté assumée, voire revendiquée, rendait Isis malade. Elle réveillait en elle un grondement furieux qui s’agitait tel un serpent au creux de ses entrailles. Poudlard lui avait bien appris sa leçon, effectivement, mais jamais elle n’avait permis que les attaques portées à son encontre entachent son honneur, jamais elle n’était restée béate comme une idiote tandis que n’importe quel âne moins bien né qu’elle osait la provoquer de front. Le sourire imperturbable de l’ancienne aiglonne avait le goût amer d’une victoire trop rapidement gagnée, ou celui plus piquant d’un affront porté au cœur même de leur noble lignée. Entre les deux la jeune archéologue ne parvenait pas à se décider, et cette confusion l’agaçait peut-être plus encore que la docilité feinte de celle qui lui faisait face. Une fois de plus Hudson semait le doute dans son esprit et faisait battre ses sentiments à contre temps. Isis s’affaissa jusqu’à ce que la surface moelleuse et réconfortante du fauteuil où elle était assise épouse la cambrure de ses reins. Chaque respiration lui permettait de sentir son dos s’enfoncer très légèrement dans les cousins et de se remplir de la même sérénité pérenne. Elle refusait de laisser Hudson inspirer en son sein des sentiments auxquels elle n’était d’ordinaire que trop étrangère. L’impulsivité, tout comme l’emportement, ne faisaient pas partie de son caractère, et ce n’est pas une impie en disgrâce qui changerait quoi que ce soit à cela. Elle était plus maligne. Avec un effort considérable elle s’efforça alors de ne pas s’agacer des mimiques de son interlocutrice qui s’adressait à elle comme à une enfant de six ans. Ses questions rhétoriques étaient stupides, mais sa manie à vouloir faire vibrer la corde sensible l’était d’autant plus. Elle ne se souvenait pas avoir jamais fait preuve de compassion envers des êtres qui lui étaient totalement indifférent, et ceux qui avaient le privilège de détenir une place dans son cœur se comptaient sur les doigts d’une seule de ses mains. En cela ses grands-parents pouvaient s’enorgueillir de l’éducation qu’ils avaient veillé à lui inculper et qui avait fini par étouffer jusqu’à la dernière étincelle d’innocence ayant bercé son enfance. Rien ne pouvait y changer. Elle ne le voulait pas d’ailleurs. La carapace de glace et de dignité qu’elle avait tissée autour d’elle l’avait si souvent défendu contre une existence bannissant la faiblesse qu’elle ne pouvait imaginer y renoncer. Certainement pas en ce jour en tout cas. Un soupire partagé entre l’amusement et la consternation lui échappa alors lorsque son interlocutrice eut finalement terminé son laïus. Tout du long elle s’était contentée de hocher discrètement la tête ou de marmonner une approbation mais rien ne présageait la douceur avec laquelle elle s’adressa à son aînée. _ C’est mignon. Tu serais vraiment prête à vendre ton âme au Diable pour moi, Hudson ?La tête légèrement penchée sur le côté, Isis s’était de nouveau avancée dans son siège pour se rapprocher de son ancienne camarade. Ses grands yeux sombres étaient comme deux gouffres profonds au charisme troublant mais d’une beauté si innocente qu’ils donnaient envie de s’y noyer sans opposer la moindre résistance. Son regard était celui d’une enfant découvrant le monde pour la première fois, mélangé à l’intelligence d’un serpent