Le Medicomage hocha la tête. Manquer la tombola n’était pas un drame en soi, il y en aurait à d’autres occasions et ils n’étaient pas réellement venus pour elle alors mieux valait profiter de ce moment qui (s’il n’était pas habitué à côtoyer tant de monde), allait lui changer les idées. Aujourd’hui, il n’avait pas envie de penser aux factions et cette journée au Chemin de Traverse était idéale pour cela. Un petit sourire moqueur se peignit sur le visage d’Elie en imaginant la scène qu’elle lui décrivait. « Oh j’imagine bien qu’il devait être furieux. » Il continua en haussant les épaules. « A l’heure qu’il est il a déjà trouvé une cible à embêter ou une gaffe à faire juste pour faire bouger les choses. Au pire, il pourra toujours transplaner et s’incruster ici même si je ne préfèrerais pas. », rajouta t-il rapidement. Maddox était gentil, vraiment. Quand il le voulait. Et comme la plupart du temps il s’amusait à les espionner ou que savait-il d’autre encore, Elie préférait le savoir loin.

Astra l’entraîna vers les différentes échoppes qui traînaient ci et là tant et si bien qu’il commençait vraiment à avoir faim lui aussi. Elie la regarda glisser un ticket dans sa poche et sourit à son mensonge vain. Il éviterait de lui faire un commentaire même si il aurait donné n’importe quoi pour voir la tête de son frère lorsqu’il s’en apercevrait. La brunette lui donna un caramel et son regard s’illumina légèrement. Ce mélange de sucré et de salé était diablement délicieux. Elie détourna du regard pour ne plus être tenté. S’il commençait, il allait finir par terminer le paquet à lui tout seul et quelque chose lui disait que c’était mauvais même si ces sucreries étaient délicieuses. La tentation était tellement grande qu’il était sur le point d’en prendre un deuxième quand une voix s’éleva au-dessus d’eux. A un moment, il espéra que cela soit Zakary mais la aussi une petite voix lui disait que ce n’était pas lui. L’attrapeur s’était fait discret pendant tout l’été et quand il était allé le voir, il n’avait pas été là. Le froncement de sourcil inquiet fut remplacé par un soupir légèrement agacé lorsqu’il reconnu l’individu. Wade, Wade Storm. Par Merlin ce gosse allait le tuer ou il allait le tuer. Peut importe. Toujours était-il que là, maintenant, s’il pouvait sentir son agacement bien présent, c’était pas plus mal. « Wade. Ce n’est pas parce que tu prends un malin plaisir à nous embêter qu’il n’y a pas d’AUTRES Médicomage à Sainte-Mangouste. », souligna Elie en prenant soin d’ignorer la dernière remarque du jeune en se concentrant sur le caramel qu’il venait de prendre dans le paquet d’Astra alors que Wade continuait. Mais quel moulin à parole.

Par Merlin mais que quoii ? Hey il y allait un peu fort là. Bien sur Astra était ravissante mais ce n’était pas une raison pour sous entendre que … que rien du tout. En fait il allait ignorer les commentaires de Wade sauf pour le dernier. « En parlant manquer cette fameuse soirée, tu ne devrais pas y être toi aussi ? »

