Finalement Billy l’avait fait. Il avait envoyé un message succinct à McGann pour le voir en personne. Il y avait longtemps songé. Misha ne lui parlais jamais de son amant. Evidemment puisqu’il devait se douter dans quel état ça mettrait son petit frère. Mais il n’était pas suffisamment bon menteur. Ou à défaut de mentir, il n’était pas assez doué pour omettre de dire la vérité à son petit frère sans que ce dernier ne s’en rende compte. Billy le connaissait trop bien ; la manière qu’il avait de détourner un peu les yeux, ou bien la moue un peu particulière de ses lèvres alors qu’il semblait sur le point de parle de McGann mais que jamais les mots ne finissaient par sortir. Et il valait mieux car Misha avait raison, Billy se serait mis dans des colères impossibles. Et ces derniers temps, il était difficile de le contrôler. Il n’avait pas de raisons particulières outre que l’attente, l’espoir que Misha finisse par arrêter de voir l’Ordre du Phénix semblait diminuer au fil du temps. Lui qui avait toujours été si proche de son aîné le voyait presque comme une trahison. Et aussi Allen avait été un peu bizarre dernièrement, un coup, il l’évitait, un autre il devenait étrange alors qu’il était soul, s’accrochant à lui comme à une bouée à la mer. Pourtant il savait que Billy ne supportait pas qu’on le touche à tout bout de champ et il n’avait pas non plus aimé ces blagues un peu douteuses qu’on faisait certes quand on était loin d’être sobre mais que Billy avait trouvé désobligeantes. Le lendemain, ils s’étaient d’ailleurs disputés violemment. Ça n’avait pas forcément duré longtemps et Billy avait pris sur lui, excusant Allen qui au final n’y était pour pas grand-chose.

Quoiqu’il en soit, il était dans un perpétuel état de malaise duquel il n’arrivait pas à s’en dépêtrer. Il fallait que quelque chose au moins aille dans ce sens et tant pis, si ça tombait sur McGann, il n’avait qu’à ne pas être là, il n’avait qu’à ne pas être un Ordre et il n’avait qu’à ne pas tourner autour de son frère. Billy avait relu plusieurs fois son mot mais celui-ci n’était pas menaçant, autrement son « invité » ne viendrait jamais. De toute manière, il n’était même pas sûr de savoir ce qu’il allait faire. Le menacer ? Lui demander gentiment ? Le frapper ? Ou autre chose ? Il n’en avait aucune idée mais il prit évidemment sa baguette avec lui. Il avait proposé de se retrouver en pleins Londres moldu. Ces derniers temps, il y retournait bien trop souvent entre le drame du Triathlon, ou sa mission avec Elie. Mais il ne pouvait décemment pas retrouver l’Ordre au beau milieu de la communauté des sorciers ; pas pour qu’ils puissent être tranquilles. Qui viendrait les déranger au beau milieu des moldus ? Il avait vérifié plusieurs fois le chemin sur un plan et avait laissé ses vêtements les plus « sorciers » pour s’habiller aussi sobrement qu’il pouvait. En vérité, il était allé demander à Allen de lui confirmer qu’il faisait passe-partout alors qu’il était incapable de savoir ce qui se faisait ou ne se faisait pas chez ces fichus moldus et leurs manies étranges.

McGann était déjà là quand Billy arriva au point de rendez-vous. A vrai dire, il s’était perdu et avait dû faire demi-tour à un moment donné pour retomber là où il voulait. Il ne lui en fallait pas plus pour être excédé et il avait gardé les yeux au sol tout le long du chemin pour s’empêcher de dévisager les gens autour de lui ou leurs activités. Il leva les yeux pour regarder l’homme en face de lui. Il n’avait pas vu l’écossais depuis un moment, depuis la fois où il lui avait dit de se tenir à distance de son frère. Précaution qui n’avait servi à rien, il le savait bien et son vis-à-vis ne semblait pas avoir de remord à n’en faire qu’à sa tête. De terroriste, de toute manière, il n’attendait pas grand-chose mais il ne pouvait s’empêcher d’être quelque peu agacé. Il était fatiguant de voir que rien n’était jamais simple. Il l’observa en chien de faïence, avec une moue au visage de celui qui n’est pas prêt de dire bonjour mais ne voit pas ce qu’il pourrait dire d’autre. Il n’avait pas pensé jusque-là, il n’était pas stratège, il réfléchissait ensuite. Les mains dans les poches de son pantalon, il dévisagea McGann avant de le regarder de la tête aux pieds. Qu’est-ce qu’il te trouve ? pensait-il sans pouvoir répondre de lui-même à cette question. « Merci d’avoir répondu à mon invitation ! » finit-il par dire avec un sourire froid. On se donnait contenance comme on pouvait et Billy faisait toujours de l’esbroufe dans ce genre de situation. « Charmant ces quais moldus, n’est-ce pas ? » Il n’eut pas un regard pour lesdits quais alors qu’il examinait toujours le jeune homme en face de lui. « Sinon, je me demandais simplement ce qu’il fallait que je fasse pour que tu le laisses tranquille. » Pas besoin de dire de qui il s’agissait, tous deux étaient bien trop au courant.