angélique osant à peine darder le bout de sa langue entre ses dents. Le temps semblait avoir suspendu son cours au-dessus de leur tête, quant au silence il en devenait presque assourdissant. L’image était trompeuse mais son éclat n’en était pas moins touchant. Isis la laissa s’éterniser pendant un temps indéfini, guettant au plus profond du regard de Hudson la tendresse débordante qu’elle se savait dorénavant en mesure de lui inspirer. _ Mettons que ton plaidoyer pétri de bonnes intentions m’ait ému, reprit-elle brusquement en faisant voler en éclats la bulle qu’elle avait créé, que tous les soirs j’ai du mal à trouver le sommeil parce que je m’inquiète du sort des pauvres gens, mettons donc que j’accepte ta sollicitation. Par acte de charité comme tu dis. Tu accepterais toute sorte de conditions ? Je n’ai pas besoin de te rappeler la marche à suivre en ce qui concerne les sangs-mêlés, mais si je te disais que je ne veux pas que tu perdes ton temps avec des nés-moldu ? Ils ne font pas partie de mes états d’âme, vois-tu.À quoi s’était-elle attendue ? Elle était venue dans l’espoir de lui manger dans la main, cela valait bien quelques concessions. Où l’avait-elle véritablement prise pour une idiote manipulable à souhait parce qu’elle était capable de lui agiter sous le nez toute l’étendue de sa bonté ? Isis se fichait des nés-moldu tant qu’ils n’avaient pas l’insolence de prétendre égaler la supériorité de son rang. Sa requête n’avait rien à voir avec ses convictions, c’était simplement une question de principes. Elle forcerait Hudson à céder ou bien elle n’obtiendrait rien d’elle. _ Une entorse à tes beaux principes en échange de mon aide, ça me paraît être une proposition honnête, non ? |
| Hudson K. Higgs Docteur mamours | | Re: In for a penny, in for a pound [Isis] ce message a été posté Dim 30 Oct 2011 - 18:51 Le rapprochement infime de l'héritière dans son fauteuil appela en elle un mouvent instinctif de recul qu'elle dissimula par un maintien aussi droit que rigide de sa colonne. Dans sa vulnérabilité, préserver une distance mesurée lui semblait indiqué. Ses entrailles nouées par l'attente d'une réponse l'oppressaient. La pièce qu'elle avait trouvé si joliment décorée plus tôt, n'était plus qu'une cage qui à chaque seconde semblait resserrer ses murs sur elle. Sans faire un geste, Isis captura son regard. Elle le sentit s'ancrer en celui de son interlocutrice, happé par l'intensité des prunelles sombres comme ensorcelé par un charme insoupçonné. Des jardins d'enfance y miroitaient comme mille trésors à découvrir. D'une profondeur troublante, elle s'y perdit pour y faire une rencontre plus troublante encore. Celle d'une enfant. Et elle recula un peu plus dans son fauteuil. Son bras avait ressentit la décharge impulsive, implorante de se tendre et donner sa main à l'innocence. Toute la contenance, l'impavidité dont elle avait fait preuve s'envola en un éclat tandis que l'air se muait. La tension changeait cependant que la balance penchait. Telle une proie sous l'emprise de l'hypnose, elle s'était laisser leurrer par le serpent dont les crocs percèrent sa chaire doucement, langoureusement, un peu plus à chaque phrase avant d'injecter leur venin. Sa voix claire et inoffensive avait retenti comme échappée d'un rêve ; ses mots étaient d'une dureté irréelle.