« Pitié, ne parle pas de ce genre de malheur. Il serait bien du genre à transplaner sur tes genoux uniquement parce qu'il a fini de mettre le feu au jardin des Wilkes. » Parler de son frère avait toujours eu le merveilleux pouvoir de l'attirer, et ce même quand il était loin d'eux. Elle interrompit donc sa tirade sur le compte de Maddox en prenant un nouveau caramel, observant Elie qui semblait lui-même être en train de se retenir de toutes ses forces pour ne pas en reprendre un. Et bien, qu'il se laisse tenter, ils étaient là pour être mangés, et s'il n'en prenait pas, il savait pertinemment que c'est elle qui allait les manger. Son sourire s'étira et elle allait se pencher pour embrasser à nouveau son compagnon, profitant de la foule pour ne pas être vus de tous, mais une voix l'interrompit dans son geste à peine entamé. Astra se redressa, les joues roses, et salua Wade Storn qui venait d'arriver devant eux. Un de ses patients, quand il était encore au service de l'enfance, et un des plus récalcitrants, vu le nombre de fois qu'elle s'était retrouvée à devoir le soigner, ou à le récupérer parce qu'Elie ne voulait pas le soigner. Elle avait toujours été trop indulgente avec lui, d'ailleurs. Tout comme maintenant, alors qu'il charriait Elie. La brune pouffa de rire en entendant le garçon deviser sur la rareté du sourire d'Elie et mima une fausse révérence quand il la complimenta. « Merci Wade. Et c'est de ma faute si Elie ne sourit pas beaucoup, je veux garder ça pour moi uniquement. » Entrer dans son jeu n'était probablement pas une bonne idée, surtout quand son ami répliquait avec exaspération. Oh, mais voyons, ce n'était qu'un gamin avec des blagues de gamin ! Elle secoua ses boucles quand le sujet tomba sur la réception du First Ladies, nouveau sujet générateur de commentaire chez le Poufsouffle.

« Faut pas lui en vouloir, ça s'annonçait pour être... Les mots se bloquèrent dans sa gorge. La mère de Wade étant dans les organisatrices, elle ne savait pas à quel point elle pouvait être familière sur ce sujet. Avec son frère, elle aurait lâché un 'chiant' bien senti, mais il fallait qu'elle se modère. ... tranquille. Un peu trop, même. » Tranquille, c'était un mot bien diplomate. Sa main libre glissa dans le dos du Médicomage à ses côtés, jusqu'à aller sur ses fesses, en pinçant une avec l'air de rien. Elle ne pouvait pas l'embrasser devant Wade, mais ça ne voulait pas dire qu'elle ne pouvait rien faire par derrière. Tout en parlant, ils avaient continué d'avancer et un leprechaun s'approchait d'eux dangereusement, décidé à savoir combien ils étaient pour ce repas. Astra l'avisa rapidement du coin de l'oeil. « Tu as bien des amis à rejoindre, Wade, non ? Plutôt que de rester avec des Médicomages rasoirs qui vont seulement parler de plaies et de pus pendant tout le repas. Tu ne me feras pas croire que tout le monde est chez les Wilkes et que tu es venu seulement pour nous tenir compagnie. » Non. Pitié. Elle voulait passer une soirée avec Elie, en tête-à-tête, même si c'était dans la foule. Même si la présence du jeune Storm serait évidemment une façon de détourner l'attention d'eux. Son sourire resta présent, cela dit, et lorsque le leprechaun arriva à leurs côtés et prit les billets qu'elle avait repêché dans la poche du pantalon d'Elie, il les dirigea sans prendre garde vers une table à trois, située non loin de ce qui semblait être Naïma Zabini.
Faites que Wade ait réellement d'autres personnes à embêter.

Vraiment, si je ne connaissais pas Nicodem, j'aurais dit que ça sentait le vieux plan drague à 2 noises 5 mornilles. Enfin, "connaitre" est un bien grand mot, mais c'est juste pas vraiment le genre de type qu'on s'imagine draguer les minettes dans un bar comme un relou, avec sa cheminse à moitié ouverte pour découvrir son torse poilu (Hmm sexy ! - ou pas -). Ouais, non, en fait c'est pas le genre de type qu'on s'imagine draguer quoi que ce soit quand on y pense en fait. Dans ma tête il est un peu totalement asexué, un peu comme un escargot, mais d'une façon mignonne... Un chaton-escargot en fait. Bref, tout ça pour dire que je me suis contentée de rire comme une cruche en me promettant mentalement qu'avant la fin de la soirée, mon soutient-gorge finirait dans sa poche, jusqu'à ce qu'un minuscule bonhomme ne nous mène à notre table. Y a pas à dire, les leprechauns doivent être vraiment très bien placés dans le palmarès des créatures les plus creepy du bestiaire fantastique. On dirait des enfants roux barbus, c'est très très perturbant. J'ai donc simplement suivi le mouvement, un sourire crispé peint sur les lèvres.

