Thomas la sentait clairement inquiète et à vrai dire il y avait de quoi. Être perdu au milieu de nulle part et en terrain hostile n’était clairement pas la sortie en amoureux qu’ils prétendaient faire officiellement. Ca n’empêchait pas Thomas d’adorer ce qu’ils étaient entrain de faire et cet arrière goût de danger imminent et possiblement fatal qui planait dans l’air maintenant qu’ils étaient si proche du but. Il comprenait cela dit que ce plaisir ne soit pas exactement partagé par son épouse, ils n’avaient jamais vraiment été sur la même longueur d’onde à ce niveau et c’était bien pire depuis son retour. Ca ne l’empêchait pas non plus d’aimer l’avoir à ses côtés dans ce genre de moment particulièrement intense.

Lui aussi, l’idée qu’il leur arrive malheur l’angoissait d’une certaine manière. Mais en même temps, n’était-ce pas tout l’intérêt de la chose ? Marcher au bord du gouffre avait quelque chose d’hypnotisant et de séduisant. Il avait toujours adoré se perdre et s’isoler en terrain totalement inconnu voir dangereux. Il s’en était mordu les doigts l’année dernière pourtant ça ne l’avait pas soigné, au contraire, ça avait tout simplement décuplés le problème par dix. Il ne comprenait pas lui-même pourquoi et se contentait de constater qu’il se sentait toujours bien mieux loin et isolé que dans son propre pays entouré de ses compatriotes.

D’un côté, il avait bien envie de brusquer les choses et d’inciter Nora à intervenir dès ce soir, baguette à la main ! Son côté Gryffondor certainement, qui lui soufflait de ne pas attendre, de foncer dans le tas dès à présent ! Pourtant son amour de l’apprentissage et de l’observation l’emportait le plus souvent, et il lui arrivait de choisir la réflexion à l’action, même si c’était difficile à croire.... Si Nora voulait attendre le lendemain soir, alors il en serait ainsi, et Thomas ne considèrerait pas le temps comme perdu puisqu’il pourrait en profiter pour apprendre tout un tas de choses sur cette communauté particulièrement isolée et pourtant très connues dans le monde magique. Peu de sorciers avaient un jour eu l’occasion d’observer ces êtres d’aussi près et pour une période aussi longue. C’était une chance, même si ça retardait la vraie raison de leur venue ici.

Sans protester, il accueillit donc le baiser de Nora d’un petit sourire doux avant d’acquiescer.

« Si. Tu as parfaitement raison. Rentrons, je pense qu’elles en ont fini pour ce soir de toute manière »

Il avait bien envie de passer la nuit là à observer, mais la plus part d’entre elles dormaient effectivement, et l’activité était réduite à son stricte minimum depuis l’intervention de la vieille Harpie en charge du camp. En plus de ça il était trempé et avait vraiment besoin de manger. Ce qu’il fit rapidement d’ailleurs une fois remit sur ses pieds et éloigné de la corniche. Toutes ces années passées à trainer Nora derrière lui durant ses voyages et à lui apprendre à faire d’un rien leur confort payaient manifestement car leur repas manquait certes de goûts, mais il avait le ventre plein et c’était ça le plus important. Cela fait, ils se glissèrent l’un et l’autre sous la douche avant de regagner leur épaisse couette. Il ne fut pas surpris que Nora se colle immédiatement à lui, comme un naufragé s’agrippe à une bouée de sauvetage.

Il savait pertinemment quel genre de pensées sombres, et quel genre de souvenirs douloureux pouvait planer sous ses grandes boucles brunes à présent. S’exposer à un tel danger, et donc à la mort, ne pouvait pas avoir d’autres effets sur elle que de la ramener quelques douloureux mois en arrière, lorsqu’elle se croyait encore veuve.