Une poignée de secondes plus tôt, il lui avait semblé pénétrer l'univers d'une adorable petite fille. Un poignée de secondes qui ne semblait à présent qu'illusoire. Une part d'elle, celle-ci même que l'innocence apparente avait émue, fut blessée par un sentiment de trahison plus que sa raison ne l'avait présagé. La jeune femme au faciès délicat n'avait d'adorable que ses miroirs noisettes pétillants de fierté. Il n'y avait rien de gai dans ces yeux étincelants , non, il y éclatait des lueurs fiévreuses. Inquiétantes. Ils l'avaient si aisément trompée, s'étaient d'un battement de paupières si aisément jouer de son ego qu'elle dut retenir sa respiration afin de ne rien laisser échapper du fiel lui montant aux lèvres. Ses doigts se crispèrent sur sa tasse qu'elle porta à ses lèvres. Le thé lui parut soudain désagréablement amer, mais tout en le buvant, elle feignit le savourer les paupières closes et dans une profonde expiration laissa se libérer son irritation. Personne ne l'avait trompée. Elle s'était méprise. Lourdement. Quand elle rouvrit les yeux, elle posa sa tasse délicatement sur la petite table. « Comme il te sierra Isis. » Sa voix démesurément posée portait l'écho tolérant d'un adulte face au caprice d'un enfant. Elle avait rencontré dans ses yeux une enfant et c'était à elle, si pleine d'émerveillement qu'elle se fiait. Ses prunelles s'arrêtèrent un instant sur le ravissant visage de sa protégée d'antan et un sourire emprunta les traits de son visage. Un merci muet. La concession à laquelle elle consentait l'horrifiait, il aurait toutefois fallu être sotte pour ne pas l'envisager, ni même l'accepter. Lentement, elle se pencha sur sa mallette noir, en sortit un dossier intitulé « Dispensaire » et le posa sur la petite table à la disposition de l'héritière. Avec une nonchalance affectée, elle s’autorisa le plaisir oisif que lui offrait la vue de la fenêtre sur les jardins. Elle ne put toutefois profité du paysage, une question la tourmentait : à quel point la condition que lui imposait Isis reflétait-elle ses convictions ?
« Pour toute chose, il y a un prix à payer, n'est-ce pas ? » Sa voix était douce mais son ton âpre. Tant de chimères avaient bercées sont existence : des rêves d'équité et de justice, de valeureux principes trop nobles pour être partager à moins que ce ne fut leur définition qui changea au fur et à mesure du temps et que tous avaient ré-appris. Un rire éthéré passa ses lèvres. « Ne t'inquiètes pas, ce n'est pas encore l'un de mes sempiternels état d'âme. Juste une constatation. » Elle balaya l'air de sa main tel un éventail comme pour chasser son propos.
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| | | Re: In for a penny, in for a pound [Isis] ce message a été posté Mer 4 Avr 2012 - 14:30 Il n’y avait rien d’honnête dans sa proposition et Isis le savait. Sa requête était un ultimatum, qui s’épiçait sans s’en cacher d’un honteux chantage acidulé. Il laissait au bout de la langue un goût d’électricité, des picotements amers qui explosaient en bouche en libérant tout l’âpreté de leur saveur. Elle les voyait déjà peindre des grimaces difficilement dissimulables sur le visage de son interlocutrice. Tout son maintien et son port royal n’avaient pas suffi à effacer la fraction de seconde pendant laquelle ses traits s’étaient figés en une expression muette d’horreur. Le serpent était enfin parvenu à planter ses crocs dans une chaire plus tendre que du beurre. Il était enfin parvenu à frapper là où ça faisait mal. Isis ne voulait pas perdre une miette de ce spectacle. Ses iris aux reflets pétillants prirent un éclat inquiétant tandis que la commissure de ses lèvres tressaillait de joie. Elle ne voulait pas être cruelle, l’humiliation lui suffisait, mais elle avait bien du mal à refréner ce que ses plus basiques instincts lui sifflaient au creux de l’oreille. Hudson ne méritait pas d’être sauvée. Ses réticences face à ce qu’elle lui demandait étaient un aveu de sa culpabilité, elle avait bafouée jusqu’à la pureté du sang coulant dans ses veines en laissant des compassions futiles obscurcir son jugement. Aujourd’hui elle ne valait pas mieux que la racaille souillant le monde des sorciers. Elle ne pouvait pas le