« Tu sais les philtres vie-en-rose de ton cadeau, ce sont ceux du stand de ma mère, je les reconnais c’est moi qui les ais mit en bouteille hier soir. Donc au final, c’est un peu mon cadeau aussi. »

Okay, c'était probablement le truc le plus adorable que j'avais jamais entendu de ma vie, plus mignon qu'un million de nubbins qui auraient fusionné pour faire un giga-nubbin ; bon, mauvais exemple en fait parce que ça a l'air assez terrifiant comme image en fait - et juste comme ça j'avais une ébauche de scenario pour un film d'horreur/catastrophe en tête -. Après avoir laissé échapper un petit « Aww... », je tournais la tête pour voir si Fabian avait entendu et était en train de se fendre la poire, ce qui n'était pas le cas heureusement. C'était Fabian quoi, Fabian et sa grande gueule, Fabian et ses sarcasmes, Fabian et ses « gnagnagna, regardez-moi, le monde c'est naze et j'adore détruire le bonheur des gens et en plus j'ai des sourcils bizarres. » C'était mieux qu'il ignore ce que Nicodem venait de dire. Nous nous sommes donc installés à notre table avant de passer nos commandes. « Moi je vais prendre le steak-champignons avec des frites et la fricassée de légumes... Quoi ? J'ai faim... Oh ! Et vous avez des cocktails ? » « Hmmnon mademoiselle... » « Oh... Des shots alors ? Non plus ? Bon bah un hydromel dans ce cas. Pas drôle... » Dans le genre naze c'était méga naze. J'étais venue pour me mettre minable, si j'avais voulu boire de l'hydromel je serais allée à la réception FLBP , au moins j'aurais mieux mangé... Enfin, au moins je passais une soirée avec Faust ze sexy beast, c'était déjà ça de gagné. Oui, ce n'était pas si mal que ça finalement. J'entrepris donc de lancer des boulettes de mie de pain en ricanant sur un Fabian qui s'énervait un peu plus à chaque fois que je le touchais.

Je me suis arrêtée après que ma boulette ait touché l'intérieur de son oreille (+100 points !) pour fixer Faust et Alice. Il y avait un truc entre eux, même un aveugle s'en rendrait compte. Faust en rougissait même ; c'était une première ça, lui qui faisait d'habitude preuve d'un je-m'en-foutisme à toute épreuve. Je me mis à scruter Alice à la recherche de qu'elle pouvait avoir de plus que moi pour faire autant d'effet au Waltz. Peut-être préférait-il les blondes ? Mes questionnements furent cependant interrompus par l'arrivée de nos plats qui se matérialisèrent magiquement dans nos assiettes. Tiens, j'avais oublié la phobie bizarre que Nicodem avait par rapport aux germes. « OUH OUH OUH ! Tu devrais boire un verre Nicodem ! L'alcool c'est antiseptique ! » M'exclamais-je, avec la subtilité et la retenue d'un Magyar à pointes en rut, en le pointant du doigt autant parce que j'étais ravie de sortir Alice et Faust de ma tête que parce que voir Nicoco pompette ça devait être absolument mythique.

« Allez, bon appétit ! » et sans attendre j'attaquais mes deux plats, tout en piochant de temps en temps dans l'assiette de Fabian. « Mais fiche-moi la paix, t'as déjà deux plats ! » s'énerva-t-il. « Oui mais j'ai pas de boulettes, toi t'en as. » je rétorquais avec un sourire insolent. Fabian contre-attaqua alors en me piquant une bonne poignée de frites. « TOUCHE PAS A MES FRITES, FACE DE POULPE ! » « Alors touche pas à mes boulettes, morue ! » Il ne reçut pour seule réponse qu'une boule de mie de pain entre les sourcils.