Lui promettre que les choses se dérouleraient bien et qu’ils garderaient la situation sous contrôle aurait été très hypocrite de sa part, mais il y devait bien y avoir d’autres mots capables de la réconforter et Thomas médita quelques instants sur ceux-ci… sans être capable d’en trouver un seul.
Etrangement ce fut l’un de ces dictons tout fait dont raffolait son acariâtre père qui lui vint à l’esprit : « Ne parle pas, agis ! »

Ebauchant un demi-sourire, Thomas enroula un bras autour du cou de sa compagne avant de l’attirer à lui pour l’observer dans les yeux. Elle ne disait rien mais son grand regard bleu parlait pour elle, plein d’amour et de promesse pour toujours.
Il lui aurait bien fait de grandes déclarations mais leur préféra un long baiser tendre, avant de rouler sur elle pour venir se nicher entre ses cuisses… et agir au lieu de parler. Mais mieux valait qu'il ne songe pas à son vieux père maintenant.

Ils passèrent six heures au lit avant que l’aube ne les lèves, mais leurs heures de sommeils étaient moindre, surtout les siennes. Au final, il n’avait fermé l’œil que deux petites heures pour se lever le premier, comme d’habitude, ses jambes emmêlées avec celles de Nora et une main sur son ventre nu sous les couvertures.
Une fois debout il entreprit de vérifier leurs sorts de protections et de ranimer le feu avant de réchauffer les restes du repas de la veille pour avoir quelque chose dans le ventre. Le temps que Nora ne le rejoigne il était de retour sur sa corniche, sa longue-vue collée à l’œil pour observer les Harpies en contrebas.

Thomas avait passé la journée les pieds dans le vide au rebord de sa corniche rocailleuse. Le dos et les jambes ankylosés, il continuait pourtant inlassablement son observation, comme si rester là à les observer évoluer à leur insu allait les aider d’une quelconque manière. En quelques sortes, ça serait le cas car après autant de temps l’œil rivé sur elles il avait fini par appréhender beaucoup mieux leur manière de vivre et de se comporter entre elles.

Premièrement, il y avait une hiérarchie strictement respectée. Peut-être mieux respectée encore que chez les humains, ce qui en soit, n’était pas un très grand exploit. Cette hiérarchie en question, comme chez les animaux, était la plus part du temps établie par la domination des plus fortes, mais aussi des plus malignes. La longueur des cheveux semblait revêtir une certaine importance également, mais Thomas n’avait pas encore eu l’occasion de parfaitement cerner pourquoi puisqu’il ne pouvait pas les entendre et n’aurait de toute manière pas comprit ce qu’elles pouvaient raconter si ça avait été le cas.

D’ailleurs, la langue qu’elles semblaient utiliser ne ressemblait décidemment à aucune autre selon les quelques bribes qu’il était arrivé à percevoir depuis l’endroit où ils s’étaient dissimulés. Majoritairement, elles s’exprimaient avec tout un tas de syllabes dures et cassantes, accompagnés de grognements et de quelques mots de Russes par-ci par-là. Thomas avait d’abord craint que la barrière de la langue soit un problème pour l’entrevue à venir, mais il s’agissait tout de même de la tribu de Babayaga, et même si celle-ci n’était plus, sa réputation perdurait. Sanglante oui, mais loin d’être idiote. Et même si ses ouailles avaient l’air sauvage dans leurs peaux de bêtes et leurs cahutes inquiétantes et recouvertes d’ossements, leur comportement et l’organisation du camp reflétait une certaine intelligence. C’était en même temps une bonne et une mauvaise nouvelle.

Il en était là de ses réflexions lorsque Nora le rejoignit. Il perçu immédiatement son stress à la manière qu’elle avait de se tordre les doigts. Il avait beau se montrer rassurant et calme, il semblait impossible qu’elle arrête de s’en faire. Après tout, ils possédaient des baguettes ce qui leur donnait un avantage naturel par rapport au Harpies.