prouver, car l’aiglonne ne serait jamais assez stupide pour rejeter ses conditions et dévoiler ainsi à la face du monde l’ignominie de son véritable visage, mais elle retirait malgré tout de ce face à face une satisfaction bouillonnante réchauffant agréablement son sang reptilien. L’aigle avait perdu le combat et laissait derrière lui un joli tas de plumes avec lesquelles elle ne manquerait pas de se tresser une couronne. Hudson avait avouée sa défaite à voix haute. Tout ce qu’il lui restait, elle le déposa sur la table basse avec la dignité qu’incombait encore à son rang, un dossier portant les lettres « Dispensaire » en haut de la couverture. Isis l’attrapa et l’ouvrit sur ses genoux avant de laisser glisser son dos dans le dossier de son fauteuil. Il lui restait dorénavant à respecter sa part du marché. Si elle n’avait pas hésité une seconde à user du bâton pour lui faire courber l’échine, elle ne comptait pas jouer de nouveau piège à son interlocutrice. En ces temps troublés Ste-Mangouste ne suffirait pas à réparer les pots-cassés, même elle était capable de le voir. Dans les mois à venir, les années peut-être, la terre de leurs ancêtres se gorgerait de sang sorcier au point de le vomir par rivières. C’était inéluctable, tôt ou tard leur peuple devrait essuyer les conséquences de ses erreurs même si cela devait être un véritable gâchis. Ce n’était pas ce qu’Isis souhaitait. Elle savait pourtant qu’à moins d’un miracle ils ne pourraient pas l’éviter, c’est pourquoi elle consentait à apporter sa pierre à l’édifice si c’était pour une cause qu’elle jugeait juste. Et préserver les siens lui semblait juste. Son index tournait lentement les pages du dossier tandis qu’elle en survolait le contenu. Elle ne prêtait pas plus d’attention que cela à la Higgs. _ Je suppose, marmonna-t-elle simplement lorsqu’elle lui demanda si pour toute chose il y avait un prix à payer. Pour dire vrai elle n’avait pas envie de se poser la question, elle n’en voyait pas l’intérêt. Si elle avait eu envie de débattre d’un tel sujet, ce n’est pas non plus Hudson qu’elle aurait choisi pour compagnie. Quelque-chose lui disait que cela aurait rapidement viré à la débâcle sentimentale, et elle n’avait jamais été très douée pour tout ce fatras. En revanche, elle rit de bon cœur à sa confession intime. _ Comme si tes états d’âme avaient une quelconque incidence sur ce que je pouvais penser ! Je ne m’inquiète pas le moins du monde, rassure-toi. Quant à tes constations, et bien tout ce que je peux dire c’est que parfois la vie réserve de belles surprises et que la vérité n’est pas toujours aussi facile à démêler que ce que l’on pense. Cela fait partie du jeu, j’en ai peur. Mais tu dois en être plus que consciente, n’est-ce pas ? Considérant ta situation. Maintenant je ne voudrais pas avoir l’air d’être impolie mais j’étais loin d’attendre ta visite. J’ai beaucoup de choses à faire aujourd’hui et je suis certaine que tu ne t’attends pas à ce que je te donne une réponse après dix minutes d’entrevue autour d’une tasse de thé. Ta proposition mérite que je m’y penche un peu plus sérieusement et que j’étudie ceci, dit-elle en soulevant légèrement le dossier, attentivement. À priori je pense que le projet est intéressant, voire essentiel pour les mois à venir, alors je ne devrais pas tarder à te donner une réponse. Tu peux compter sur moi là-dessus.Sur ces mots l’héritières prit appuie sur les accoudoirs de son fauteuil et se releva, offrant aussitôt à son interlocutrice une main tendue qui mettait fin à leur entrevue sans y inviter de délais. Isis et Hudson n’avait aucun souvenir d’enfance à évoquer pour occuper l’heure à venir, ni de centres d’intérêt à partager, il était donc plus que temps de se dire au revoir. Le manoir n’avait pas pour habitude de recevoir des étrangers entre ses murs. _ Je te souhaite de passer une agréable fin de journée. Victor va te raccompagner jusqu’à l’entrée principale et après ça, étant donné que tu es arrivée seule, je suis sûre que tu retrouveras ton chemin de la même manière. Au revoir Hudson, conclut-elle avec un sourire et cette légèreté angélique qui jurait tellement avec le fond de sa pensée. |
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