« Nicodem, c'est toi qui la rends aussi sage ? Faut que tu me donnes des trucs »
…
Lentement, il s’était arraché à la contemplation horrifiée de ses champignons-purée pour relever sur Waltz un œil noir et quelque peu dubitatif.
Sérieusement ?.........
Qu’est-ce que c’était que cette remarque ? Qu’est-ce ça voulait dire ? Enfin, il savait ce que ça voulait dire bien sûr il n’était pas totalement attardé, mais il s’interrogeait sur ce qu’il y avait derrière… Lui-même était très mauvais avec ce genre de pratique. L’ironie, les sous entendus, l’art de dire sans rien dire, ce genre de nébuleuses petites choses. Il trouvait d’ailleurs cela terriblement agaçant et ne jurait que par le pied de la lettre. Mais Waltz ? Ce sourire insolent qu’il affichait et ses œillades en coin…

Au départ, Nicodem s’était dit que tout simplement, Faust était ce charmeur qui est l’ami de toutes les femmes, très confiant, qui sourit et fait des blagues - détestable en somme. Un peu comme il l’avait vu faire avec sa mère l’une ou l’autre fois.
Mais peut-être pas en fait…
Peut-être qu’il draguait Alice…
Aussitôt ses globuleux yeux bleus ne furent plus que deux petites fentes scrutatrices et suspicieuses.

Pas qu’il était jaloux – en fait si – pas non plus qu’Alice n’avait pas le droit d’avoir une vie – mais presque – cela dit,… Faust ? Sérieusement ? Nicodem ne s’était encore jamais encombré d’un avis défini sur ce type. Ils ne se connaissaient que de vue et ça lui avait toujours suffit. Mais si Alice devait se trouver un amoureux, franchement, il ne faisait pas le poids ! Adolescent, Nicodem s’était souvent imaginé avec quel genre d’homme finirait sa lionne, et franchement, rien à voir avec Waltz ! Alice appartenait à un genre bien précis, très rare, et le mâle de l’espèce, ce n’était pas Faust ! C’était … quelqu’un d’autre. Quelqu’un de sang-pur pour commencer, puisque tout comme lui, elle était officiellement de rang 4, mais réellement de sang-pur. Première génération seulement, mais tout de même ! Il convenait de viser la perfection, pas de stagner dans l’acceptable médiocrité, surtout pour Alice. Quand bien même, il n’y avait pas que le sang pour ne pas coller chez Faust. Il fallait un homme d’action ! Pas un scribouillard précieux ! Un tireur d’élite avec la carrure d’une armoire normande, légèrement métis pour le côté aventureux et épicé, et orphelin, car il redoutait qu’Alice ne passe jamais très bien aux yeux d’une belle-mère.

Quoi que ?... Cette odieuse petite traitresse savait au moins faire la vaisselle, elle venait de le prouver… la garce ! L’immonde garce ! Maintenant il était au moins obligé de goûter cette purée infâme qui décorait son assiette. Horreur et haine.

« Tu sais ça me rappel cette fois où tu as attendu que je m’éclipse pour boire une gorgée de mon thé, et attendu ensuite que je l’ai terminé jusqu’à la dernière goûte pour me le dire… Je t’ai détesté » lui rappela-t-il d’un petit sourire crispé.

Un sourire qui perdura d’ailleurs, figé et jaune. Il détestait être mit au pied du mur de cette manière, il détestait qu’on lui force la main. D’un autre côté, il ne pouvait se permettre de jouer les offusquer puisque… eh bien c’était lui qui avait un problème, elle ne lui apprenait rien. Il en était parfaitement conscient et était le premier à le regretter, pourtant c’était tout simplement plus fort que lui. Que pouvait-il y faire ? Et puis de quoi ça lui donnait l’air en plus du reste ? Maintenant toute la tablée était au courant qu’il avait un problème. Enfin, Alice et Naïma le savaient déjà et ce n’était pas trop grave puisqu’elles étaient des filles, mais les deux autres non, et il détestait passer pour une chiffe-molle aux près d’autres garçons.

Il aurait voulu être capable de l’envoyer au Diable avec ses couverts doublement lavés mais… d’un autre côté il préférait subir l’humiliation que de subir les sales microbes d’inconnus.

« Comme c’est attentionné de ta part en tout cas » sourit-il encore tout en agrippant les couverts d’un geste sec.