Il esquissa un faible sourire avant d’acquiescer. Tous ses arguments étaient effectivement plus que valables malgré ce qu’elle avait l’air de penser.

« Pas du tout » nia Thomas en se relevant pour la rejoindre, sa longue vue dans les mains « Mais une fois là-bas, évite de leur montrer que tu as peur. Le moindre signe de faiblesse pourrait nous couter une jolie petite fortune »

Mais bien loin de vouloir lui mettre la pression, il n’en dit pas plus et se contenta d’une main rassurante sur l’épaule avant de l’entrainer vers la tente. L’heure était venue de se préparer pour l’intervention de ce soir et ils commencèrent par se remplir le ventre une dernière fois même si le stress ne stimulait pas exactement l’appétit. Il se chargea ensuite de rassembler les affaires et de ranger la tante tandis que Nora éteignait leur feu de camp. Lentement mais sûrement, le soleil déclinait à l’horizon, et lorsqu’ils furent prêts, ils quittèrent doucement leur perchoir pour se rapprocher un peu plus du camp et laisser la pénombre faire son office. Ils durent attendre deux bonnes heures de plus pour que la nuit soit totale grâce aux gros nuages gris qui continuaient d’obstruer le ciel. Vers 23h il se mit d’ailleurs à pleuvoir légèrement, et Thomas décida que c’était le bon moment d’agir.

Il débuta par un sort d’imperméabilité sur Nora et lui-même, avant d’enchainer par un sort de désillusion.

Oui & Oui : Nora et Thomas sont parfaitement dissimulé aux yeux des Harpies.
Oui & Non : Ils sont totalement invisible, mais si l’on prête attention, leur pas se dessinent dans la poussière et l’herbe.
Non & Oui : Nora est parfaitement dissimulée, mais une étrange déformation de l’air autour de lui peut par contre révéler la position de Thomas.
Non & Non : Nora et Thomas sont transparents mais leurs silhouettes se dessinent dans l’air et leurs pas sont visibles dans la poussière.

Agrippant la main de sa femme, Tom l’entraina en avant sans lui laisser plus de temps pour tergiverser et douter. Direction la plus grande Yourte du camp. Ils sortirent de la forêt et s’engagèrent dans la praire où se trouvaient le village. Slalomant silencieusement entre les huttes, ils arrivèrent à hauteur de la plus imposante d’entre elle et remarquèrent une petite harpie, accroupie à quelques mètres de la porte, sa grosse tête crochue et hirsute penchée sur une paire de chaussures rouge qui appartient à Nora.

Un légèrement craquement sous leurs pas la sortit de ses contemplations et ses petits yeux sombres se braquèrent dans leur direction. Par réflexe et pour faire le moins de bruit possible, les deux Macnair se figèrent. Quelques secondes, Thomas se cru tirer d’affaire, mais son regard se plissa sournoisement… pour s’agrandir d’étonnement juste après. Les alarmes intérieures de Thomas se mirent en route et brandissant sa baguette il lança sur la petite Harpie un sortilège de confusion.
Il vit son regard se voiler et redevenir neutre, fixant le vide d’un air vague.

Oui : Le sort de confusion est totalement efficace et durera un long moment, il ne faut donc pas s’inquiéter, elle n’alertera personne !
Non : le sortilège agit pour le moment mais commence déjà à se dissiper ! Tom et Nora auront un temps limité avant qu’elle ne reprenne assez ses esprits pour donner l’alerte.

Cela fait, Tom glissa de nouveau sa main dans celle de Nora et ils s’approchèrent tout deux de la hutte. C’était encore plus impressionnant à voir de tout près, et les orbites vides des crânes entassés arrachaient frissons et chairs de poule aux deux sorciers. Ils gravirent pourtant les escaliers-tête-d’ours à pas de loup et s’immiscèrent derrière l’épais rideau sale. Ils arrivèrent dans une espèce de petit hall délimité d’innombrables lambeaux de tissu vaporeux et transparent, une antichambre pour couper le froid certainement. D’ailleurs, plusieurs coupelles de métal contenaient d’énormes braises chaudes qui rougeoyaient l’atmosphère et ensanglantait les murs. Une voix grinçante et chevrotante s’élevait depuis le fond de la Yourt mais avant de s’aventurer plus loin, Thomas fit l’état des lieux, son cœur battant légèrement plus vite pour son plus grand plaisir.