Billy était persuadé qu’Ethan le détestait autant que lui-même avait de l’aversion pour le phénix. Et le voir garder cette expression affreusement neutre au visage agaça la jeune ombre. Lui se contenait à peine de ne pas lui sauter au cou pour étrangler son petit cou blanc. Certes, il avait toujours été un peu trop vif. On ne cessait jamais de le lui répéter. En face de lui, Ethan McGann ne semblait ni apeuré, ni décontracté. Et Billy espérait au fond de lui qu’il était au moins un peu tendu et inquiet. S’il avait pu le savoir, ça lui aurait fait plaisir. Il tenta de déchiffrer la ligne droite des lèvres de son vis-à-vis, l’expression de ses yeux bleus mais il ne se heurta qu’à un mur. Cela dit, il lui reconnaissait que lui-même ne devait pas être plus engageant.

Quoiqu’il en soit, si Billy était d’humeur bavarde, cela ne semblait pas être le cas de McGann qui se contenta d’un vulgaire haussement des épaules. Et son soupire ensuite fut des plus équivoques. Evidemment, c’était une tête de mule. Mais au moins la jeune ombre se disait qu’il avait fait de son mieux pour être civil et diplomate alors qu’il avait laissé une dernière chance. Il n’aurait pas à se sentir coupable quoiqu’il arrive…n’est-ce pas ? Etait-ce pour rassurer, pour se donner bonne conscience qu’il pensait ainsi ? Sans doute mais il ne chercha pas à se laisser le temps de creuser l’idée et chassa tout cela d’un roulement des yeux alors que finalement son interlocuteur prenait la parole. Evidemment un refus, toujours et encore. Qu’il soit énamouré de son frère, il avait déjà pas mal de mal à le comprendre, mais cette manière d’en avoir rien à faire, d’être si égoïste, de se ficher de la convenance et de la réputation de Misha l’agaçait tellement que déjà Billy sentait qu’il s’énervait.

« Je ne pense pas que tu ais mieux à faire en vérité ! » protesta le jeune homme alors qu’il levait sa baguette visant le dos bien visible de son ennemi. Il murmura un … ; qui fit voler Ethan sur plusieurs mètres. Il n’était pas allé avec le dos de la cuillère et si on l’avait vu, au diable le secret magique ! Mais ça ne semblait pas le cas. Le port semblait peu fréquenté pour le moment. Il franchit la distance qui le séparait de McGann pour le relever alors que celui-ci assumait encore le coup en traitre. Il le retourna sans ménagement pour qu’il lui fasse face et brandit sa baguette juste sous le nez. « Paraît que je vise bien …surtout à cette distance. » fit-il alors que fleurissait sur sa figure un sourire sans joie.

Pendant quelques secondes, il observa le visage en face de lui. Il ne comprenait toujours pas ce qu’avait pu trouver son frère en …cette personne. Il avait retourné la question dans tous les sens. Et aussi quand est-ce que son frère avait mal tourné ? Quand avait-il prit une route que Billy n’avait pu concevoir ? On lui avait souvent dire que la relation des deux étaient bien trop fusionnels et qu’elle apporterait des problèmes. Le plus jeune ne supportait pas de ne pas savoir tous de ce que faisait le plus âgé et ne pouvait s’empêcher de vouloir intervenir pour le ramener sur le bon chemin, qu’il ne s’égare pas, qu’il ne file pas un mauvais coton. Et Misha semblait désapprouver toutes les relations de Billy lui exprimant sans contrefaçon son aversion pour son meilleur ami ou ses connaissances de la faction. Mais pour le moment, il avait l’impression que son grand frère était malade et qu’il avait sous les yeux son infection.