Comme quoi finalement il touchait un peu à l’ironie lui aussi parfois…
Son sourire aigre disparu pourtant lorsqu’une remarque relativement judicieuse s’échappa de la bouche de Naïma. Il trouvait ça mignon, le mot ‘antiseptique’ dans la bouche d’une demoiselle. Et puis c’était exacte, l’alcool brûlait les microbes, et la purification par le feu il n’y avait rien de plus propre que cela, c’était sa préférée. La preuve c’est que lorsqu’il croisait un sang-de-bourbe en toute connaissance de cause, c’était toujours l’image d’un buché qui lui venait à l’esprit. Ce qu’il pouvait faire, c’était avaler quelques champignons avec les couverts d’Alice, et puis boire de l’alcool par la suite, pour se nettoyer de l’intérieur !
… Qu’est-ce qu’il ne fallait pas faire pour avoir l’air normal.

Bon le seul problème c’est qu’il ne buvait jamais d’alcool. Il en avait goûté plusieurs, notamment le champagne et une gorgée de whisky une fois, mais il n’avait jamais fini un verre. Enfin bref, il validait l’idée et remerciait silencieusement Naïma, mais il ferait ça après le repas. On ne se bourrait pas la gueule à table, c’était un truc de Français ça. Quand on était anglais, gallois, irlandais, écossais ou mannois comme lui, on faisait ça dans un pub, ou devant un bar. Point. Et des bars ils en avaient croisé des dizaines entre les échoppes dans la rue. Ca lui ferait une bonne excuse pour hâter les gens et en finir rapidement avec cette ridicule histoire de repas.

Oui, d’ailleurs… ce repas.
Fabian et Naïma transformaient ce qui était déjà une épreuve en prouesse. Discrètement, Nicodem éloigna son assiette de la jeune femme pour se déporter vers Alice. Si jamais une mie de pain étrangère venait se perdre dans son assiette il était tout bonnement fichu, et de toute manière les voir toucher la nourriture avec leurs mains non lavées, c’était une réelle torture… Il devait déjà faire preuve d’un self control extraordinaire pour ne pas s’enfuir, pour tempérer son dégoût, et personne ne semblait vouloir lui faciliter la tâche. Enfin pas assez à son goût.

Concentration. Décision. Action.
Laborieusement, le jeune homme planta une fourchette dans la purée de pomme de terre qui continuait de le narguer, et tout en regrettant de n’pas être allergique au lactose pour l’excuse, porta la bouchée vers ses lèvres. Le plus difficile ce n’était pas l’enfournage, c’était la déglutition. Le moment d’avaler la substance qui devait passer ce barrage musculaire capricieux, qui se contractait et ne laissait plus rien rentrer à la moindre pensée vaguement écœurée. Des champs remplis de coquelicots et de papillons, un épouvantail recouvert de corbeaux dans le soleil couchant, une table d’opération aseptisée, des images saines et apaisantes qui l’aidèrent même à mâcher son champignon.

Et bon bref voilà, il avait goûté. Trop fier.

« J’aime pas » décréta Nicodem avant de repousser son assiette et d’agripper son thé à la menthe pour une gorgée de rinçage.

Mais il avait goûté.
Maintenant il allait pouvoir passer tout le reste du repas à faire un volcan avec sa purée, comme prévu, en attendant que les autres aient fini et qu’ils s’en aillent d’ici.