Oui & oui : par chance, la vieille Harpie qui semble diriger le camp aujourd’hui n’est entourée que de deux autres Harpies.
Oui & Non : Trois autres Harpies sont présentes en plus de la matrone.
Non & Oui : Quatre autre Harpies sont présentes en plus.
Non & Non : Cinq autre Harpies sont présentes en plus.

Il ne fallut pas longtemps à l’ancienne Harpie pour sentir la présence des deux sorciers dans sa Yourt. Thomas ne fut même pas surprit, à vrai dire, c’est exactement comme ça qu’il s’était figuré la scène et il était presque content qu’il en soit ainsi puisqu’il lui tardait tant d’argumenter et de se confronter à ces êtres étranges. Il fallait que cette Harpie soit particulièrement intelligente, sauvage et charismatique pour mener une telle population, et surtout pour succéder à Babayaga dont la réputation sanglante perdurait à sa mort. Et si le visage de Nora se tordait d’une grimace, de son côté c’était d’un petit sourire dont il s’était paré. Cette situation était grisante même si bien sûr, il restait sur ses gardes, baguette étroitement serrée entre ses longs doigts noueux. Par prudence, il restait également tout proche de Nora pour intervenir et la mettre à l’abri aussitôt qu’une confrontation violente serait sur le point d’éclater. Pour l’instant néanmoins, les choses étaient certes tendues, mais parfaitement sous contrôle. Les quatre harpies qui entouraient l’aînée étaient méfiantes et sur le qui-vive, mais restaient tranquilles et silencieuses pour le moment.

Tandis que Nora entamait les négociations tant attendues, Thomas les gardaient bien à l’œil tout en prêtant une oreille attentive aux paroles de sa femme. Celle-ci était souvent bien plus versée que lui en matière de diplomatie, et sa douceur ferme mettait généralement les plus récalcitrants en confiance, si ce n’est à l’aise. Quelque chose à voir avec ses grands yeux tristes d’un bleu pur certainement ! Il la laissa donc faire les présentations avec calme. Bonne idée de commencer par là d’ailleurs, pour instaurer un dialogue d’égale à égale et éviter que ces demoiselles aux fasciés grimaçants ne se sentent prises de haut par ces deux sorciers anglais inconnus au bataillon qui s’invitaient sans gêne jusque dans sa hutte.

Thomas devait reconnaître que les petits yeux noirs et profonds de la vieille Harpies étaient difficiles à soutenir. C’était comme deux tout petits puits sans fond où brillait une espèce de lueur espiègle qui ne lui disait rien qui vaille. Il y avait beaucoup de sournoiserie dans ce visage fripé et édenté. Mieux valait rester des plus vigilent. Elle prit son temps pour répondre, et maintenant plus proche, elle prit place sur un amoncellement de coussin dépareillés et grisés de poussière. Elle les observa quelques instants avant que ses lèvres pâles et fines ne s’étirent en un sourire un peu inquiétant, mais qui se voulait accueillant… enfin du moins, c’est ainsi que Thomas interpréta son expression, mais en réalité c’était un peu dur à dire…

Elle les invita tout de même à s’assoir aussi, désignant les coussins devant elle de sa longue main en araignée, et même si la propreté des lieux laissait à désirer, ils s’exécutèrent pour ne vexer personne.

« Fiodor » se présenta-t-elle en pointant sa poitrine « Mes filles » en désignant cette fois les quatre beautés qui s’étaient rapprochées de leur mère.