Une série de sort vint franchir les portes de son esprit, ils défilèrent à toute vitesse mais Billy les envisageait tous. Il était tant tenté par un sortilège impardonnable. Un doloris pour le voir se tordre de douleur mais ça aurait amené bien trop d’attention sur eux. Un Avada, simple et efficace mais il n’arrivait pas à s’y résoudre. Bien que ses dernières missions étaient de plus en plus radicales, il était différent de tuer un parfait inconnu qui ne semblait pas exister du moment qu’on ne l’avait plus en vue et une personne dont on connaissait le nom, le prénom, le métier malgré qu’on l’abhorre et qu’on aurait aimé la voir disparaître. Ou peut-être était-ce simplement que Billy avait peur, malgré tout et inconsciemment, de la réaction de Misha. Il n’avait pas su pour la première rencontre entre son frère et son amant et il espérait qu’il ne le sache pas pour la deuxième. Peut-être avait-il déjà franchit la ligne où tuer n’importait plus tant que ça mais qu’il avait encore bien trop conscience de ce que pouvait penser son frère.

Finalement, il prit la parole lentement. « Tu ne sauras jamais combien ça me coûte de ne pas simplement te tordre le cou. » Il savait qu’il regretterait sa mollesse d’esprit un jour. Son manque de dureté de ne pas l’achever de suite mais il avait bon espoir que ça suffirait à ce qu’il fiche la paix à Misha. Après tout un Phénix de plus ou de moins dans les parages, il s’en fichait du moment que son frère était protégé. « oubliette ! » finit-il par lâcher d’une voix sèche.

Qu’il l’oublie. Sa vie passée ou son nom, à la limite il s’en fichait qu’il s’en rappelle ou non du moment qu’il oubliait jusqu’à l’existence de Misha. Il ne voulait que ça. Ce n’était pas trop demandé ?

Billy avait lancé le sort puis son regard était resté figé sur Ethan, attendant une réaction ou bien un manque de réaction, sa baguette était restée levé au cas où celui-ci réagirait si le sort n’avait pas fonctionné. Il l’avait vu froncer les sourcils en voyant l’arme sous son nez, aux mains de l’ennemi devait-il penser. Et il avait raison. Billy était un ennemi et il lui faisait regretter de ne pas l’avoir considérer comme tel, d’avoir cru qu’il serait suffisamment faible pour ne pas tirer. Ta faiblesse, ton manque de vigilance t’as été fatal, pensa-t-il alors qu’il recherchait dans le regard de l’écossais quelques indications quant à l’état de sa mémoire. Pendant quelques secondes, Ethan Mcgann avait semblé réellement paralysé par la peur. Il connaissait la porteur d’un tel sortilège. On ne faisait pas oublier d’un seul claquement de doigt. Ça prenait de l’énergie et une certaine concentration. Et tous deux le savaient aussi bien que l’autre.

Et puis, le regard du jeune homme semblait perdu, bien trop perdu pour pouvoir être feint et Billy baissa sa baguette. Il ne savait pas quelle était l’ampleur « des dégâts ». Il s’était concentré que sur Misha. L’autre pouvait bien se rappeler qu’il était un vulgaire Ordre, il s’en fichait royalement du moment qu’il effaçait de sa mémoire son grand frère. Mais il ne lançait pas souvent ce sort, même jamais pour être honnête et il pouvait très bien avoir raté, ou bien avoir été trop fort. Il serait bien resté pour savoir ce qu’il en était. Il lui aurait bien fait passer pour un interrogatoire pour le tester. Mais il en avait déjà fait suffisamment et sans doute que l’ampleur de son acte venait de lui tomber dessus alors qu’il se décidait à prendre la poudre d’escampette. Il n’était plus temps de tergiverser.

Il n’eut pas une parole pour l’écossais. Cela n’aurait pas aidé et il ne voyait pas quoi lui dire. Il préférait profiter de son hébétement et rangea sa baguette avant de transplaner devant ses yeux. Il aurait pu avoir un regard aux alentours, s’assurer que personnes sans pouvoirs ne le voit disparaître par magie mais il n’en avait cure à présent. Il n’avait pas transplané si loin, seulement quelques rues plus loin à vrai dire. De là, il avait jeté un regard en arrière comme s’il aurait pu apercevoir l’écossais à travers les immeubles avant de se résoudre à retrouver le monde sorcier au plus vite. A son tour d’oublier cette entrevue loin de tout. Il lui serait sans doute un peu plus difficile, certes, mais en se forçant un peu, tout était possible.