Bon, vu le regard de tueur que venait de lui faire Nicodem, il fallait oublier pour les trucs pour assagir un peu la blonde lionne. De toute manière, ce n'était pas d'une Alice sage qu'il voulait, mais ça valait la peine d'essayer, non ? Il se rappellerait seulement, dans le futur, de ce regard scrutateur et meurtrier, si un jour il lui prenait l'envie de lui confier qu'il avait un peu couché avec sa mère (un peu beaucoup, même, et toujours dans la joie). La blonde répondit à la place du bouclé, sur un ton de malice. Il entrouvrit la bouche pour protester et quand il tourna la tête vers Fabian pour dire que non, voyons, il était même encore plus mignon que cette grosse tête de Serdaigle, ce fut pour voir son cadet lui faire une grimace – et commencer une guerre de boulettes de pain avec Naïma. En tous cas, on peut dire que la maturité également avait fait embargo chez les fils Waltz. « Bien élevé, tu disais ? » Elle était déjà retournée à son ami, de toute façon, lui offrant des ustensiles lavés par elle-même. Deux fois. Quoi, un problème avec les microbes ? Peut-être de se faire manger par les vilaines petites bestioles invisibles ? Un léger sourire étira ses lèvres, mais il n'ajouta rien.
Elle était attentionnée, dites donc. Un peu trop. Non, il ne devait rien craindre de ce gamin à bouclettes – peut-être qu'en fait il avait juste un problème avec les bouclés par la faute de Bouclettes en titre. Il était de tout même déjà en train de repartir dans toutes les déviations possibles de la relation entre Nicodem et Alice que cette dernière serrait brièvement sa main sous la table. Son coeur bondit idiotement dans sa poitrine, il lui rendit cette brève pression, appuya plus fortement son genou contre le sien sans rien laisser paraître.

Puis, il y avait de la nourriture pour le distraire.

Faust se jeta, au sens figuré, dans son assiette et commença à engloutir son poulet et ses légumes. Et son steak. Bon sang, c'était bon. Il n'avait pas aussi bien mangé depuis... depuis qu'il avait été à Paris avec Lisa pour l'anniversaire de cette dernière. Franchement, il avait hâte d'avoir son elfe de maison – parce qu'apprendre à faire la cuisine, c'était bien trop compliqué. Un regard de côté et il enfonça sa fourchette dans le plat de spaghettis de Fabian, qui le déplaça automatiquement un peu plus vers Naïma. « Faust Waltz, tu as déjà une assiette et le steak de Nicodem en plus, tu ne vas pas - Mais je veux juste goûteeeer. Tu vas goûter ma main sur la gueule, si ça continue. » Le journaliste fourra la bouchée de spaghettis dans sa bouche. Puis vint l'incident Naïma. D'autres boulettes de pain. Un « Par la barbe de Merlin, mais vous allez me laisser manger ! » retentissant. Et Faust qui pouffait de rire en finissant son assiette.

Une fois le fond de l'assiette bien râclé, nettoyé avec du pain, et son gosier hydraté par son whisky pur feu dans les règles de l'art, le journaliste détacha les deux premiers boutons de sa chemise. « Ça fait du bien, de manger un peu. Par contre, si on reste assis encore longtemps, on va prendre racine. » Il n'était pas capable de rester longtemps sans rien faire, ce n'était pas vraiment son genre. Son assiette vide disparut et il ne pensa même pas au dessert en entendant de la musique jouer. Il y avait un bal, non, après le repas ? Il allait attraper des crampes à danser, mais ce n'était pas important, ça ! Ils allaient digérer, voilà tout, et ça allait leur faire du bien. Sa main se glissa sur la cuisse d'Alice doucement, toujours appuyée contre la sienne. « On va danser, dites ? » Son sourire se fit plus large, enthousiaste. Fabian allait dire oui, évidemment, il aimait bien danser – Fabian aimait bien quelque chose, il fallait s'en rappeler. Naïma aussi allait dire oui, pas de doute. Seuls Nicodem et Alice étaient les deux données inconnues de cette équation dansante. Il se leva de son siège en s'étirant. « On ira finir le tout avec un verre après, pour ceux qui veulent, pour fêter Merlin dignement. Je vais encore devoir payer pour toi ? » Il ignora volontairement la question cynique de son frère.
La réponse était oui, bon.