La première, plus grande, costaude et à l’allure ‘hommesque’, avait un nez en forme de groin et une mâchoire proéminente d’où dépassait une dent grise et rongée qui lui remontait sur la lippe. Juste à côté se trouvait une petite Harpie minuscule, surtout courbée et recroquevillée comme une grenouille, aux cheveux si hirsutes qu’on ne distinguait même plus son visage. La troisième louchait et possédait un long nez crochu d’où coulait un liquide jaune répugnant, quant à la dernière, complètement décharnée, sa peau était comme translucide, ses yeux rouges, et ses cheveux d’un blanc de neige mais tellement sales qu’ils en étaient noirs à certains endroit. Le portrait de famille était absolument charmant et Thomas avait en tête tout un tas de remarques désopilantes qu’il jugea plus prudent de garder pour lui – tout en s’empêchant de rire ou même de pouffer sous cape.

« Votre anglais semble très bon, je craignais que la communication ne soit compliquée. Ce n’est visiblement pas le cas » fit-il remarquer.
« Touristes… » se contenta-t-elle de répondre… et vu le sourire mauvais, avide qui se dessinait sur sa vieille face… Thomas n’avait même pas envie de pousser la question plus loin.

Il se contenta d’hocher la tête et de reprendre là où Nora s’était arrêtée avant qu’ils ne s’assaillent.

« Avant d’aller plus loin, nous aimerions savoir si vous avez été approchée par d’autre faction que l’Ordre. Si les Salamander ou les Kark vous ont également fait une offre, je pense qu’il est normal que nous soyons mis au courant »

Oui & oui : Non, les Ordres sont pour l’instant les premiers sur le coup, bonne chose !
Oui & Non : Les héritiers les ont déjà approchés mais la rencontre s’est apparemment très mal déroulée, elle ne leur donne pas plus de détail.
Non & Oui : Les Ombres les ont déjà approchés, elle reste évasive mais apparemment méfiante.
Non & Non : Elle refuse de répondre à cette question. Tant pis...

« Je vois. Comme l’a dis mon épouse, nos deux factions ennemies prennent de plus en plus d’ampleur, mais ils ne sont pas les seuls. Nous avons déjà failli passer au pouvoir une première fois, je pense qu’il est fort possible que la chose se produise encore, et d’ici peu. Chaque jour, nous somme un peu plus proche du but et votre aide pourrait bien nous aider à financer quelques opérations déterminantes pour nous et pour l’avenir entier de notre pays. L’ordre du Phoenix est connu pour ne jamais oublier ses alliés, vous le savez sans doute. Nous payons toujours nos dettes et nous savons nous montrer très reconnaissant … »

Fiodor ne fit aucun commentaire tout de suite et plissa ses petits yeux sombres, l’air méditatif.
« Combien ils veulent ? » articula-t-elle d’une voix mielleuse qui lui allait très mal…
« Eh bien… ça dépend, combien avez-vous ? » sourit Thomas, sous entendant ainsi qu’il prenait tout ce qu’elle voulait bien leur donner.

Une fois de plus, Fiodor sembla réfléchir intensément, avant de se tourner vers ses filles et de leur lancer un ordre dans leur langue étrange et râpeuse. Elles se mirent immédiatement en mouvement et se précipitèrent vers le fond de la tente, dissimulé derrière un haut paravent de bois sculpté.

Oui & oui : Elles ramènent devant eux deux caisses de bonnes tailles remplies d’or, ainsi qu’un petit sac de bijoux apparemment volés.
Oui & Non : Elles ramènent trois caisses remplies d’or ainsi qu’un sac de bijoux.
Non & Oui : Elles ramènent trois caisses remplies d’or, et deux gros sacs de bijoux.
Non & Non : Elles ramènent trois caisses d’or, deux gros sacs de bijoux ainsi qu’une quatrième caisse remplie d’argenteries russes anciennes de très grande valeur.