En riant comme une cruche à la plaisanterie d’Alice, je rajoutais les quelques noises que coutait mon supplément de fricassée de légumes avant de me mettre à la suite d’Alice et Faust. « Moi je vais directement au bar les devancer sur la boisson. Avec toute cette bouffe il me faut un petit digestif avant de take it down on the dancefloor. HAAAAAAAAN ! J’ai même pas practiced mon booty shake avant de venir en plus ! Ah non, c’est clair, il me faut un verre avant de danser ! Fabiaaaaan, tu viens avec moiiii ? » M’accrochant à son bras comme un koala sur sa branche, je regardais le Waltz avec l’intensité d’un petit chiot, ce qui se montra aussi utile que de commander une boisson allégée pour accompagner un burger au bacon avec double portion de frites pour ne pas grossir. « Non, moi j’ai envie de danser. » « Tu pues ! » Sans attendre, je le repoussais pour m’accrocher à Nicodem et lui demander d’une voix mielleuse. « Et toi Nicodeeeem ? Tu vas pas m’abandonner heiiiiin ? » Sans lui laisser l’occasion de me contredire, je commençais à le trainer vers le bar près de la piste de danse. « Et moi je fais quoi là ? Je danse tout seul ? » « Oh, tu trouveras surement une ou deux aveugles qui accepteront de danser avec toi ! »

Me frayant un chemin à travers la foule, fermement agrippée au bras gauche de Nicodem, j’atteignis finalement le bar bondé. J’entrepris donc la ô combien difficile tâche de commander des boissons malgré le monde, ce que je réussis à faire après une vingtaine de secondes d’exaspération en passant presque par-dessus le bar et en faisant de grands signes de la main au barman, mes jambes s’agitant dans l’air. Après un rapide calcul, je commandai 7 shooters de whisky Pur-Feu – beh oui, un pour Alice, Faust, Fabian, Nicodem, et trois pour moi ! -. La commande enfin arrivée, je tendis son verre à Nicodem, faisant fi de n’importe quelle objection qu’il aurait pu proférer, et levai le mien en scandant « Na Zdorovie ! » avant d’avaler mon verre cul-sec. « Oh Merlin, ça me rappelle ! » m’exclamais-je en donnant une tape sur l’épaule de Nicoco – pourquoi le pauvre ?! –. « La dernière foiiis ! Y a genre deux semaines, j’étais dans ce bar, sur le Chemin de Traverse, avec Violet – tu connais Violet non ? – et genre il était tenu par des gobelins. Ouais, je sais, un bar tenu par des gobelins, ça m’avait choquée aussi, et franchement en temps normal j’y serais jamais allée, t’as vu, mais c’était l’ouverture et Vi’ avait des entrées. Bref, donc y va et tout, c’est sympa, ‘fin normal quoi. Et genre y a un moment, y a un espèce de russe ou chais-pas-quoi qui arrive et il veut me payer un verre. Alors je lui fais non et tout, que me verres je les paye toute seule comme une grande fille, ‘fin normal quoi… [...] » Je vous épargne la suite de l’histoire, que Nicodem s’est pourtant prise en pleine gueule sans avoir la possibilité d’en placer une pendant près de cinq minutes. « [...] ET LA ! Le type il me sort " Maintenant, toi nettoyer ! " avec son accent de meeeerde ! Alors moi j’suis en panique et tout parce que j’étais de plus en plus persuadée que le type c’était un mafieux ou chais pas quoi donc je monte sur mes grands chevaux et je fais genre " Attends, l’homme qui m’ordonnera de nettoyer quoi que ce soit il est pas né ! Tu me prends pour qui ? Tu payes mes factures ? On habite ensemble ? On est mariés ? T’es qui pour me donner des ordres ? " Mais genre n’iiiiiimporte quoi ! Je veux juste gagner du temps quoi, et là… Oh, Faust, Alice ! Vous êtes déjà là ? » Les applaudissements retentissant sur toute la piste de danse et les visages rougis des deux danseurs semblaient indiquer que la chanson était finie, je m’empressais donc de leur tendre leurs verres. « Oups, je crois que j’ai bu le tien en attendant ! » M’exclamais-je à l’attention d’un Fabian qui venait juste de nous rejoindre. « Ugh, je vais m’en chercher un autre.
– Tu m’en prends uuuuun ?
– T’as pas assez bu tu penses ?
– Pfff, à peine quatre verres ! Je peux boire plus que n’importe qui ici ! » Odieux mensonge, je devais probablement tenir l’alcool aussi bien qu’une bonne sœur japonaise. Il parait que l’entrainement fait la perfection mais dans ce cas-là, j’avais l’impression que c’était de pire en pire à chaque fois.

La conversation reprit mais je la suivais à peine, me contentant de rire quand les autres riaient, tout en détaillant Faust et Alice. Je me demandais ce qu’il y avait entre eux ? Ils étaient ensemble ? Probablement pas, du peu que je connaissais de Faust (et non, ça ne se résumait pas seulement à " il est très mangeable "), ça ne lui ressemblait pas. Mais alors quoi ? Quand Fabian revint avec les verres, je pris une gorgée de whisky et lâchais ce qui me pesait sur le cœur.

Avant ça ! Nous avons besoin d’un petit laïus sur l’étrange créature qu’est la Naïmatis Zabinicus, plus communément appelée la Naïma. La Naïma est un animal à quatre facettes majeures que l’on dénommera : la Conne, la Garce, la Salope, et la Connasse. Quand elle se réveille le matin, Naïma est une Conne, elle a des pensées connes, mange comme une conne, rit comme une conne, c’est une Conne. C’est la facette dominante de la Naïma, celle qu’elle occupe le plus souvent. La Garce c’est quand elle est au travail ou en mission, la Garce est froide, sans pitié pour les ennemis de la Nation comme pour les gens mal habillés, elle n’hésitera pas à écraser vicieusement ses ennemis et n’en éprouvera aucun remords. La Salope, c’est quand elle a des envies que la morale réprouve, ce qui arrive assez souvent lorsque Faust est dans les parages. Et la Connasse c’est maintenant, c’est quand elle a commencé à boire et qu’elle devient absolument ignoble. "Oh mais non, il ne faut pas que je dise ça ! Ça pourrait être mal interprété et/ou faire du mal à quelqu’un ! " est une pensée que la Connasse ne connait pas. La Connasse n’a aucune morale, elle blesse avec le sourire et rit comme une pouffe en énonçant des vérités qui fâchent. Et la Connasse est bien réveillée à l’instant présent et demande à Faust et Alice sans aucune gêne apparente :

« Eh, sinon, vous avez déjà couché ensemble tous les deux ?
– Oh, PITIÉ !
– Quoiiiii ? Faites pas vos choqués, je sais que tout le monde se pose la question depuis tout à l’heure ! Pas vrai Nicodem ?
– Non mais attends, on demande pas ça aux gens, j’suis désolé…
– Mais ça va, arrête de faire ta princesse c’est pas comme si…
– Mais je fais pas ma princesse ! C’est toi qui…
– Si tu fais ta princesse ! Son Altesse Sérénissime la Princesse Fabian du Royaume des Coincés-du-Cul !
– Mais ta gueule, je fais pas ma princesse ! C’est juste que de une, tu la connais A PEINE ! Et de deux, j’ai pas envie de savoir ça, franchement !
– Toi ta gueule ! Tu me dis pas ta gueule !
– Ne me dis pas ta gueule si tu veux pas que je te dise ta gueule !
– Bah t’as qu’à me dire ta gueule à la base !
– Et toi t’as qu’à pas me traiter de princesse !
– Mais je dis c’que j’veux bordel !
– Bah moi aussi !
– ET BAH VOILA ! DONC TA GUEULE !
– … Toi ta gueule.
– TU ME SAOULES ! » hurlais-je sans pouvoir contenir mon hilarité.
« Bon allez, t’as assez saoulé les gens, on va danser.
– Atteeeends, j’ai pas fini mon verre !
– Eh bah finis-le ! » Un sourire insolent sur les lèvres, je finis mon verre cul-sec avant de prendre Fabian par la main et de me faire trainer sur la piste de danse puis de bouger en rythme avec mon cavalier. « T’es vraiment insortable comme fille, tu le sais ça ? » « Tais-toi, tu sais pas t’amuser, c’est tout ! » répondais-je en riant alors qu’il me faisait tourner. « Eh mais attends ! C’est pas le bal de fin d’année de Poudlard, on peut se lâcher ! » Sans attendre, je me mettais dos à Fabian et plaçais sa main droite sur ma hanche, tandis que ma gauche allait se nicher derrière sa nuque. « T’es pas en rythme. » « Et toi t’as des sourcils bizarres. Tu vois, personne n’est parfait. »