Bien, elle jouait au poker et mettait sa mise sur la table. Maligne de leur agiter l’appât sous le nez de cette manière. C’était beau à voir… très beau à voir.

« Est-ce que tout est là ou… ? » demanda Tom d’un petit sourire malicieux.

Oui : tout est là.
Non : … il se pourrait qu’éventuellement… il y en ait plus…

Thomas ignorait qui dirigeait l’Ordre du Phoenix ici en Russie, mais le territoire étant tellement démesurément grand, peut-être y avait-il carrément plusieurs leaders et différentes cellules. Quoi qu’il en soit, les Phoenix étaient présents partout, parfois bien peu nombreux selon le territoire, mais partout, ça il le savait, et les Harpies le savaient sans doutes aussi. Les arguments de Nora étaient excellents, mais qu’en penseraient ces fameux Phoenix Russes ? William devait très certainement être en fréquent contacte avec eux, et les avoir avertit de leur présence à tous les deux d’ailleurs, mais n’était-ce pas s’avancer que de promettre à leur charmante ôte leur aide en cas de pépin ? William leur avait donné carte blanche quant à l’argumentation, mais lorsque Thomas donnait sa parole, il entendait que celle-ci soit tenue, quoi qu’il arrive, et quoi qu’il en coûte, même lorsque c’était à une hideuse Harpie mangeuse de bébé qu’il la donnait…. Il espérait donc que les représentants de l’Ordre ne les feraient pas mentir.

De toute manière, la promesse d’une aide des Phénix en cas d’éventuel problème n’était apparemment pas suffisante à Fiodor, la moue irritée qu’elle arborait maintenant en était la preuve et le sang pur craignit une rebuffade l’espace d’un instant. Ils avaient trop peinés en chemin pour que tout ne s’écroule au bout de quelques petites minutes de parlementassions seulement ! Rapidement, le sorcier fit fonctionner ses méninges pour essayer de trouver quelque chose, une idée, un argument capable de les appâter assez pour les convaincre de leur donner l’or. Rapidement, il détacha donc ses yeux clairs des cinq fasciés disgracieux pour parcourir la hutte à la recherche d’une idée lumineuse.

Au final, son regard rencontra un bout de tissu bien connu, laissé à l’abandon à même le sol, quelque part dans le fond de la Yourte ou tout un bric à braque crasseux semblait s’entasser. Le bout de tissu en question était vaporeux, couleur lavande et malheureusement déchiré de toute part. Mais il fut un temps pas si lointain où cette loque était l’une des robes préférées de sa femme…
Il se souvint alors la veille, lorsqu’ils avaient observé depuis leur perchoir les quelques Harpies revenir à leur camp avec leur propre sac à dos perdu au moment où le Chouka de Nora s’était sauvé.

Peut-être que la solution était là ? …

« J’admets que notre parole seule peut paraitre faible, mais il ne tient qu’à vous d’exiger quelque chose en retour Fiodor » intervint donc Thomas en échangeant un bref regard avec Nora « Que désirez-vous en échange de l’or ? »

La vieille Harpie renifla d’un air songeur avant de se tourner vers ses filles avec qui elle échangea quelques mots secs et incompréhensibles pour eux. Les deux Macnairs les laissèrent parler entre elles, dans l’expectative, jusqu’à ce que la doyenne ne leur accorde de nouveau son attention.

« Fiodor à déjà dit au chef. Le Phoenix doit donner des bébés !! » s’exclama-t-elle de sa voix rauque et chevrotante, tandis qu’à ses côtés, ses quatre filles émettaient quelques sons et claquements de dents fébriles et gourmands.

Thomas du se faire violence pour ne pas laisser une grimace de dégoût profond ternir ses traits, et rester le plus neutre possible pour ne pas vexer ces demoiselles.

« Vous savez très bien que l’on n’peut pas vous fournir de bébés Fiodor. Si vous ne voulez pas nous donner d’or, dites-le franchement »
« Des bébés ou RIEN ! » vagit la vieille en découvrant ses chicots pourris d’un air menaçant.
« Les sorciers ne font pas ce genre de choses et vous le savez ! » répliqua Tom d’un ton sec « De toute manière, même si c’était le cas, et que l’on acceptait de vous… donner des bébés, en quoi seriez-vous avancées ? Une fois mangés, vous vous retrouvez sans bébés, sans or, sans rien du tout. Pourquoi ne pas nous demander quelque chose d’utile ? Quelque chose qui pourrait réellement vous servir ? »

D’un air suspicieux, Fiodor plissa ses petits yeux sombres. Elle avait l’air sceptique, mais il avait récupéré son attention.

« C’est mon écharpe que je vois là » désigna finalement Tom en montrant les hanches de l’une des quatre filles de Fiodor, la plus grande « … vous aimez les vêtements ? »

Fiodor gardait pour l’instant une mine encore fermée, mais ses filles elles, semblèrent tout de suite plus intéressées…

« Que diriez-vous d’une aide sanitaire ? »
La Harpie ne sembla pas comprendre et Thomas s’expliqua un peu mieux.
« Eh bien… de beaux vêtements, des robes, des capes, des chaussures, des objets que vous pourriez garder, et qui vous serviraient dans votre vie de tous les jours, comme… de plus gros chaudrons, des miroirs, ou … des ustensiles de cuisines, de nouveaux coussins, pourquoi pas ? » proposa-t-il en désignant ceux sur lesquels ils étaient assis.

Oui & Oui : l’idée semble les intéresser tout particulièrement et a effacé complètement la précédente mauvaise impression. Ne reste plus qu’à établir un peu mieux les choses.
Oui & Non : l’idée semble intéresser les quatre filles de Fiodor, mais la mère elle, garde un air sceptique, encore un tout petit effort donc.
Non & Oui : Deux des filles de Fiodor semblent conquises par l’idée, mais la mère et les deux autres sont encore très méfiantes, même si l’idée semble leur plaire. Il faut rajouter quelque chose en plus à leur offrir, et continuer à se creuser les Macnair !
Non & Non : L’idée plait aux filles, mais la mère les fait taire d'un japement sec. L'idée n'est pas si mal, mais franchement ça ne remplace pas une petite brochette de bébés. Try again losers !

Fiodor s’était soudainement mis à grogner dans cette affreuse langue qui était la leur. Chaque syllabe faisait claquer ses dents noircies les unes contre les autres, hachurant ses phrases de bruits et grincements étranges et déplaisants qui ne lui disait rien qui vaille. Ses filles en remirent presque aussi tôt une couche et elles argumentèrent ainsi durant une interminable minute qui faillit bien tourner à la dispute de famille. Leurs éclats de voix stridents firent même sursauter le sorcier à une ou deux reprises et il échangea un regard en coin discret avec sa femme. Ces espèces de sales petites pestes étaient sacrément dures en affaires. Du moins, leur chef l’était, ce qui n’était pas si étonnant que ça puisqu’elle avait réussit à se hisser au sommet de sa troupe de charmante lady. C’est qu’elle devait avoir un tempérament digne de la sanglante Baba Yaga à qui elle succédait fièrement…

« Le Phoenix donne les bébés de ses ennemis !! » finit-elle par articuler en anglais en revenant brusquement vers eux, son nez crochu plissé par la colère.

Il fallut quelques instants à Thomas pour comprendre pourquoi ils en revenaient une nouvelle fois à parler de bébé. Fiodor semblait y tenir, peut-être que céder pour autre chose lui donnait l’impression d’être faible et de perdre la face. Leur comportement était relativement tribal et c’aurait donc pu être une interprétation plausible de cet acharnement. Le tout était donc de lui donner l’impression qu’elle y gagnerait plus en changeant d’avis, ce qui s’avérait véritablement difficile à faire vu les circonstances.

« Nous ne pouvons pas faire ça Fiodor. Nous ne vous donnerons aucun bébé, peu importe la faction de leurs parents » articula-t-il d’un petit sourire poli ou perçait tout de même une très nette note d’impatience.

Il fallait aussi qu’elle sente qu’ils n’étaient pas deux idiots sans argumentation ni caractère. S’il fallait laisser tomber les politesses pour se faire entendre, et bien cas cela n’tienne.

« Pourquoi ?! » s’excita la vieille en frappant du poing contre un coussin qui laissa échapper un petit nuage de poussière « Ils veulent vous tuer ? Il faut tuer d’abord ! Donnez-nous leurs bébés, et on donnera l’or au Phoenix » elle sourit d’un air mauvais.
« Je viens de vous dire que c’était non ! Bon sang, nous n’vous donnerons pas de bébés parce que nous ne faisons pas ce genre de chose, nous n’faisons pas de mal aux bébés, même les bébés de nos ennemis, vous comprenez ça ? Ca s’appelle avoir du respect pour la vie, et c’est d’ailleurs pour cela que nous sommes là. Cela devrait pourtant vous convaincre de notre bonne foi. Car si nous respectons nos ennemis, sachez que nos alliés sont mieux traités encore … »
« …. Hmmmm … des bébés moldus ? »
« NON ! »

Fiodor ouvrit la bouche pour répondre, mais l’une de ses quatre filles, celle aux cheveux blancs et aux yeux rouges, se hissa soudain à sa hauteur pour lui murmurer quelque chose à l’oreille. Thomas fronça imperceptiblement les sourcils, n’osant pas même échanger un regard avec Nora. Il ne savait pas quoi espérer de cette intervention et craignait le pire tout en espérant le meilleur.

La fille de Fiodor finit tout de même par se rassoir, laissant à sa mère un vague petit sourire satisfait qui lui fit presque froid dans le dos…

« Est-ce que le Phoenix respect la vie des poulets ? »

La question le laissa sans voix, resta un long moment suspendue dans l’air, comme le petit nuage de poussière qui flottait encore entre eux… Cette fois il tourna un bref regard vers Nora qui n’avait pas l’air de comprendre non plus d’où sortait cette question parfaitement loufoque.

« Haem… eh bien… oui mais… un petit peu moins tout de même que celle des bébés humains, j’avoue… pourquoi ? » questionna Thomas tout en songeant qu’effectivement, les os de poulets semblaient avoir une certaine importance dans les environs…

La réponse semble enfin convenir à la vieille, et le verdict tombe :

Oui & Oui : Elle exige l’aide sanitaire proposée ainsi que 100 gros poulets, en échange, elle leur donnera l’or qu’ils ont sous le nez.

Oui & Non : Elle exige l’aide sanitaire proposée, 120 gros poulets, ainsi que des potions explosives pour se défendre en cas d’attaque.

Non & Oui : Elle exige l’aide sanitaire proposée, 150 gros poulets, des potions explosives pour se défendre en cas d’attaque, ainsi que la paire de chaussures que porte Nora qui plait beaucoup à Karlinka sa fille… si ils acceptent, elle rajoute un petit écrin rempli de pierreries très précieuses.

Non & Non : Elle exige l’aide sanitaire proposée, 200 gros poulets, des potions curatives pour se soigner, et explosives pour se défendre en cas d’attaque, ainsi que la paire de chaussures que porte Nora qui plait beaucoup à Karlinka sa fille… s’ils acceptent de leur fournir tout ça, Fiodor leur rajoute une sacoche remplie d’argenterie russe très anciennes qui valent une petite fortune pour les sorciers en Europe…

Pour Thomas, le deal était accepté, mais il tourna tout de même la tête vers sa femme pour obtenir son approbation avant que l’affaire ne soit complètement adjugée.